CHAPITRE 14 : SUICIDE ET AGONIE.

89 31 12
                                    


Inkiff ne priva pas l'oiseau de ses envies obscures, une seconde de plus. Il ôta un petit crochet qui maintenait la cage hermétique, et libéra la chouette surexitée dans un ciel sombre et venté.

Après plusieurs mouvements d'ailes favorisant son élevation, l'oiseau plana enfin en tournoyant le stade, bien haut.

L'inspecteur ne réalisait même pas qu'il était désormais sur la pelouse, à l'angle du terrain, à force de suivre le hibou du regard. Sur le qui-vive, il se comportait comme un gamin qui attendait que des feux d'artifices éclatent dans le ciel.

La chouette rodait silencieusement et avec insistance au dessus des têtes, sans dépasser les limites du stade.

Rien ne semblait se produire au bout d'une dizaine de minutes. Personne ne s'évanouissait comme l'avait dit le facteur. Les milliers de supporteurs continuaient de parler et de rire dans l'attente de la deuxième mi-temps. L'inspecteur avala d'un coup une grande quantité de sa salive d'un air accablé, et pointa un regard rempli de sceptisme et de questions à Inkiff, la pomme d'Adam volumineuse.
Inkiff gardait un air serein en scrutant les gradins.

On aurait dit que l'inspecteur avait totalement oublié l'intention machiavélique de cet oiseau dans le ciel. Il voulait juste que quelque chose se passe.

Il commençait à donner raison à son incrédulité vis à vis de cet oiseau, lorsqu'il aperçut d'abord au loin, une jeune femme s'évanouir dans les bras de quelqu'un qui n'était pas morphée. Un jeune homme vigilent la rattrapa vélocement. Mais cette scène était lointaine alors, il pouvait s'agir d'une impréssion.

Dynn Marshalls ouvrit grand ses yeux, et confirma qu'un jeune homme perdait connaissance un peu plus près de l'endroit d'où il observait. Et la foule des supporteurs confirma elle aussi, que quelque chose d'étrange se produisait, car elle fut bientôt et désormais le lieu d'une effervescence négative.

Stupéfait, Dynn observa plusieurs autres jeunes personnes s'adonner involontairement à une soudaine inconscience dans les gradins.

Personne ne soupçonnait cette chouette dans le ciel, qui gardait le même schéma circulaire.

L'humeur de la foule changea alors drastiquement d'un moment à l'autre.
Les gens criaient et d'autres se mettaient simplement à courir par pure réflexe, sans connaître vraiment les causes du vacarme.

Les joueurs et l'arbitre du match qui avaient pourtant regagnés les coulisses du stade firent machine arrière, et jetèrent des regards frénétiques un peu partout pour comprendre le pourquoi des choses.

Inkiff observait le remue-ménage tel un spectacteur dans une salle de cinéma qui ne savait que faire d'un scénario aussi désolant. Son air navré était à son comble. Sa main gauche à la bouche et celle de droite sur sa hanche du même côté, il regardait.

La bouche de l'inspecteur formait un parfait " O " en signe de son sincère ébahissement. Maintenant qu'il avait obtenu l'objet de sa curiosité, tout ce désastre, il le trouvait désolant.

Lorsque la sélèction des neuf jeunes gens restant pour le sacrifice fut parfaite, Inkiff enjamba la pelouse du stade et joignit ses indexs à ses lèvres. Il sifla puissament et revint à sa position initiale en fixant le ciel dont l'oiseau était roi. La chouette, sous le regard bien attentif de l'inspecteur, s'éleva alors pour la première fois plus haut dans le ciel comme un avion de chasse, et éffectua une descente rapide et inexorable vers le sol. L'oiseau s'écrasa alors  catastrophiquement au centre du terrain de rugby.

L'inspecteur fit une grimace d'horreur et lança un regard horrifié à Inkiff. De manière surprenante, ce suicide arracha aussi une grave expréssion de surprise à ce dernier également.

Se suicider n'avait visiblement pas été le commandement d’Inkiff à l’oiseau. Mais il était habitué aux choses étranges, alors il ne fit aucune éternelle fixette sur cet incident.

Et comme si cela ne suffisait pas...Ce fut en une fraction de seconde. Dynn Marshalls ne s'était pas préparé pour la scène que le facteur, Inkiff, lui joua par la suite.

Ce dernier chemina alors tranquillement vers un robinet qui se trouvait à proximité, et se mit à boire beaucoup d’eau.
Puis, on aurait dit qu'il venait de mettre un doigt dans une prise de courant, car son corps fut saisit d'un tremblement extrème et violent. Agonisant et vomissant partiellement cette eau qu'il venait de consommer, le jeune homme tomba brutalement sur le sol.

L'inspecteur grimaça en songeant à la douleur que cette chute devait avoir engendré. Outré, bouche bée, il regardait le facteur aller jusqu'a faire disparaitre les pupilles de ses yeux pour ajouter conviction à son agonie mensongère. 

Tout ce cinéma, pour convaincre les ambulanciers (qui se dépêchaient partout sur les lieux pour s'occuper des jeunes gens qui avaient perdus connaissance,) de le compter parmi les vulnérables.
L'inspecteur recula silencieusement de quelques mètres lorsque les secours posèrent urgemment le comédien Inkiff Relios sur un brancard, et l'emmenèrent dans une voiture ambulancière de toute urgence.

L'air d'avoir été violemment insulté, le rythme cardiaque accéléré, l'inspecteur resta là, statique. Observant le stade se vider considérablement. Il était le seul qui ne cherchait pas à quitter cette université imayaise des arts illico presto.

Pourtant trente minutes plus tard, il regagnerait son véhicule, quitterait l'université, et devrait mettre toute cette histoire singulière derrière lui désormais. Car son implication dans cette affaire était arrivée à son terme. 

Mais l'inspecteur Dynn Marshalls, allait-il résister à l'envie d'en savoir plus? D'autant plus qu'il lui restait toujours un petit souvenir de la maison du talent: Sa tablette. Cet objet n’était pas seulement doté d’un GPS.






La Maison du Talent ( Appauvrir le Monde, Enrichir les Tombes)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant