Carmen

Chapitre 60

Laurent se détourna d'elle et poussa un juron dans un cri de rage qui se répercuta contre les murs de la cellule. Il envoya un coup de pied dans la chaise qui se brisa contre la porte métallique dans un bruit sourd. Son accès de colère était si violente et si soudaine que plus personne n'osa esquisser un geste. Même Samaël et Adonis demeurèrent immobile, l'œil inquiet et les sens aux aguets, comme s'ils craignaient que leur Chef de Famille ne les attaquent.

Laurent pris une grande inspiration pour se forcer au calme et se tourna à nouveau vers Carmen. Il ne semblait voir qu'elle. Et la jeune fille n'avait jamais vu autant de haine dans son regard.

- Nathaniel n'avait pas le droit de te le dire ! Gronda-t-il férocement. Mais il est inexact d'affirmer que c'est moi qui ai tué ces personnes. Ajouta-t-il en jetant un coup d'œil aux mercenaires.

Ces derniers se détendirent et un sourire passa sur leurs lèvres, comme s'ils se remémoraient le plus beau jour de leur vie.

- Ce jour-là, nous nous sommes vraiment bien amusés. Commenta Adonis. Heureusement que nous en avons profité un peu, les distractions de ce genre se sont faites rares depuis !

Laurent le fusilla du regard et il se tut, sans pour autant se défaire de son sourire.

- Aël était un faible. Assena-t-il d'une voix sourde. Et Santana n'était pas mieux que lui. Je les ai entendus se disputer en haut des falaises, cette nuit-là. Le ton est monté, Santana a giflé Aël, il lui en a retourné une et Santana a trébuché. Elle a disparu dans le vide et Aël a paniqué quand il s'était rendu compte de ce qu'il avait fait. Et plus encore lorsqu'il a compris que j'avais tout vu. Il m'a cédé la place de Chef de Famille sans trop se faire prier et je me suis débarrassé des autres membres grâce à Samaël et Adonis.

- Je suppose qu'il ne t'a pas été trop difficile de les convaincre de te rendre service ? Répliqua Carmen. A moins que tu ne leur a fait du chantage, à eux aussi ?

Les deux mercenaires ricanèrent et même Laurent sourit :

- De quoi aurais-je put les menacer ? Déjà à cette époque, ils aimaient torturer et faire couler le sang. Ils n'ont pas mis longtemps avant d'accepter ma proposition de participer au massacre d'une vingtaine de personnes. Ils s'en sont même donnés à cœur joie. Et s'ils me sont restés fidèles durant toutes ces années, c'est parce que je leur donnais tout ce dont ils avaient besoin pour leurs jeux tordus. Dont vous, les membres de ma propre Famille. A la moindre erreur de votre part, il me suffisait d'envoyer mes mercenaires pour vous rappeler que je ne tolérais aucune erreur. Non, vraiment, il m'était très facile de m'assurer la loyauté de types comme Samaël et Adonis.

- A ton service ! Lança ce dernier avec un sourire narquois.

Samaël approuva ses paroles d'un simple signe de tête.

- Et depuis ce jour, je suis resté aux commandes de la Famille du Sud. Poursuivit Laurent. Non sans mal, non sans dommages collatéraux. Mais j'ai fait ce que j'avais à faire. Je n'ai pas à me justifier. Pas envers toi, Carmen. « Surtout » pas envers toi. Tu n'avais pas à savoir ce que j'avais fait pour en arriver là. Tu n'aurais jamais dû découvrir cette partie de mon passé.

Il poussa un long soupir, ennuyé.

- C'est vraiment dommage d'en arriver là. Je t'aimais bien, Carmen. Sincèrement. Je t'ai vu grandir et t'épanouir au sein de ma Famille. Tu as été celle en qui je nourrissais le plus d'espoirs. Tu avais ton utilité. Ton don pour décrypter des codes et des combinaisons était formidable. Tu étais formidable, Carmen. Tu serais allée loin. Tu aurais permis à notre Famille de se hisser au-dessus des Autres. C'est bien dommage que Nathaniel t'ai raconté cette histoire. A présent, je ne peux plus te faire confiance. Tu es devenue mon ennemie. Et il est hors de question que je te laisse repartir et prendre le risque que tu racontes ce que tu sais à des membres de la Famille du Sud. La Famille est tout, l'individu n'est rien. Et je préfère te perdre plutôt que de risquer ma place de Chef de Famille.