Pour l'Amour et la Haine - Affronter sa Destinée

Chapitre 1 : Un cri dans la nuit

Le 18 octobre de l'an 3018 du Troisième Âge, quelque part près des Montagnes de Brume.

Depuis plusieurs semaines déjà, Eilianiel voyageait en direction de Fondcombe, en compagnie de la douce Itarillë. Leur progression, quoique lente, était continue, et elles longeaient une forêt clairsemée afin d'éviter les sombres profondeurs d'un lieu dont la noirceur paraissait presque palpable. Tout autour d'elle, les oiseaux qui, jusqu'alors, avaient chanté gaiement, s'étaient tus. Une étrange et pesante atmosphère s'était abattue sur la forêt, comme une force invisible, oppressante, qui semblait planer au-dessus d'elle, provoquant un mal de tête lancinant. Toutefois, en faisant abstraction de cette sensation inquiétante, le silence de la nuit régnait, lourd et immuable.

Soudain, un craquement de branche se fit entendre sur sa gauche, suivi du croassement rauque d'une corneille s'envolant brusquement. Le cœur d'Eilianiel se serra en même temps qu'elle sentit sa jument se tendre et piaffer, nerveuse. Se calmant elle-même, elle murmura quelques paroles rassurantes en elfique à sa monture, mais un gémissement plaintif, à peine perceptible dans la nuit, atteignit ses oreilles. Ce son étrange semblait provenir d'une distance d'à peine une demi-lieue. Sans attendre davantage, Eilianiel talonna sa jument et l'incita à pénétrer dans l'obscurité oppressante de la forêt.

Au bout de quelques minutes de galop, elle arriva devant une scène étrange : trois trolls, figés dans la pierre, témoins muets d'une aube qui les avait sans doute surpris. Mais une nouvelle plainte, cette fois plus angoissante encore, retentit dans l'air glacé, résonnant jusqu'au plus profond de son être. Un frisson parcourut son corps, et elle comprit que sa monture refusait d'avancer davantage. Prenant une décision rapide, elle mit pied à terre, rabattit son capuchon sur son visage pour mieux dissimuler ses traits et s'avança prudemment. Là, à quelques pas, elle distingua un groupe de semi-hommes réunis autour de l'un des leurs, dont le visage était déformé par la douleur. Elle comprit vite qu'il s'agissait de celui qui avaient laissé s'échapper les plaintes qui l'avaient attirée en ces lieux inhospitaliers. Durant une fraction de seconde, elle hésita à faire demi-tour, mais un éclat doré dans la poche du semi-homme capta son attention. Était-ce l'objet de sa quête ? Ce petit être détenait-il réellement ce qu'elle cherchait ? Si tel était le cas, il lui suffirait de tendre la main et de s'éclipser en silence ...

Avant qu'elle n'ait le temps de réagir, un Hobbit blond, au visage poupin et aux yeux d'un bleu perçant, brandit une épée et la menaça. Sa voix, stridente et nerveuse, brisa le silence.

"Que faites-vous ici ?" s'écria-t-il, visiblement méfiant.

Eilianiel, malgré l'agacement que cette intervention lui causa, maîtrisa son instinct. En une fraction de seconde, elle aurait pu dégainer et éliminer cet impertinent Hobbit. Cependant, les deux autres avaient également tiré leurs armes, et ne connaissant guère leurs capacités de combat, elle jugea plus prudent de rester calme. Surtout qu'ils semblaient être des protecteurs du porteur, ce qui laissait entendre qu'ils n'étaient pas de simples Hobbits ordinaires.

Avec une maîtrise soigneusement calculée, elle fouilla dans sa besace et en sortit une petite fiole contenant un onguent à base de feuille des rois, une herbe médicinale rare. Sans un mot, elle déchira le tissu autour de la plaie du semi-homme, dévoilant une blessure affreuse, gonflée et noire, les veines ressortant comme des lignes d'encre sous la peau. L'horreur de cette vue faillit la faire vaciller, mais elle se força à garder son calme. Reculant légèrement la tête pour que ses traits restent dans l'ombre de son capuchon, elle répondit d'une voix posée :

"Cette fiole contient de la feuille des rois. Elle peut ralentir le poison qui ronge son corps ... Si toutefois il n'est pas trop tard."

Le Hobbit blond, désemparé, baissa légèrement son arme en regardant son compagnon mourant. Désespéré, il murmura d'une voix presque brisée :