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PDV Jordan

Je m'étais laissé trop emporter. Je n'avais pas pu me contenir en voyant que le journaliste insistait trop sur la situation délicate du gouvernement : il brusquait Attal et je n'aimais pas ça. J'avais du mal à garder une certaine neutralité dans la situation. Désormais, je sentais que je me laissais trop porter par mes émotions. Je devais remédier à cela avant de dépasser le point de non-retour. C'est pourquoi juste après le débat je m'autorisai une dernière petite folie : celle d'attirer son attention.

Je savais que ce serait la dernière fois que je pourrais avoir un certain rapprochement avec lui. Je mettais ma raison de côté et l'interpellai. Il prit un peu plus de tant que la normale à me faire face. Ces prunelles décelaient une certaine fragilité teintée d'un demi-espoir. Je les sondai en quête de réponses à toutes mes interrogations, à la recherche de tous ces non-dits entre nous. J'avais conscience que je n'aurais jamais ce que je voulais et une lame de désespoir me traversa de toutes parts.

C'était la dernière fois que je m'autorisais à le dévisager. Ainsi, j'aurais voulu mémoriser chacun de ces traits : la manière dont une petite mèche retombait sur sa tempe. Cette façon qu'il avait de froncer les sourcils lorsqu'il était stressé ou en pleine réflexion... comment ses lèvres s'humidifiaient avec le bout de sa langue quand il voulait reprendre le contrôle... et puis tout ce qui faisait sa personne, tout ce qui me poussait à l'admirer, pour toute ces raisons que je souhaitais être important pour lui, je lâchai tout en sachant que ce serait la dernière fois où le masque serait tombé. Il devait me trouver bizarre mais ça m'importait peu.

Il s'apprêtait à partir et je sentis comme si une partie de moi se détachait à tout jamais.

- Au revoir Gabriel, murmurai-je tristement.

C'était la dernière fois : maintenant, je ne laisserai plus mes émotions me guider. J'avais des objectifs à atteindre. On comptait sur moi. Je ne pouvais indéfiniment me concentrer sur Attal. Et de toute façon, j'avais beau patienter, il ne se rappelait pas de moi ni de l'impact qu'il avait pu avoir à cette époque-là.
Je n'avais pas envie de lui dire la vérité. J'avais cet espoir égoïste qu'il le découvrit par lui-même. J'avais compris que ça n'arriverait pas. Ce qui s'est passé chez lui était une erreur, je savais que s'il s'en souvenait, il allait s'en mordre les doigts et que cette connexion que nous avions tous les deux n'existait que dans mon esprit.

J'avais trop d'estime pour lui ce qui m'induisait en erreur. Je m'étais fourvoyé dans toute cette masse de sensations, d'émotion contradictoires. Il était temps que je sorte la tête hors de l'eau et que je reste focalisé sur ce que je devais accomplir.

En rejoignant ma loge, j'ignorais la plainte accablante de mon cœur et me dépêchait d'enlever ma veste, ma cravate afin de déguerpir d'ici le plus vite possible.
Soudain, la porte de ma loge s'ouvrir à la volée et j'aperçu la dernière personne que je pensais voir débarquer.

J'avais les cheveux humides, mes cheveux étaient en pagaille et ma chemise était à moitié déboutonné. Pourtant, Gabriel Attal se tenait bien là, devant moi.
J'étais ahuri de constater qu'il était bien réel, qu'il avait décidé de me poursuivre et d'entrer dans ma loge.

-Monsieur Attal, je pense que vous vous êtes trompé de loge, dis-je, d'un ton faussement léger, afin de lui donner une porte de sortie.

Ses yeux baladeurs effleurèrent ma personne et trouvaient en définitive refuge dans les miens . Il avait l'air un peu perturbé de la manière dont je me trouvais, mais pourtant je sentis une certaine détermination chez lui qui me poussait dans mes retranchements. Je devais garder le contrôle et me montrer stoïque .
- C'était quoi cette scène, monsieur Bardella, me demandait-t-il, l'air sérieux.
- Je ne vois pas de quoi vous parlez, monsieur.
- Ne jouez pas au con avec moi, Jordan Bardella. J'ai senti une certaine détresse chez vous, et puis je sais que vous m'avez appelé par mon prénom ! C'est moi ou j'avais l'impression que c'était comme un adieu ? Expliquez-moi, je ne comprends pas....
Je balançais avec force ma cravate, puis lui tournai le dos avant de lui répondre froidement :
- Vous avez tort, Monsieur Attal. Je ne peux pas vous expliquer les véritables raisons de ma conduite. Mais sachez que ce n'est pas ce que vous pensez. Certes, je vous ai dit au revoir de manière très impolie. En vous appelant par votre prénom. J'ai manqué de courtoisie. Pardonnez-moi, cela ne se reproduira plus.
- Jordan Bardella... souffla-t-il, perdant de son assurance.
Je n'osais lui faire face. J'avais peur de me perdre dans ses yeux, et surtout dans le souvenir de notre étreinte...
- Je vous en prie, Monsieur Attal. Ne rendez pas les choses plus compliquées qu'elles ne le soient. Je suis navré de vous avoir importuné, pardon de me mêler de vos affaires lors de certains entretiens.... Et aussi je souhaiterais vous demander pardon par rapport au cadeau, au porte-clés, c'était déplacé de ma part, je m'en excuse...
Je le sentis avancer vers moi. J'étais cloué au sol. Je n'osais plus bouger. J'avais peur.

- Jordan Bardella, la moindre des choses est de me regarder lorsque vous vous adressez à moi, dit-il, d'une voix autoritaire.

Je soufflais bruyamment, car je savais que pour ne pas éveiller les soupçons, je devais agir comme il le disait. Alors je me tournais vers lui...Je ne laissais rien paraître, alors qu'au fond de moi, je me consumais.

- C'est moi j'ai l'impression que vous me cachez autre chose, Bardella. Déjà le porte-clés avec tous ses mystères... Puis j'ai l'impression qu'il y a autre chose que je n'arrive pas à mettre le doigt dessus. Et puis vous agissez comme si vous regrettiez ? Que regrettez-vous en vérité ?

- Je... commençais-je, le cœur battant à cent à l'heure.

- En plus, vous vous abonnez à moi sur Insta. Je n'arrive pas à comprendre certains de vos actions. Monsieur Bardella. Est-ce véritablement un jeu pour vous de me déstabiliser ? Je ne suis pas un jouet, Jordan Bardella., alors arrêtez de me faire croire que vous pourriez avoir de la considération personnelle pour moi. Arrêtez de me faire croire que vous preniez ma défense à certains moments. Ne me faites pas croire que je puisse avoir un impact dans votre vie alors qu'on ne se connaît pas. Ne me dites pas que mon opinion compte pour vous alors que vous vous en fichez. Car je sais que tout ce qui vous intéresse, c'est le pouvoir.

J'étais impacté par ses dires, mais je continuais à ne rien laisser paraître. Il avait cette image de moi ? Tant mieux. Il croyait que j'étais une personne hypocrite ?Soit... Il ne comprenait rien. C'était peut-être mieux ainsi...

- Vous avez fini, Monsieur Attal ? répliquai-je durement. J'ai bien entendu et assimiler vos paroles. Maintenant vous pouvez partir.

L'incompréhension laissa sa place a de la haine dans ses yeux, cela me fit mal, mais je me dérobais.

- Vous êtes méprisable, Bardella. Vous répondez aux questions que lorsque ça vous arrange comme d'habitude. Je vous souhaite une bonne continuation et... nous nous reverrons immanquablement.. Bonne journée.

Il patienta un moment, certainement en vue de ma réponse, mais mes yeux restaient figés sur le sol en attendant qu'il s'en aille.

Pitié qu'il s'en aille, je ne vais pas tenir longtemps... J'avais envie de lui dire qu'il me fascinait, qu'il avait beaucoup d'importance dans ma vie, alors que je ne le connaissais même pas. Il pensait que je souhaitais le déstabiliser, or il en avait lui-même le talent pour me déstabiliser moi.

- Au revoir Monsieur Attal, insistai-je brutalement.

Croisons les doigts pour qu'ils s'en aille aille cette fois-ci.

Il tourna les talons, me lança un dernier regard mystérieux puis claqua la porte derrière lui.

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Parti pris pour l'amour - Bardella X AttalOù les histoires vivent. Découvrez maintenant