Coupable

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Olivia

Il n'y a vraiment que moi pour penser à mon jumeau alors que je suis assise sur les genoux de ma cible depuis de longues minutes. L'ambiance du club est étouffante, saturée par la fumée et les lumières vacillantes. La chaleur humaine semble absorber chaque vibration des basses qui font trembler les murs. C'est simple : si Gabin avait été là, je n'aurais jamais accepté de faire une chose pareille. Pourtant, il est loin d'être prude ou naïf, mais il aurait vu le risque que je suis en train de prendre, et il m'aurait dissuadée d'y aller.

Je commence à ressentir une pointe de regret, une sensation désagréable qui se glisse dans mon estomac. Ce n'est pas le moment de faiblir. Je suis ici pour une raison bien précise, et je ne peux pas me permettre de tout abandonner maintenant. Alors, pour ne pas céder à la panique qui monte doucement en moi, je m'accroche à ce qui m'a toujours poussée à avancer : Gabin. Lui, il aurait su comment garder son sang-froid, comment jouer ce rôle sans que le doute s'immisce.

« Quand tu flippes, fais semblant. Personne ne verra la différence. » C'est un bon conseil. Un très bon conseil, même. Sauf que là, j'ai l'impression que tout le monde voit clair dans mon jeu. Ce type sous moi, son regard perçant, sa main qui effleure ma taille. Il teste mes limites, essaie de percer mes défenses. Et moi, je dois rester calme, rester la fille que j'ai prétendu être depuis le début. Sexy, détachée, intouchable.

Je me penche un peu plus vers lui, un sourire faux plaqué sur mes lèvres. Mon cœur bat la chamade, mais je garde le contrôle. Marco dit toujours que la clé, c'est le contrôle. Si tu perds le contrôle, tu perds tout. Je me demande ce qu'il dirait s'il me voyait là, dans ce club sordide, à jouer les appâts pour un mec que je devrais déjà détester. Est-ce qu'il serait fier que je tiennes compte de ses leçons, ou est-ce qu'il serait furieux de me voir prendre un tel risque ?

- Ça va, beauté ?

Sa voix râpeuse me ramène à la réalité. C'est le genre de type qui aime jouer, qui se nourrit des faiblesses des autres. Je suis une proie facile à ses yeux, une fille de plus qui cherche des ennuis. Ce serait presque risible si je n'étais pas en plein milieu de cette mascarade.  Je lui fais un sourire qui – je l'espère – cache mes doutes. 

- Toujours.

Mon ton est léger, mais je sens mes muscles tendus sous la pression de cette situation absurde. Tout est calculé dans ce club : les regards, les gestes, même les silences. Chaque seconde compte, et chaque mot a un poids. Simon m'aurait dit que ce n'est qu'un jeu. Que je devrais profiter de cette position avantageuse pour obtenir ce que je suis venue chercher. Il aurait raison. Mais ce n'est pas si simple.

Je sens son souffle sur mon cou. Mon corps se raidit malgré moi. Et là, je comprends pourquoi Gabin aurait voulu m'empêcher de venir. Ce n'est pas juste à cause du danger évident, de cette mission qui frôle la folie. C'est parce que je me perds un peu plus à chaque instant passé ici.

Jouer la comédie, porter ce masque, c'est épuisant. Et à force de feindre, je commence à me demander qui je suis vraiment. Est-ce que cette version de moi – cette fille séduisante et sans scrupules – est si différente de la vraie Oli ? Ou est-ce que – quelque part – j'ai toujours été prête à me plonger dans cette obscurité ?

- Tu sais que t'es jolie, hein ?

Un compliment creux, comme tous les autres avant. Je lève les yeux vers lui, et pendant un instant, je me dis que mon jumeau aurait détesté ce type. Il n'aurait même pas pris la peine de jouer avec lui. Trop facile, trop prévisible. Mais moi, je n'ai pas ce luxe. Je suis ici pour une raison, et il ne me reste plus qu'à finir ce que j'ai commencé.