42 - Le monde des Vanes

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4 Mai 2052
Deux jours plus tard

Profitant de ce que tout le monde dormait – y compris et surtout Ilya – je me levais pour quitter l'appartement. Nous étions de retour à Argoat, et j'étais niveau 56 alors que j'aurai dû être dans la moyenne, c'est à dire 60. J'avais perdu tant de temps avec la forge des armes pour l'Élémentaire de Malka que vouloir rattraper le temps semblait peine perdue...

Revenir à l'environnement tranquille de Midgard après avoir passé quatre mois dans la neige, la glace, le froid et un peu de solitude, était une expérience étrange mais agréable. Cela me donnait le sentiment d'avoir été coupé du monde pendant un moment ; un moment seulement.

J'avais repris mes bonnes habitudes – lire l'Icarus tous les matins, passer du temps à la forge – mais aussi et surtout les mauvaises – sortir la nuit, par exemple.

Je gravis le grand escalier principal qui menait tout en haut de la cité pour prendre le portail et changer de monde. L'idée de croiser un Titan Écarlate à cette heure m'effleura l'esprit et retint mon geste un moment. Néanmoins, j'étais résolu à sortir, et ce n'était pas l'ombre cramoisie de ces assassins qui me retiendrait.

Mais c'est cette hésitation qui ouvrit une brèche pour la suite.

— Ou comptes-tu te rendre, comme ça ? demanda une voix dans mon dos que je ne connaissais que trop bien.

Je ne sursautais pas. Au moment où je l'entendis, je compris que je l'avais espérée.

Tandis que je cheminais à travers la ville jusqu'au portail, l'oreille tendue, aux aguets, c'était ses pas sur les pavés, son souffle près de moi, sa présence solide à mes côtés que j'avais guettée.

Ilya.

Je me retournais pour lui faire face, découvrant sans surprise son expression réprobatrice.

— A Jötunheim. Je ne suis pas encore assez fort pour affronter Vanaheim, avouais-je en toute franchise.

Elle mit ses poings sur ses hanches, en colère visiblement.

— Je croyais qu'on avait un accord, toi et moi ?

— Je ne voulais pas te déranger. Nous venons tout juste de rentrer ; tu as besoin de repos.

— Toi aussi, autant que moi.

Un point pour elle.

— Tu sais que je n'ai pas de temps à perdre, insistais-je néanmoins.

— Je le sais. C'est pour cela que je t'ai proposé mon aide. Tu pourrais au moins avoir la décence et la politesse de ne pas me snober comme si de rien n'était, je déteste ça !

Bon, elle était vraiment en colère. Ça me dépassait.

— Je ne comprends pas tes motivations, Ilya. Ne pas prendre de repos peut, à terme, être fatal. Tu n'as rien à y gagner.

Elle se radoucit à peine, mais son regard se troubla.

— Tu n'as jamais compris, de toute façon... Si je n'ai rien à y gagner en t'accompagnant ainsi, j'ai surtout beaucoup à perdre en ne le faisant pas.

Je haussais un sourcil interrogateur, refusant de comprendre ce que ma raison tentait de m'expliquer depuis longtemps.

Elle s'avança vers le portail comme si la conversation que nous venions d'avoir n'avait jamais eue lieu.

Skyline EmrysOù les histoires vivent. Découvrez maintenant