∞13∞

2.2K 120 292
                                    

- Je te raccompagne, c'est même pas négociable, wech !

Ok, j'ai bu plus que de raisons. Ok, je fais pas deux pas sans menacer de me péter la gueule. Ok, y a pas encore de métro à cette heure-ci, et j'ai 4 bornes à pied à faire. On peut partir sur le double, vu ma démarche.

- J'veux pas t'emmerder, Ken...

- Dis pas nimp' ça fait plaisir de le faire.

- On va voir si tu tiens le même discours dans deux minutes.

Il me fait signe de m'y mettre, avant de changer d'avis et me laisser me débrouiller. Alors je me mets en marche, en évitant une bouche d'égout qui veut me gober toute crue.

- Putain, mais il t'a mis quoi dans ton verre, le Sneaz ?

- Je vois absolument pas pourquoi tu dis ça, je boude en croisant les bras sur la poitrine.

Il lève les yeux au ciel, agacé par mon côté collégienne bourrée, qui titube outrageusement avec juste deux shots de Soho dans le caisson.

- T'as passé une bonne soirée, je demande à Ken.

- Oui, pourquoi ?

- Non, j'ai eu l'impression que tu tirais la gueule.

- Trop ap', détrompe-toi, la soirée était... parfaite...

Je cherche pas plus loin. Il m'a donné l'impression de s'être un peu fait chier. Alors que moi, je me suis grave amusée. Grâce à ses narvalos de potes ! Celui qui m'a fait le plus délirer, c'est Mekra. Sous ses faux airs de durs à cuire à matter les gens avec ses yeux noirs plissés, se cache un mec super drôle. Il a pas toujours la vanne très fine, mais j'ai ri aux éclats en l'écoutant déblatérer âneries sur âneries. Et j'en suis venue à oublier beaucoup de choses pendant tout ce temps.

Et plus d'une fois, j'ai remarqué que les rares fois où Ken n'était pas collé à moi, il était le plus souvent occupé à m'observer. La première fois j'ai cru que j'avais de la crème fouettée plein la gueule, ou un truc du genre. Mais après un rapide « visual checking » aux toilettes, j'ai compris que c'est juste moi qu'il devait regarder. Flippant, le type un peu.

Un vrai psychopathe, on y revient. Et il a tenu absolument à me ramener jusque chez moi.

Et si...

Non, je déconne.

Je suis bourrée moi, en effet, et j'arrête pas non plus de raconter des conneries.

Juju ! Concentration et silence absolu.

---

- Pff, j'y croyais plus, je râle en arrivant dans ma rue.

- Moi non plus je dois t'avouer. Je te préviens de suite, la prochaine soirée où tu sais que tu rentres à pied, je te mettrais au Coca, d'office.

- Rabat Joie, le Samaras, dis-donc.

- Jeune fille impertinente, il réplique en me rattrapant in extremis avant de me prendre en pleine gueule le réverbère devant mon entrée.

- Que de la gueule, je continue. Franchement, je m'attendais à mieux venant de toi !

- Mais oui c'est ça...

- C'est tout ce que t'as dans le bide ?

Je vais pour l'enchainer, parce que je suis lancée, et que je vais pas le laisser s'en tirer comme ça, avec une remarque aussi moisie qu'un « c'est ça » sans âme, mais il en décide autrement.

RenaissanceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant