Inégalité hommes-femmes. À l'école comme chez les adultes

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Dans les établissements scolaires coréens s'exprime de plus en plus ouvertement, chez les élèves, une misogynie dont les enseignantes sont les premières victimes.

En juillet 2017 est apparue sur Internet l'interview d'une institutrice de Wirye, dans la province du Gyeonggi [nord-ouest de la Corée du Sud], portant sur son enseignement dans le domaine de l'égalité des sexes. Une polémique s'est alors engagée sur le web entre des hommes et des femmes qui s'attaquaient mutuellement, et qui ont bombardé de messages les sites du gouvernement. Sur les réseaux sociaux, certains réclamaient l'enseignement de l'égalité des genres tandis que d'autres dénonçaient une éducation idéologique.

La misogynie répandue dans toute la société sud-coréenne touche aussi les adolescents, les élèves. Elle s'exprime de façon violente, en particulier via Internet. La "culture voyou" a toujours existé, mais la situation devient préoccupante quand une majorité y contribue. Les enseignants ont tendance à privilégier la répression au détriment de l'éducation. Certains d'entre eux ont tenté d'intercepter ces manifestations de misogynie que les élèves considèrent comme des jeux, provoquant de très vives réactions. D'où le débat sur la nécessité d'enseigner l'égalité des sexes.

Que se passe-t-il exactement dans les salles de classe ?

"Sensei, ah kimochi !" lance un collégien à l'enseignante qui parle devant sa classe en fin de journée, suscitant un éclat de rire général. Elle demande ce que cela signifie, on lui répond que cela veut dire : "Madame, vous êtes bonne !". (en quelque sort)


Les Coréennes subissent de plein fouet le sexisme d'une jeune génération frustrée. Pour défendre leur cause et prôner leur égalité, un nouveau féminisme émerge. Mais les faits de violence perdurent voire s'aggravent.

Cigarette au bec, regard porté au loin tel un séducteur-prédateur nonchalamment accoudé au capot d'une voiture de laquelle dépassent deux jolies jambes ligotées... Et en sous-titre : "A real bad guy". Cette photo de l'acteur Kim Byeong-ok (Old Boy...) en Une du magazine coréen Maxim peut paraître un peu ringarde, si ce n'est terriblement cliché. Mais en Corée du Sud, elle a réveillé la guerre des sexes qui agite actuellement le pays, raconte Quartz.

 Mais en Corée du Sud, elle a réveillé la guerre des sexes qui agite actuellement le pays, raconte Quartz

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Megalian.com a largement relayé l'image sur les réseaux forçant le groupe Maxim à s'excuser auprès de ses lecteurs et lectrices. C'est pour dénoncer ce type de comportements misogynes que le site féministe a vu le jour en juin 2015. À l'époque, deux Coréennes à HongKong après être entrées en contact avec un homme contaminé par le coronavirus du syndrome respiratoire du Moyen-Orient avaient été fortement insultées sur certains forums très populaires. Des activistes avaient alors tenu à répondre aux remarques misogynes. En signe de , le groupe anti-misogyne a d'ailleurs choisi un logo très provocateur... Il s'agit d'une main signifiant la petitesse de la taille des sexes masculins.


Compétition et frustration

Depuis une vingtaine d'années, les femmes sont aussi qualifiées et diplômées ques les hommes. Désireuses de ne pas rester à la maison comme le faisait leur mère, elles arrivent sur le marché du travail, prêtes à répondre aux meilleures offres d'emploi. Pour les jeunes coréens, c'est un affront. Ceux-ci les voient comme de redoutables compétitrices qui prennent leurs postes et risquent de mettre mal leurs rêves de réussite. 

Surtout qu'avec un taux de chômage chez les jeunes qui avoisine les 10%, l'économie nationale a perdu de son allant. On assiste à l'essor de nombreux postes précaires que personne ne veut tandis que les emplois les plus prestigieux se font de plus en plus rares.

Et les stéréotypes ont la dent dure. Les Coréennes font l'objet de nombreuses insultes sexistes et dégradantes. Le magazine Quartz a repéré celles de "Kimchi bitch" pour désigner les jeunes femmes uniquement intéressées par le compte bancaire de leur conjoint, ou encore les "doenjan girl" et "bean paste girl", qui visent celles qui font passer l'achat de produits de luxe avant celui des produits de base essentiels. 


Une femme est tuée par son conjoint tous les trois jours

En Corée où la criminalité est pourtant parmi les plus faibles au monde, le nombre d'agressions sexuelles a même sensiblement augmenté ces dernières années. Une étude de l'Institut de Développement des Coréennes précise d'ailleurs que les femmes sont davantage victimes d'homicides que les hommes. Selon Song Ran-hee, secrétaire générale de Korea Women's Hotline, une association consacrée à l'aide des femmes dans le besoin, une femme est tuée tous les trois jours par son conjoint ou ex-compagnon en Corée.

 Selon Song Ran-hee, secrétaire générale de Korea Women's Hotline, une association consacrée à l'aide des femmes dans le besoin, une femme est tuée tous les trois jours par son conjoint ou ex-compagnon en Corée

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Pour beaucoup de Coréennes qui craignent les représailles de leur conjoint, le simple fait de rompre est une source de peur et de danger

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Pour beaucoup de Coréennes qui craignent les représailles de leur conjoint, le simple fait de rompre est une source de peur et de danger. Insultes, harcèlement, diffusion des photos et vidéos intimes, la revanche pornographique est devenue une menace contre laquelle elles doivent se battre, raconte encore Quartz.

Pour preuve, un article du magazine coréen Chosen Weekly a même été intitulé «Cinq choses que je dois dire à ma fille pour rompre en sécurité». Parmi les conseils que peuvent y trouver les jeunes femmes : "ne pas faire ses adieux dans un endroit privé" ou encore "menacer d'appeler la police s'il vous traque". Preuve que la violence faite aux femmes n'est pas simplement qu'une mauvaise image.


Source : Courrier International & Slate

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