Je suis mécaniquement vivant, puisque mes doigts bougent et que mes yeux clignent. Mais je suis rempli de vide. Comme si j'avais bu la tasse, qu'elle s'était fracassée dans ma gorge et tordait tous les points sensibles de mon corps en épargnant les organes vitaux, histoire que je reste là. Je vois bien les arbres plantés en rang à l'entrée du parking, secoués par le vent avec leurs ombres tordues, mais je n'entends rien. J'ai la sentation de rapetisser et de grandir en même temps. De ne plus tenir dans mon propre corps. Je suis bien torp grand pour moi. C'est le vide qui enfle. Mes mains tremblent comme une gorge étranglée. Je les oblige à attraper mes épaules, mais elles tremblent encore. Je regarde mes genoux, on dirait deux gros cailloux, et mes chevilles deux moyens cailloux. Le reste tremble. Ce n'est pas vraiment du froid, c'est cette nouvelle chose : le vide.