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PDV Jordan

J'avais un entretien avec Marine ce matin. J'étais déjà installé dans mon bureau, impeccablement coiffé et habillé comme à l'accoutumée. Je me demandais vaguement sur quoi allait porter notre échange.

Dans quelques semaines, j'allai commencer à préparer le programme pour les législatives. A côté de ça, je devais aussi gérer les trajets au parlement. Sans compter les nombreuses invitations dans les émissions de télé, radio etc. Je soupirai déjà rien que d'y penser...

J'aimais mon travail. Mais depuis mon accident, j'avais l'impression que les choses avaient changé : ce n'était plus l'unique raison pour laquelle je me levais le matin. La vraie raison maintenant se résumait à un beau brun d'1m75 qui ressemblait comme deux gouttes d'eau à mon opposant politique...

Je souris à ma propre blague : Gabriel ne pouvait être égalé, même de manière fictive. Il avait toujours eu ce don d'illuminer l'endroit, les personnes qui s'y trouvaient. Même si la personne pouvait être en tout point opposée à lui.
Il était capable de faire ressortir le meilleur chez les gens... Mais aussi le pire selon leur nature sans doute.

Je repensais à son harcèlement scolaire mais surtout à celui qu'il subissait encore aujourd'hui. La honte me grignota le coeur en songeant que la majorité des gens croyaient que j'étais homophobe. Je ne pouvais leur en vouloir : j'étais la figure référente d'un parti extrémiste.
La nuance : je ne me montrais pas comme le vrai Jordan mais comme le président de ce parti. Et cela était bien différent.

Je tournais lentement sur mon fauteuil, regardant bien trop souvent ma montre. Je pressentais que ce rendez-vous n'allait pas me plaire... Je priais juste pour que cela ne concernait pas Gabriel directement.

Nous nous étions revus depuis l'autre soir. Deux fois. Nous avions fait attention. Ça ne pouvait pas être sur ce secret...

Je fermai les yeux en reprenant au moment où j'avais conté mon cauchemar à Gabriel. J'ai perçu dans son regard une telle inquiétude face à mon désarroi que je sus à cet instant que je pouvais entièrement avoir confiance en lui. Confiance au point de me montrer vulnérable : mon coeur et mon âme à nu.

J'avais du mal : on m'avait toujours répété de refouler mes peurs, mon stress, mes faiblesses... J'avais appris à porter un masque lorsqu'il le fallait. J'avais une carapace et lentement Gabriel l'enlevait juste par la force de sa présence à mes côtés.

Je m'étais rendu compte ces derniers jours à quel point j'étais en esclavage d'un sourire, d'un regard de lui. Ses mots étaient comme une source d'eau fraîche pour mon coeur desséché. Ses yeux étaient deux fenêtres ouvertes sur un monde onirique. Et son sourire une invitation au vertige de la vie.

Il me manquait.

A chaque seconde.

Et je me demandais si ce n'était pas un crime d'être dépendant d'un autre humain à ce point-là...

Au point de vouloir respirer le même air que lui continuellement...

Le claquement sec de la porte me fit revenir sur terre.
Je me levai pour saluer Marine et nous allions nous installer sur la table ronde en face du bureau.
J'attendais qu'elle s'assit avant de le faire moi-même.

- Un café ? Lui proposai-je, affable.

- Oui s'il te plaît, je n'ai pas eu le temps d'en prendre ce matin, répondit-elle avec reconnaissance.

Je m'attelais à la tâche, le cerveau en ébullition.

Elle commença à me parler du fameux sujet de cet entretien après plusieurs minutes d'échanges de banalités.
Elle but une gorgée de son café et lança dun ton claironnant :

Parti pris pour l'amour - Bardella X AttalOù les histoires vivent. Découvrez maintenant