Chapitre 46

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Ils retrouvèrent Beniamino vers les grilles d'entrée du quartier général de la Famille du Nord. Ce dernier arqua un sourcil quand il aperçut Carmen.

- T'es de la partie ? Demanda-t-il avec le sourire.

- Faut croire. Marmonna-t-elle.

Elle n'était pas vraiment convaincue d'être la personne la plus qualifiée pour participer à cette mission de sauvetage.

Beniamino dû remarquer son air mal assuré car son sourire se fit plus charmeur et son ton plus bravache :

- T'inquiète, je serais là pour veiller sur toi !

Elle le toisa avec un sourire sarcastique :

- Laisse tomber ce genre de phrases, aucune ne fonctionne sur moi.

- Je ne m'avoue pas vaincu. Répliqua-t-il en haussant les épaules.

Emilio secoua la tête, exaspéré, et franchit les grilles sans un regard derrière lui. Carmen et Beniamino se lancèrent un regard éloquent et se précipitèrent à sa suite.

Ils descendirent en ville en suivant les ruelles sinueuses et pavées. Carmen avait pris la tête du groupe. Le pas souple et silencieux, elle menait la marche et s'immobilisait à chaque croisement pour vérifier que la rue était libre. Elle jetait un coup d'œil prudent par-derrière les murs des maisons puis faisait un signe aux deux autres quand elle s'assurait que la voie était libre.

Les trois compagnons arrivèrent ainsi près de la place de la fontaine, au croisement du territoire de la Famille du Nord et Celle du Sud. Il régnait en ces lieux un silence pesant. Carmen regardait de tous côtés, les sens en alerte, un curieux sentiment de malaise au creux du ventre.

- C'est calme. Chuchota Beniamino en levant la tête vers les toits délabrés des maisons alentours.

- Trop calme. Répliqua Emilio.

- Ça sent le coup fourré. Grogna Carmen en avançant prudemment.

Ils s'approchèrent lentement de la place de la fontaine, en rasant les murs, leurs pas ne résonnant qu'à peine sur les pavés.

- Il y a quelque chose là-bas. Dit soudain Emilio en s'immobilisant.

- Où ça ? Demanda Carmen en plissant les yeux dans l'obscurité.

- J'ai vu. Approuva Beniamino. Vers la fontaine.

Emilio dégaina sa mitraillette qu'il portait sur son épaule et passa devant Carmen pour prendre la tête du groupe, le visage tendu. Les deux autres le suivirent prudemment.

Ils débouchèrent sur la place et se figèrent.

- Merde. Jura Emilio, les yeux rivés vers la fontaine.

- Bordel ! S'exclama Carmen en mettant la main devant la bouche.

Ils avaient retrouvés Livio, Antoine et Bryan.

Ou plutôt, ce qu'il restait d'eux.

Les trois éclaireurs n'avaient eu aucune chance face à leurs adversaires. Ces derniers avaient abandonnés leurs corps dans une mise en scène macabre et sanglante.

L'un d'eux avait été pendu au sommet du pylône de la fontaine à l'aide d'un fil barbelé qui avait laissé de larges sillons sanglants autour de son cou et sur son torse, traçant un chemin le long des bras et des jambes pour goutter avec un bruit lent et régulier qui résonnait sur toute la place frappée d'horreur.

Dans l'eau stagnante du bassin rempli par les pluies diluviennes de ces derniers jours, un deuxième corps flottait, le dos tourné vers le ciel. Ses bras étaient couverts d'ecchymoses et d'écorchures, comme si le jeune homme s'avait tenté en vain de se débattre tandis que ses bourreaux le noyaient.

CarmenOù les histoires vivent. Découvrez maintenant