La haine ancestrale que les Sorcières éprouvaient envers les Hommes permettait à Nara d'accorder sans souci sa foi aux autres captives. Auléna lui confirma que Hution avait plusieurs fois tenté de gagner des espionnes parmi elles, mais aucune n'avait accepté, malgré le risque de représailles.
Auléna expliqua aussi à Nara que durant la nuit, des gardes se postaient dans le couloir afin de dissuader les potentielles fuyardes. Seules quelques favorites, en particulier Lucanos, jouissaient du privilège de pouvoir se déplacer en toute liberté à l'étage.
— Même si on pouvait utiliser la magie, il serait difficile d'imaginer sortir de là sans encombre, marmonna la belliciste. Ils sont armés de lances ou de sabres et nous n'avons rien...
Il régnait entre ces murs une ambiance très tendue, mais Nara commençait inconsciemment à ébaucher un plan. Les pensées s'embrouillaient dans sa tête, s'assemblaient en une joyeuse confusion avant de prendre une forme cohérente. Mais ses espoirs fous reposaient sur un seul élément au caractère très incertain : l'arrivée de Mezina et d'Arlam à Froidelune.
***
Quelques rayons de lune se frayaient un chemin par la fenêtre, permettant à Nara de contempler le plafond, silencieuse et pensive. Auléna s'était endormie une heure auparavant. Malgré son état d'extrême fatigue, l'élémentaliste ne parvenait pas à trouver le sommeil. Son angoisse se mêlait à ses projets de fuite, qu'elle espérait ne pas être vains. Elle ne pouvait s'empêcher de cogiter avec frénésie.
Le grincement des gonds de la porte la fit sursauter.
Elle se redressa, blême. Elle s'attendait à voir surgir le Seigneur humain, mais ce ne fut pas un Homme qui s'engouffra dans la chambre. Il s'agissait de Lucanos.
L'Odalisque tenait à la main un bocal rempli de lucioles, qui diffusaient une douce lueur orangée. Elle referma la porte avec discrétion et vint s'asseoir auprès de Nara, sur le matelas.
— Je t'écoute, déclara-t-elle sans autre forme de procès.
Surprise, Nara hésita une seconde. Après la réaction que l'arcaniste avait eue lors du repas, elle s'attendait à une attitude fuyante, au mieux. Et devant son caractère, elle redoutait même de l'hostilité. Mais Lucanos était calme, les mains posées sur ses jambes à la manière d'un enfant sage. Elle paraissait vouloir entendre ce que l'Aïckoise avait à lui dire. Comme si elle avait deviné que Nara commençait à échafauder un plan. Cette perspective s'avéra troublante au premier abord, mais après coup Nara comprit que Lucanos avait sans doute l'habitude de traiter avec les nouvelles venues, pleines d'illusions, qui rêvaient de s'enfuir à peine arrivées. Rohe avait beau faire figure d'aînée, son charisme n'égalait en aucun point celui de l'Odalisque. Nara avait elle-même été attirée par cette Sorcière masquée, comme un insecte par une lanterne.
— Tu as mentionné une belliciste et un illusionniste tout à l'heure, insista Lucanos. Alors maintenant parle, je t'écoute.
Nara allait amorcer ses explications quand Lucanos la coupa pour ajouter :
— Et ne fais plus jamais référence à ce que ce porc m'a fait subir pendant ces sept dernières années.
Nara avala sa salive, perturbée par le ton tranchant de sa voix. Ses cheveux se hérissèrent sur sa nuque : cette femme possédait un côté qui l'effrayait, sans qu'elle puisse le définir avec certitude. Avec prudence, elle raconta :
— J'étais en route pour Froidelune avec une amie belliciste quand le Chasseur m'a capturée et...
— Cette pourriture de Carsis, je parie, l'interrompit une nouvelle fois Lucanos.
VOUS LISEZ
L'Arbre de Feu - Livre 1 [V2]
FantasyNote importante : ceci n'est pas la version définitive du texte. Si vous souhaitez la consulter, c'est par ici : https://www.cafecobalt.fr/histoire/arbre-de-feu-1/ Sur le continent comme dans les îles, Hommes et Sorcières se vouent une haine milléna...