Lisen To The Mad Man (2)

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 Avant que je puisse mettre mes plans à exécution, une porte s'ouvre dans mon dos, d'abord, je crois que ce soit Maria, la gérante du magasin. Mais quand je me retourne, je vois que c'est Leroy qui est descendu de son appartement, sans doute après avoir entendu ma voix, du moins j'espère parce qu'il est juste en slip. Et s'il vient vraiment ici à n'importe quel moment en caleçon, je m'inquiète, je veux bien qu'il n'ait aucun mal avec son corps, mais quand même, on est dans un magasin ouvert près d'une rue passante, il faut avoir du respect pour le monde.

— Terrie ? Qu'est-ce que tu fais ici ? Je t'ai entendue depuis l'étage, tu étais avec qui ? s'inquiète-t-il.

L'avantage, c'est que maintenant, je suis sûre qu'il n'y a pas un nudiste dans mon groupe de musique. Bon, j'avais quand même de gros doutes avec le temps, mais ce n'est qu'un détail. L'inconvénient, c'est que même s'il est très gentil de s'inquiéter pour moi, je ne suis vraiment pas d'humeur à résumer la situation à quelqu'un, même à mon frère, alors à Leroy... Je n'ai rien contre lui, loin de là, mais ce n'est pas le genre de personne à qui je confie mes problèmes, il est de confiance, il n'y a pas de souci là-dessus, mais il n'a pas toujours les réactions appropriées.

— C'était Déborah ? demande-t-il en voyant que je garde le silence. La personne avec laquelle tu parlais, c'était Déborah ?

Je me doute bien que s'il pose cette question, c'est qu'il a compris le sujet principal de la conversation que j'ai eu avec elle alors je l'interroge presque inquiète :

— Ça se voit tant que ça ?

— Non, ça va, je l'ai seulement deviné samedi quand tu as eu des envies de meurtre contre moi, juste parce que je dansais avec elle, blague-t-il.

Je me retiens presque de rire, je n'ai pas vraiment eu envie de le tuer, à ce moment-là, je le jalousais juste un peu. Bon, un peu beaucoup, avec le recul, je ne peux plus me cacher, je suis amoureuse d'elle, bien sûr que j'enviais Leroy de pouvoir la prendre dans ses bras !

— Hey ! J'ai presque réussi à te faire sourire ! Allez, ne t'en fais pas, déprime pas comme ça, tu trouveras une autre fille, ce n'est pas ça qu'il manque, en plus Déborah n'a rien d'exceptionnel !

Ça y est, c'est le retour du Leroy que je connais, il ne faut pas changer les bonnes habitudes non plus ! Il a tellement l'art de ne pas avoir le bon mot au bon moment, il n'est vraiment pas doué pour réconforter quelqu'un. Son seul avantage, c'est qu'il change presque les idées, c'est déjà bien, non ?

— Bon, je vais y aller moi, annoncé-je pour couper court à la conversation avant qu'il ne se noie complètement.

— Oui, c'est sans doute mieux, ton frère sera plus fort que moi pour te réconforter ou je ne sais trop quoi. Moi dans tous les cas, je suis définitivement nul pour ça, affirme-t-il avant que je parte.

Je sors alors, retrouvant le froid que j'accueille presque comme un ami, appréciant pour une fois sa brûlure contre ma peau. Et c'est dans la nuit que je regagne ma voiture, en tâchant de ne pas trop prêter attention au monde alentour, qui rient, qui parlent, qui chahutent, qui vivent, ils semblent presque faire la fête dans la rue, tandis que moi, je désespère. La vie n'est pas cool, c'est toujours dans ces moments-là qu'on voit que le monde est plus heureux que nous... Comme si l'on n'était pas assez malheureux avant...

Je prends la route, regrettant pour la première fois de ne plus habiter à Londres, avant en dix minutes j'étais chez moi, maintenant, je dois presque attendre une demi-heure pour atteindre mon lit et pleurer.

Quand j'arrive, Warren m'attend étrangement sur son perron, comme s'il avait senti d'avance ma tristesse, alors qu'il ne savait même pas que je comptais révéler mes sentiments à Déborah. Bon, il pouvait se douter de quelque chose vu comme il me connaît bien et que c'était le moment ou jamais de le faire. Mais quand même, de là à savoir à l'avance que j'allais me prendre un râteau... J'espère sincèrement qu'il a plus d'espoir que ça en moi.

C'est seulement en descendant de voiture que je réalise que c'est sans doute Leroy qui l'a prévenu. Ce serait bien le genre du guitariste d'avoir une petite attention comme ça, après s'être retrouvé complètement démuni. Il ne faudra pas que j'oublie de le remercier la prochaine fois que je le croise, parce que là, je suis bien heureuse de ne pas avoir à sonner chez Warren pour pouvoir pleurer dans ses bras tandis qu'il me réconforte :

— Oh petite sœur... je suis tellement désolé, murmure mon jumeau sans desserrer son étreinte. Déborah est conne, ni plus ni moins, elle laisse partir une personne super.

— Qu'est-ce que j'aimerais être comme tout le monde ou au moins comme toi, ce serait tellement plus simple, je comprends pourquoi elle a fui...

Mon Dieu, je m'en veux tellement, j'ai vraiment fait que des erreurs aujourd'hui, je commence clairement à comprendre pourquoi elle est partie, n'importe quelle personne normale aurait fait pareil à sa place.

— Je t'interdis de dire ça OK ? Je t'interdis même de penser changer pour une fille ! Si elle ne t'aime pas exactement comme tu es avec tous tes défauts, elle ne te mérite pas !

— Arrête de parler comme un psy, tu sais très bien que j'ai raison, ça aurait été beaucoup plus simple si j'étais née fille, remarqué-je laissant sortir pour la première fois depuis longtemps tous mes doutes.

— Mais écoute l'homme fou, enfin le psy ! rigole-t-il arrivant même à me faire rire en citant le titre de nos chansons parti d'un gros délire. Et c'est plus simple pour qui ? Pour ces idiots qui n'arrivent pas à t'aimer toute entière ? Ne leur accorde pas tant d'intérêt ! C'est eux qui devraient changer pour t'accepter, pas toi pour qu'ils t'acceptent. Allez, viens, j'ai encore du rhum à la maison, j'ai peut-être même du saucisson.

J'aime beaucoup ces petites attentions de la part de mon frère qui me connaît suffisamment par cœur pour me proposer de la viande au lieu d'un pot de glace comme dans les films américains. Mais même si sa proposition est alléchante, il me faut un réconfort plus fort.

— Tu n'aurais pas un joint ou un truc comme ça ? vérifié-je me disant que le mélange drogue alcool me permettra au moins d'oublier quelques heures.

— Sans doute... avance-t-il sans vraiment s'engager par rapport à quoi que ce soit, paraissant ne pas aimer l'idée que fume quelque chose de forts alors que je ne suis pas très bien.

Mais je m'en fous un peu, je suis grande, je fais bien ce que je veux et il ne s'opposera pas à moi longtemps. Surtout que je ne suis pas non plus 100 % clean de ce côté-là, même si je ne suis pas addict, j'ai déjà touché à de la drogue, je ne suis pas une petite fille.

Her Majesty (Terminé)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant