CHAPITRE 1 - Faire attention

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Mes vieux souvenirs enfumés nous propulsent, le docteur Wess et moi-même à Londres. Je me rappelle très bien de cette journée. C'était la rentrée de ma sixième année à Poudlard. Il devait faire douze mille degrés. En tout cas, c'est l'impression que ça me donnait. Il faisait beaucoup trop chaud pour un début de septembre. J'avais toujours associé le mois de septembre au début de l'automne, et donc, aux premières pluies, premiers vents, premières écharpes etc. De manière générale, le mois de septembre était synonyme de premières fois avec moi. Cette année là n'avait pas échappé à la règle.

_ Albus, pousse-toi !

Je poussais sans ménagement mon cousin sur le trottoir, pressée de traverser la route pour retrouver un semblant de fraîcheur à l'abri de la Gare King's Cross.

Ma mère me réprimanda « Rose ! » ; je l'ignorais. J'ignorais souvent ma mère : elle m'agaçait à toujours tout vouloir contrôler. C'était oppressant.

Tout se passa extrêmement vite. Je posais un pied sur la route pour traverser, pressée par la chaleur quand soudain une main impérieuse me bloqua le passage d'un geste vif, frappant mon plexus, me coupant le souffle dans une douleur sourde. Une voiture avait déboulé de nulle part et avait roulé à toute vitesse à l'endroit où je me tenais une seconde plus tôt, avant que Malefoy ne m'ait violemment repoussée sur le trottoir. Je venais littéralement de frôler la mort, si ce n'était bien pire. Je me tournais vers le propriétaire de la main, hébétée. Scorpius Malefoy me fixait, manifestement contrarié. L'air bourdonnait dans mes oreilles. Encore choquée, le fracas de mon cœur semblait inépuisable. Pourtant, personne d'autre ne semblait avoir remarqué la scène.

_ Fais attention, Weasley !, lâcha-t-il d'un ton autoritaire,presque méchant.

Il me dépassa en traversant rejoignant mon cousin, ne me laissant pas le temps de répondre. Et de toute façon, qu'aurais-je pu dire ?C'était la première fois que Scorpius Malefoy (qui était le meilleur ami d'Albus et qui venait donc de passer la fin de l'été avec nous) m'adressait la parole pour me dire autre chose que« passe-moi le sel ». Ce n'était pas quelqu'un qui discutait beaucoup. Et quand il parlait, c'était toujours pour dire quelque chose de captivant : il avait en plus une voix très calme, posée, comme s'il craignait de déranger les gens. J'avais toujours trouvé ça agaçant comme façon de s'exprimer, parce que,contrairement à moi, Malefoy ne semblait jamais avoir besoin de hurler pour qu'on l'écoute. Tout le monde buvait toujours ses paroles.

« Fais attention, Weasley ! ». Je n'avais jamais remarqué auparavant, à quel point il pouvait être intimidant. J'avais cru,alors qu'il m'engueulait, que ses yeux allaient avaler les miens. Puis il était parti, comme ça, aussi vite qu'il était intervenu. Je secouais la tête, pour chasser de mes pensées ce doux frisson qui m'avait tétanisée lorsque Scorpius Malefoy m'avait sermonnée,et emboîtait le pas de mon cousin et de son étrange meilleur ami.

On arriva finalement sur le quai 9/¾ après ce qui me sembla être une éternité, comme si la chaleur rendait tout plus lent. C'était la rentrée, nous rentrions tous d'un séjour prolongé chez mes grands-parents au Terrier et le Poudlard Express crachait ses longs panaches de fumée blanche, comme d'habitude. Ma mère me fit la morale sur mon inconscience et mon sale caractère. J'acquiesçais sans l'écouter, trop occupée à dévisager Scorpius Malefoy un peu plus loin. Il me fixait. Pourquoi me fixait-il ? J'avais du dentifrice sur le menton ou quoi ? Je décidais de le fixer jusqu'à ce qu'il cède et détourne le regard. Mais ma mère dut(enfin) réaliser que je ne l'écoutais pas, car elle se mit subitement à hurler dans mon oreille « ROSE ! ». Je sursautais et perdis le contact visuel, ce qui me renfrogna.

_Quoi ?, lâchais-je avec insolence.

_Tu es vraiment désagréable, quand tu t'y mets, commença-t-elle d'un ton qui se devait de ne pas souffrir la réplique.

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