Présence d'un lemon dans ce chapitre.
Le lendemain matin, je le vois en train de faire des étirements, près du repère du km zéro.
Natsu.
Il passe son bras derrière sa tête et étire ses triceps, ce qui fait remonter son t-shirt, dévoilant des abdominaux puissants. Ses cheveux roses sont complètement en pagaille. Quand il me voit, un grand sourire s'étale sur son visage et, après la solitude que j'ai ressentie la nuit dernière, cela me fait plaisir. Très plaisir.
J'ajuste mon sac-gourde sur mon dos tout en m'approchant de lui.
- Combien de km vas-tu courir aujourd'hui ?
- Beaucoup, me répond-il. On vise les vingt km. Et Roméo, le gars à qui je donne le rythme, veut terminer la course en deux heures et demie.
- Bonne chance, alors. Je crois que je ne serais même pas capable de faire vingt km en vélo en aussi peu de temps. En voiture, par contre, ça devrait aller...
Nous éclatons tous les deux de rire, puis nous nous fixons en souriant. Je ne détourne pas le regard de ses beaux yeux verts.
- Quoi ? me demande-t-il avec un rictus amusé.
Je secoue la tête.
- Rien.
C'est alors que, sans me demander la permission, mon doigt s'avance et effleure lentement la longue cicatrice blanche qui orne son cou. Ensuite, il descend sur les mystérieux cercles tatoués sur son bras.
- C'est quoi, ça ?
- Des agroglyphes. Tu sais, les cercles mystérieux qu'on trouve parfois dans les champs ? J'ai vu ces motifs et j'ai décidé de me les faire tatouer. T'aime bien ?
Oh, j'aime vraiment beaucoup. Je lui réponds d'une voix sourde :
- Ouais.
Il regarde mes doigts sur sa peau, et sa pomme d'Adam monte, puis redescend. Ses yeux vert pâle se fixent ensuite sur mes lèvres, avant de glisser vers ma poitrine et, enfin, mes jambes. Je sens une sorte de faiblesse mêlée d'excitation se répandre dans mon corps, comme si j'avançais sur un tremplin surplombant une mer démontée.
Je cesse de le toucher et détourne les yeux.
- Eh bien, me lance-t-il en toussotant, je te souhaite une bonne course, aujourd'hui.
Il va rejoindre un gars plutôt jeune, se met à courir et, quelques secondes plus tard, disparaît.
Zelef donne ses instructions à l'équipe. Nous devons courir le plus possible, et prendre des pauses en marchant quand nous en avons besoin.
- Aucun de vous n'a encore assez d'endurance pour courir un dix km, explique Zelef au groupe. Mais je veux que vous vous habituiez aux longues distances, alors nous allons beaucoup marcher, aujourd'hui. Ne vous forcez pas à trop courir, OK ?
Je secoue les mains et les jambes, paniquée. Je n'ai jamais parcouru une aussi grande distance jusqu'à maintenant. Que va-t-il se passer si je m'effondre au bout de cinq km ? Zelef devra-t-il me traîner, je ne sais trop comment, jusqu'à l'arrivée ? Je préfère ne pas m'imaginer à quel point ce serait embarrassant.
Pour nous échauffer, Zelef nous demande de bouger " à la Ali ", c'est-à-dire que nous devons sautiller de façon ridicule en donnant des coups de poing comme le faisait Muhammad Ali. Ensuite, je me dirige en trottant vers le sentier. Et puis je me retrouve toute seule, face à mes dix km.
Mais qu'est-ce qui a bien pu me passer par la tête, de toucher le bras de Natsu ainsi ? Il doit me prendre pour mademoiselle Bizarroïde. Par contre, il a soigné mon ampoule-foetus et m'a donné un pansement de la petite sirène alors que nous n'étions que des étrangers.
Mais ne sommes-nous pas encore des étrangers ? D'accord, il m'a raccompagnée à ma voiture, et j'ai appris quelques anecdotes à son sujet, par exemple qu'il a vingt ans et que seuls ses grands-parents l'appellent par son prénom, mais je ne sais toujours rien de vraiment important. Va-t-il a l'université ? Je ne le vois jamais en compagnie d'amis, mais je me rappelle son t-shirt de la fraternité Delta Tau Kappa. Est-il un grand fêtard, ou seulement un accro à la course et à l'exercice physique ? Pourquoi m'a-t-il dit que Zelef lui donnait une nouvelle chance ? Une chance de faire quoi ?
Je bois une petite gorgée d'eau et me concentre sur mes pieds. Pointer les orteils vers l'avant. Bouger les bras d'avant en arrière. Inspirer par le nez, expirer par la bouche. Prier que courir me fasse oublier ma croisière des finissants. Je réussis à courir six km, mais, ensuite, je dois ralentir et me mets à marcher lourdement, en traînant les pieds. Je suis fière d'être arrivée jusque-là.
C'est à ce moment précis que Natsu et son client me croisent à vive allure. Je n'en reviens pas qu'ils aient bouclé plus de la moitié de leur course de vingt km. Bon sang qu'il est rapide !
Je me dis que c'est sûrement la dernière fois que je le voyait aujourd'hui, mais, au repère des deux derniers km, je l'aperçois en train de s'approcher de moi, avec un petit sourire malicieux, ses cheveux en piques fous flottant dans tous les sens. Je ressens de nouveau cette forte envie de plonger mes doigts dedans. Parvenu à mon niveau, il ralentit pour adopter la même allure que moi. Sa course de vingt km terminée, il a fait demi-tour pour me rejoindre ? Il doit être fou à lier. Je lui demande, hors d'haleine :
- Qu'est-ce que tu fais là ?
Il prend une grande gorgée d'eau en me regardant de côté.
- Je pensais à toi.
Je halète de plus belle. J'avais déjà du mal à respirer dans l'air humide du matin, mais, maintenant, je n'y arrive plus du tout.
Le souffle de Natsu, lui ralentit et devient régulier, parce que rien n'est plus simple que de suivre mon allure pour ce fichu Superman. Quand nous atteignons la passerelle en bois qui marque le dernier km et demi, Natsu me saisie doucement par le coude. Me guidant, il me fait sortir du sentier et m'entraîne plus bas, vers le ruisseau. Euh, je ne crois pas que je devrais quitter le parcours sans la permission de Zelef - et puis, je n'ai même pas terminé la course. Mais il est vrai que c'est agréable de faire une pause. De molles branches de saule nous abritent, nous apportant une ombre fort bienvenue. Partout explosent le rose, le jaune, le violet et le bleu des fleurs, comme dans un rêve psychédélique, ou dans le monde de Willy Wonka.
- C'est un vrai brasier, en plein soleil, commente Natsu.
Je m'essuie le front.
- Ce ruisseau est bien tentant.
- Allez, on saute !
Il me saisit par les bras et m'entraîne vers le cours d'eau. Je lui donne de petits coups sur la poitrine et rigole comme si j'avais dix ans.
- Nat, non ! Si je me mouille, je vais devoir repartir dans des vêtements trempés, et je vais finir la course tout irritée...
- Ce serait terrible.
- Et je n'aurais plus le choix, je devrai me servir de la vaseline de ton frère.
- Je vais faire comme si je n'avais rien entendu...
Mes mains cessent leur tambourinage et se mettent plutôt à explorer sa poitrine avec hésitation. Il est fort. Cela me manque, de poser ma tête sur un torse puissant. Les bouts de mes doigts décrivent de petits cercles. Ses yeux étincellent. Il saisit ma main, et nos doigts s'enlacent. Il se penche. Me vole un baiser.
Il recule légèrement et scrute mon visage. Je ne sais pas ce qu'il y cherche, mais, une fois le choc passé, je me surprends à me hisser sur la pointe des pieds pour l'embrasser à mon tour.
Mes bras et mes jambes me lâchent. Mes genoux faiblissent et il est obligé de me rattraper pour m'empêcher de tomber. Sa langue taquine la mienne. J'empoigne sa nuque et pose mon autre main sur sa joue.
Nos mains se promènent se promènent partout. Il fait glisser mon sac-gourde de mes épaules et détache son sac-banane, les laissant tous les deux tomber au sol. Au début, j'essaie de le repousser parce que je transpire des aisselles - bon sang, en fait je transpire de partout -, mais il ne me lâche pas, et je finis par ne plus me soucier de rien. La seule chose qui compte, ce sont ses mains sur ma mâchoire et ma hanche. Ses lèvres glissent vers mon oreilles, puis dans mon cou, avant de se jeter de nouveau avidement sur les miennes. Il mordille ma lèvre inférieure en tirant dessus jusqu'à ce que je gémisse.
Ces baisers sont trop excitant ! Sa bouche est insistante, puis douce, puis pleine de désir. Nous nous allongeons dans l'herbe, encore luisante de rosée. Sans cesser de m'embrasser, il presse son corps contre le mien et fait rouler ses hanches jusqu'à ce que je voie des étoiles. Il y a tellement, tellement longtemps que je ne me suis pas sentie si bien, le poids réconfortant d'un garçon reposant sur mon corps enflammé. Je laisse échapper un sanglot.
Luttant pour reprendre son souffle, Natsu se redresse pour se mettre à genoux entre mes jambes.
- Lucy, me dit-il avant de déglutir. Ça va?
- Ne t'arrête pas.
Je tends les mains vers sa taille et nous retirons nos vêtements de course pour les jeter en tas près de nous. Son corps est tonique, sculptural, et, quand je pose mon menton sur son épaule pour qu'il puisse m'embrasser dans le cou, je découvre qu'il a un autre tatouage sur son omoplate, un éclair noir superposé à un cercle noir.
Et puis je sens sa main plonger entre mes jambes. Je détends mon corps et il me donne ce dont j'avais tant besoin, sans même le savoir. Je laisse échapper un cri et il pose sa bouche contre la mienne pour me faire taire, m'embrassant jusqu'à ce que je sente complètement comblée. Pas une pensée ne m'encombre l'esprit, puis je le sens pousser contre moi.
- On a pas de préservatif! chuchoté-je.
Il ouvre les yeux d'un coup et se laisse rouler sur le côté. De biais, je le vois essuyer son visage plein de transpiration et serrer les paupières fortement. Merde, mais pourquoi j'ai fait ça? Je ne prends plus la pilule. Je ne connais pas ce gars. Il ne sait même pas mon nom de famille. Il n'est pas mon copain. Je ne suis pas amoureuse de lui. Ce n'est pas Sting.
Un autre sanglot, différent du dernier, gonfle dans ma gorge.
Je m'écarte de lui brusquement et remets mes vêtements à l'endroit, avant d'enfiler de nouveau, avec des gestes nerveux, ma culotte et mon short. Je démêle mon soutien-gorge de sport, passe vivement ma tête et mes bras dans les trous. Du plat de la main, je secoue violemment les brins d'herbe collés à mes genoux et à mes coudes.
- Lucy?
Je l'ignore.
- Désolé, je me suis laissé emporter, mais tu es si jolie, me dit-il en attrapant son t-shirt posé par terre, pour s'essuyer les mains dessus. Je ne fais jamais ça sans préservatif, d'habitude. Vraiment, je suis désolé.
Comme ça, ce genre de chose lui arrive souvent? De toute ma vie, je n'ai embrassé qu'un seul autre garçon que lui. Je tends la main vers mon débardeur.
Suivant mon exemple, il se rhabille rapidement, même s'il risque d'avoir besoin d'encore en peu de temps avant de pouvoir repartir, si vous voyez ce que je veux dire.
- Je t'en prie, ne raconte pas ce qui vient de se produire à mon frère, me demande-t-il en jetant un regard inquiet vers le sentier. Je ne peux pas tout gâcher une fois de plus.
- Je ne dirai rien, lancé-je d'un ton brusque, plus fâcher contre moi-même que contre lui.
Il semble décontenancé et avale avec difficulté, tout en se passant la main dans les cheveux.
Je l'abandonne derrière, me hâtant de retrouver le sentier et de reprendre mon allure de tortue. Évidemment, deux minutes plus tard, il me double avant de foncer entre les arbres, soulevant un nuage de poussière qui s'élève autour de moi et monte vers le soleil.
VOUS LISEZ
Respire, Lucy, respire.
FanfictionLucy déteste la course à pied. Et pourtant, la voilà qui se met à courir, plusieurs fois par semaine. Courir pour lui. Peu importe la distance parcourue, elle n'arrive pas à effacer la culpabilité qu'elle ressent... Ce jour-là, si Sting n'était pas...