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Parce qu'aujourd'hui, ce n'est plus drôle. J'ai grandi. J'ai vieilli. J'ai perdu ma naiveté, mon innocence et s'il m'en reste encore à l'intérieur de moi-même sans que je ne le sache, c'est que la vie est encore plus cruelle que je ne le pensais. J'ai toujours dit que la vie ne faisait pas de cadeaux et en même temps, j'ai toujours cru au destin car pour moi, le destin, c'est ce qu'il y a de plus beau. Contrairement à d'autres, le destin est pour moi, la réponse à toutes les questions que l'on se pose, un entremêlement du karma et de la bonne étoile. Il suffit d'y croire et cela devient réel. Ce que je veux dire par là, c'est que j'ai aimé souffrir car la souffrance fait mûrir. La souffrance enseigne, la souffrance est douloureuse mais elle est agréable. Lorsqu'il m'a quitté, j'avais encore dix-sept ans. J'avais les cheveux longs, j'étais plus menue, tous les bouts de mes cigarettes étaient rouges, je les fumais toutes comme si c'était ma première. Je restais éveillée tard pour écrire, j'écoutais toujours la radio, je dansais parfois dans ma chambre et je restais pendue à ma fenêtre durant des heures. Je pleurais souvent en me couchant, j'étais triste, déçue et je lui parlais pendant des heures à voix haute en préparant mon café. Je l'aimais et je voulais qu'il revienne. Je lui écrivais des messages, j'étais pitoyable, j'écrivais des lettres, je m'acharnais sur le papier mais au-delà de tout, ce que je faisais, c'était uniquement accorder de l'amour. Lorsque nous nous étions vus pour nous expliquer, je tremblais de tout mon corps et je n'étais pas capable de sortir un son de ma bouche alors que j'avais envie de lui hurler dessus parce que personne ne m'avait jamais autant blessé. Je prenais des cafés et je parlais de lui. J'avais espoir qu'un miracle advienne, j'avais espoir que la roue tourne. Je disais que je ne le méritais pas, que c'était pour cette raison qu'il m'avait quitté. J'ai passé des mois à penser à lui. Je ne l'ai jamais oublié. Aujourd'hui, c'est moi qui dit à l'autre qu'il ne me mérite pas. Je ne parle pas de lui au café sauf pour montrer mon côté hautain et je m'en foutiste. Quand on s'est expliqués, j'ai crié. J'ai été méchante, odieuse, crâneuse, pétasse. J'ai voulu faire femme. J'ai voulu montrer que je n'avais pas besoin de lui. Mais c'est une autre histoire, une histoire d'amour où l'on a essayé de m'abattre. Aujourd'hui, je ne pleure pas. Je garde la tête haute et j'y pense tout le temps. Je lui parle dans ma tête mais c'est uniquement pour crier, pour lui dire combien je le hais. Je n'envoie pas de messages, je n'écris pas de lettres, je peine à écrire un poème. Je l'ai appelé une seule fois, saoule. Même dans un tel instant où on a l'air de perdre toute dignité, je l'ai gardé entièrement. J'ai prétendu n'en avoir rien à faire, mais lui, il sait, il me connaît. Si je m'en fous, pourquoi j'appelle ? S'il s'en fout, pourquoi on s'est vus le lendemain ? Je prends des kilos et je fais semblant de ne pas le voir. Je peux passer quatre heures d'affilée devant Friends le soir car je n'arrive à regarder rien d'autre. Quand l'ambiance devient trop oppressante et que l'on me parle avec des tons négatifs, je fuis la pièce. Je m'empêche de ressentir quoi que ce soit alors que je suis éclatée en mille morceaux à l'intérieur. Le bordel règne dans ma chambre, tout a l'air sale et désordonné. Je prétends travailler mes examens mais j'ai l'impression que je vais me foirer. Je sors et je bois comme un trou tous les week-end, je touche des lèvres différentes chaque week-end, j'appelle n'importe qui pour casser ma solitude tous les week-ends, chaque week-end est un enfer car j'en ai passé 52 avec quelqu'un qui n'est plus là aujourd'hui. Je cherche toujours à sortir, écouter les problèmes des autres est devenu un échappatoire. Écouter quelqu'un râler à n'importe quelle heure, même si je n'entends pas, j'ai besoin que l'on me parle, que je n'y pense pas. Je réalise un tas de projets que j'avais laissé de côté car j'ai le temps. J'ai vu tous mes ex, car j'en avais le temps. Je vois des amis de longues dates et je m'en fais de nouveaux. Parfois je me tais alors je bois, ensuite je danse et je fais n'importe quoi. Je rentre seule le soir dans le taxi, je n'ai plus personne avec qui m'engueuler. Je ne suis plus à l'arrière, je suis devant et à chaque fois je demande au conducteur si ce qui nous arrive à dix-neuf ans est important. J'ai besoin que l'on me dise que non, ce n'est pas important, que ce n'est que le début de l'histoire même si j'ai l'impression que c'est la fin. Sauf que parfois, certains admettent que c'est important et c'est là que pour moi tout devient important aussi. Même si je sais que ce n'est pas la vérité, je vis avec le sentiment que je ne le retrouverai pas et quand je songe que je vais le retrouver, j'ai peur, je suis effrayée. Parce que c'était l'enfer, c'était un cauchemar et en même temps c'est le seul paradis que j'ai connu. J'ai été jeune et je laissais couler ma souffrance hors de moi, maintenant j'ai grandi et je nage dedans. Si on criera blasphème à mes propos qui sont tels, que oui, cet homme me manque et si je pouvais retourner au creux de son cou, je le ferais, mais c'est quelqu'un de mauvais, de lâche, qui n'a pas de coeur. Je traine des pieds depuis des semaines, je n'ai plus la force et ma voix tremble, tandis qu'une autre traverse notre rue le tenant par la main. Je ne sais pas ce qui est le plus douloureux, la perte ou être remplacée dans un délais si petit que l'on a envie de chialer quand on voit sur le visage des autres que c'est odieux. Je fais n'importe-quoi mais avant je faisais n'importe-quoi avec la raison. Je n'ai plus ma raison. Je n'ai plus rien, j'ai moi. J'ai mes ex, j'ai mes idées et j'ai mes rêves. Si j'essaye de m'accrocher à quelqu'un d'autre, cela n'est efficace que l'espace de quelques instants, car même quand celui que j'ai envie d'aimer me tend la main, je la laisse en suspens quelques heures. J'ai toujours répondu dans la minute qui suivait à ce pour qui je donnais mes yeux, maintenant j'attends des heures. Ces dernières semaines, des garçons qui m'avaient blessé, lâché, abandonné m'ont demandé le pardon alors que je riais gênée en disant que ce n'était rien, que c'était oublié, pardonné, rangé, classé. La seule personne dont j'avais besoin d'entendre cela, n'a pas émis un seul mot, pas une seule excuse. Pas de pardon, juste on se serre la main et on se dit à bientôt. Je t'emmerde. Je ne veux pas te revoir. Tu n'as pas besoin de moi. Il a mit la moitié d'une année pour me considérer comme sienne, il a mit deux semaines pour elle. Je me fous que ce soit fini, mais c'est là que je viens à me demander, vous savez, au profond de moi, si je suis aussi minable pour que l'on mette autant de temps à vouloir de moi et aussi peu pour ne plus en avoir envie. Ce qui est triste, c'est qu'au final la roue ne tourne pas. Les méchants ont tendance à toujours bien s'en tirer. Quand je pleure son nom dans les toilettes, il rit avec elle. Quand je n'arrive pas à dormir, il dort en pensant à elle. Il est heureux, il n'est pas seul. Il bâti tout ce qu'il a toujours voulu bâtir en ayant prit tous mes projets de construction. Il n'est l'image que d'un monstre mais ma solitude me pousse à ressentir de l'amour à son égard. Je ne l'admettrai jamais car je me dois de marcher un pied devant l'autre sans me fracasser l'âme sur le béton. L'opinion commune se retournerait contre moi et je me ferai encore plus de mal. On ne sait jamais quand on n'aime plus, ni si l'on aime encore. Quand il y a plus de raisons de ne plus aimer, la raison pense qu'elle a tord

Citation (tome 2) Où les histoires vivent. Découvrez maintenant