Tout est permis en politique (Bardella x Attal)

Chapitre 31, Attal

Gabriel n'avait même plus la force d'être énervé. C'était juste pitoyable. Cette fois il n'avait pas eu besoin que Jeremy l'informe de ce tiktok puisqu'il s'était invité dans sa "for you page" de lui même alors qu'il allait sur TikTok pour se détendre entre deux entraînements pour l'interview du lendemain sur France 2. Il était fatigué et cette vidéo venait de lui siphonner le peu d'énergie qui lui restait. Myriam, membre de l'équipe de communication qui jouait la journaliste lui posant des questions, lui proposa de reprendre l'entraînement et il hocha machinalement la tête, répondant aux questions qui lui seraient hypothétiquement posées par la vraie journaliste, en l'occurrence Caroline Roux. Mais ses réponses étaient de plus en plus confuses, il se perdait lui-même malgré toute sa volonté.

— Bon, Gabriel, t'es plus avec moi là.

— Je suis désolé...

— Je comprends que tu sois fatigué mais c'est la dernière ligne droite, prend sur toi.

Gabriel se frotta les yeux pour tenter de se réveiller un peu, de retrouver de l'énergie au fond de lui mais c'était de plus en plus difficile. Des talons se firent entendre dans le couloir et la porte s'ouvrit derrière lui. Il savait de qui il s'agissait sans avoir à se retourner.

— Livraison de cafés ! Je sais, je sais, je suis votre sauveuse toute puissante que vous adulez comme une déesse.

Myriam roula des yeux, leurs tempéraments n'étaient pas du tout en accord et elles s'entendaient comme chien et chat mais quand leurs forces étaient unies elles étaient inarrêtables.

— Si tu es venue semer la zizanie, tu peux repartir. Dit Myriam d'un ton amer.

— Mmh je pense que je vais donner les deux cafés à Gaby en fin de compte, tu ne mérites pas et il en a très clairement plus besoin que toi.

Gabriel lui sourit et lui lança un regard amusé lorsqu'elle déposa les deux gobelets devant lui en lui adressant un clin d'œil.

— En plus je l'avais fait exactement comme tu les aimes. Serré, un demi sucre, une touche de crème... Quel dommage que tu sois si peu méritante.

— Depuis quand crois-tu au mérite, Lisa ? lui demanda Myriam avec un sourire mesquin.

— Je crois au mérite, pas à la méritocratie. C'est une grande différence. Mais peut-être que ton esprit est trop étriqué pour le comprendre.

C'est sur ce genre de sujets que les opinions de Gabriel et Lisa divergeaient. Gabriel croyait fortement en cette idée selon laquelle on n'obtient que ce que l'on se donne les moyens d'obtenir. Son amie était plus nuancée, par exemple elle parlait souvent d'à quel point les plus riches le devaient souvent à un héritage et n'avaient par conséquent aucun mérite. Pourtant, elle était très loin de faire partie des plus démunis, mais c'était Lisa, elle ne changerait jamais et Gabriel ne voulait pour rien au monde qu'elle change. Myriam était encore une fois à l'opposée, Gabriel se demandait parfois si elle ne ferait pas mieux d'aller travailler chez Les Républicains plutôt qu'avec lui. Mais bon, les idées de la macronie et celles de la droite étaient particulièrement liées après tout, peut-être qu'elle était exactement là où elle devait être.

— Oui, toi c'est ton cerveau qui est trop étriqué.

— J'ai des pensées vulgaires qui me viennent en tête ma chère Myriam, je ne crois pas que tu veuilles les entendre.

— Je n'ai jamais souhaité entendre le son de ta voix.

Elles se fusillaient du regard alors que Gabriel les observait en sirotant son café fumant. Il avait toujours trouvé leurs disputes amusantes, surtout qu'elles savaient mettre celà de côté lorsque c'était nécessaire. C'était bon enfant.

— Ma douce voix ne te plaît pas ? J'en suis absolument bouleversée.

— C'est ça. Gabriel, dès que tu auras fini de siroter tes deux cafés qui je n'en doute pas sont succulents, on s'y remet.

— Oui m'dame. Dit-il, de bien meilleure humeur que quelques minutes auparavant.

Il en oublia le tiktok atroce de Jordan Bardella et put se concentrer, la caféine faisant doucement effet. A la fin de leur entraînement, Myriam le regardait d'un air approbateur qui le rendit fier malgré lui. Elle était son employée et pourtant il souhaitait sa validation. Ce n'était pas la même chose qu'avec Lisa, cette dernière était sa meilleure amie et malgré leurs divergences politiques elle le considérait comme le meilleur premier ministre de l'univers. Myriam était froide et raisonnée, elle ne se laissait jamais déstabiliser sauf par Lisa de temps à autre, il en fallait beaucoup pour qu'elle soit satisfaite. Si elle pensait qu'il était prêt, alors il l'était sans aucun doute, c'était la même chose pour chacun des débats précédents auxquels il avait participé ainsi que pour ses discours et ses interviews.
— Bon ! dit Lisa en frappant des mains, faisant sursauter ses deux comparses. Après l'effort, le réconfort.

— Oh non... Qu'est-ce que tu as en tête... ? soupira Myriam.

— Un mcdo, pardi !

Myriam, qui vivait et pensait comme une bourgeoise -ce qu'elle était sans doute bien que jamais elle n'aurait divulger ses revenus y compris sous la torture-, afficha une mine dégoûtée. Les fast foods étaient un peu un "truc" entre Gabriel et Lisa qui s'y retrouvaient souvent à l'époque où ils étaient encore étudiants. Celà faisait un moment que le premier ministre ne s'était pas offert un plaisir aussi simple que celui-ci et celà lui manquait. Il était épuisé et il était tard mais il se laissa tenter. Contre toute attente, Myriam accepta de les accompagner avec assez peu de résistance.

Un chauffeur les conduisit jusqu'au fast-food où ils firent tous les trois la queue afin de commander sur les bornes. Au vu du nombre de garde du corps présents à ses côtés, Gabriel était certain qu'il ne passerait pas inaperçu et que dès demain la presse en ferait toute une histoire. Il aurait pu jurer avoir vu quelques personnes le prendre en photo, mais il y était habitué alors celà ne le mettait qu'en partie mal à l'aise.