Chapitre 3

4.5K 422 12
                                        

Distance parcourue aujourd'hui : six km
Encore six mois avant le Country Music Marathon

Je suis rendue à la moitié de mon parcours de six km quand monsieur le Prétentieux qui court à reculons me dépasse à la vitesse de l'éclair. Il court vers l'avant, cette fois.
- Allez ! crie le prétentieux à l'homme qui court sur ses talons. On avance, on avance !
L'homme semble à l'article de la mort, mais son bourreau est en grande forme. Je lui crie :
- Tu r'entraîne pour les Jeux olympique, aujourd'hui, ou quoi ?
Mais il ne ralentit pas. Il est dans une sorte de transe de super coureur, et il disparaît au loin.
La course d'aujourd'hui se passe mieux que celles de la semaine dernière. Je me sens moins fatiguée, mais mes pieds transpirent et glissent dans mes chaussettes, et je sais qu'une nouvelle ampoule est en train de se former. On inspire par le nez, on expire par la bouche. C'est inouï de se dire que les femmes les plus rapides du monde peuvent terminer un marathon en deux heures et vingt minutes. Je serais contente si j'en finissais un en cinq heures.
Zelef arrive près de moi en joggant, son sac à dos rebondissant sur ses épaules.
- Comment te sens-tu ?
- Bien.
- Continue de balancer les bras. Fais comme si tu étais une paire de ciseaux.
Je fends l'air de mes mains.
- Tu as tout compris. Tu as besoin de quoi que ce soit? De l'eau? Des sucrerie? De l'acétaminophène?
- Tu es une vraie pharmacie ambulante.
Il sourit en continuant de courir à mon rythme.
- Tu veux de la vaseline?
- Aaaaah! Arrête de me demander ça. Je n'ai pas de problème d'irritation.
Zelef se met à rire, puis un autre gars de notre équipe nous dépasse.
- Jellal! Je t'ai déjà dit de ne pas écouter ton iPod sur les pistes! C'est dangereux!... Comme s'il était capable de m'entendre.
Zelef part comme une flèche pour rattraper Jellal, me laissant derrière. Bon sang que Zelef court vite!
La première fois que je l'ai vu courir, c'était lors de l'entraînement de mercredi dernier. Jusque-là, j'ignorais que j'avais Usain Bolt pour entraîneur. Je parie que Zelef est encore plus rapide que monsieur le Prétentieux qui court à reculons. Qui court maintenant vers l'avant. Je secoue la tête, essayant d'oublier cet instant où il m'a dévisagée. Je dois avouer que j'y ai repensé quelques fois au cours de la semaine.
Ce n'est pas que je m'ennuie du sexe. Ce dont je m'ennuie, c'est Sting qui me coince une mèche de cheveux derrière l'oreille. Qui me gratte le dos quand cela me démange. Qui regarde avec moi les rediffusion de The Big Bang Theory et rit aux mêmes moments que moi.
Je me concentre sur le mouvement de mes bras, comme Zelef me l'a montré. Je pointe les orteils vers l'avant.
Respire, Lucy, respire.

Respire, Lucy, respire.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant