Chapitre 9, Attal

62 4 0
                                    

Pas le temps de s'apitoyer, Gabriel avait seulement une vingtaine de jours de campagne pour son parti. Il devrait jongler entre les questions des médias sur la dissolution si inattendue et les questions sur le programme de Ensemble!. Macron n'avait vraiment aucune considération pour lui et celà le mettait en rogne, c'était à lui de ramasser les pots cassés de sa bêtise. Bien sûr il restait toujours son patron et jamais il ne lui aurait dit ça en face, bien qu'il ait failli lorsqu'il tenta de le convaincre de ne pas dissoudre. Il l'avait presque supplié, lui proposant même de démissionner de son poste de premier ministre à la place, mais le président était resté borné sur son idée en lui répondant qu'il devait rester et mener campagne. Gabriel avait peur de l'avenir du pays et c'est pour celà qu'il se mit immédiatement au travail. Il ne voulait pas laisser la France aux mains du RN, il ne pouvait physiquement pas supporter cette idée.

Il avait ce soir une interview chez l'émission Quotidien sur la dissolution. Il répondit sur la défensive par réflexe face aux questions insistantes des journalistes. Pourtant, l'émission était plutôt de son côté, il était au su de tous que Quotidien était un média entre le parti socialiste et le Macronisme. Mais les questions des chroniqueurs lui rappelait à chaque seconde à quel point il était impuissant dans cette situation.

L'équipe de campagne de Gabriel avait aussi accepté un deuxième débat avec Jordan Bardella, sur Touche Pas à Mon Poste. Si Quotidien était plutôt à Gauche, cette émission était complètement à l'opposé, à la limite de ne plus rentrer sur l'échiquier politique tant elle était à droite. Gabriel ne partageait pas leur vision des choses mais celà lui permettrait de toucher un public habituellement peu atteignable. Et il reverrait Jordan. Il n'aurait pas dû penser ainsi alors que les édits du ship "bardattal" circulaient de plus en plus sur tiktok mais la vérité était que c'était peut-être ça qui le poussa à accepter au fond. Dans l'une de ses récentes interview, Bardella revenait sur leur précédent affrontement sur France 2 et celà l'avait fait sourire. Il avait eu envie de discuter de nouveau avec lui.

Dès le soir de la confirmation que ce débat aurait lieu, il reçut un message sur instagram, le seul réseau social qu'il gérait lui-même de A à Z, qui attira son attention. En tant que Premier ministre, il recevait des centaines de messages par jour et ne répondait jamais ou presque. Cependant, ce message étant d'un compte certifié, il était mis en avant dans sa messagerie. C'était un message de Jordan Bardella.

<Alors comme ça un débat ne t'as pas suffit ?

Un sourire se forma sur les lèvres de Gabriel bien malgré lui. Il n'aurait probablement pas dû mais il lui répondit immédiatement. Après tout, sa messagerie n'était pas publique, il ne risquait rien à discuter avec lui par messages.

Plus que ça. Tu oublies ceux des législatives de 2022. Et tous les autres.>

Sa réponse fut immédiate.

<C'est vrai que je devrais peut-être les compter.

<Sinon ça va ? Je suppose que c'est pas une période facile pour toi...

Le cœur de Gabriel se serra. Voilà une question que peu de gens avaient pris le temps de lui poser pendant toute cette tempête.

Je t'avoue que je pourrais aller mieux.>

Au fait, félicitations pour ta réélection Dimanche.>

<Merci, mais c'est pas ce qui compte là tout de suite. Tu veux en parler ?

Oui, Gabriel voulait en parler. Il avait fait part de ses inquiétudes à sa famille qui avait une grande place dans sa vie mais il n'avait pas pu en parler à quelqu'un directement concerné. Il en avait furtivement discuté avec Stéphane Séjourné, mais celà n'avait pas suffit. La situation n'aurait pas pu être plus ironique, il faisait part de ses tourments à son adversaire direct, celui qui risquait grandement de le remplacer. Le plus étonnant était peut être finalement le fait que Jordan Bardella, l'homme le plus égocentrique et narcissique qu'il ait été donné à Gabriel l'opportunité de rencontrer, semblait vraiment s'inquiéter et prendre en considération ses émotions, il réussit même à lui arracher un sourire derrière son écran. Le ministre avait l'impression d'être tombé dans un monde parallèle dans lequel le rôle de ses alliés et de ses ennemis était inversé.

Tout est permis en politique (Bardella x Attal)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant