Élie :Je sais déjà que je ne vais pas y arriver

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Je repose mon téléphone, et fonce sans me poser de questions. Juste une main sur la poignée, juste une porte ouverte et tout se met à basculer.
Plaquer mes doigts sur sa hanche pour la retourner, ne pas lui laisser le temps de réagir ou de réaliser, et la rapprocher. La rapprocher pour qu'il n'y ai plus que nos souffles, cette distance qui reste à parcourir pour nous séparer.
L'effacer en plaquant mes lèvres sur les siennes, plus rien pour nous éloigner, juste sa respiration qui s'accélère pour me signifier de continuer. Mes mains qui grimpent sur son dos, le bout de mes doigts pour dessiner sa peau.
Le parfum fruité de son cou pour m'ennivrer mais bien en dessous de ce geste plus bas de coller son bassin un peu plus au mien.
Ne plus sentir nos cœurs cogner parce qu'ils se sont calqués sur ce même rythme insoupçonné pour devenir ce silence intense où plus aucun mots n'a besoin d'être prononcé.
Faire glisser ses bretelles lentement, en retenant cette envie qui m'emmène là où la douleur refait surface, parce que cette image s'impose que tout à nouveau s'efface et...

Retour à la réalité, mes doigts resserrés sur mon téléphone et l'autre main sur la poignée. Le son du sèche cheveux, et cette porte en bois entre nous deux pour me rappeler que je risquerais bien, dans cette pièce où l'eau est reine, de me noyer.

Une profonde inspiration, et alors que la coque s'enfonce dans ma paume, de l'autre main, mes doigts s'écartent lentement. Un pas en arrière, les yeux fermés, je ne peux pas, je suis bien trop fatiguée après avoir luttée contre tout ça toutes ces années.

Les lendemains de soirées à lancer son haut à cette fille sous les draps, la même qui n'aura duré qu'une nuit parce que même une éternité avec chacune d'elles ne me suffirait pas. Regarder ce miroir, avaler un cachet pour ne pas trop être écœurée. Écœurée par ces boissons que je prends de moins en moins parce que de toute façon, chaque geste devient automatique. Juste rencontrer une fille, la repérer et lui faire comprendre les termes de notre accord. Juste les draps, juste nos corps.
Repartir au petit matin sans qu'elle me pose de questions, parce qu'elle ne comprendrai pas qu'une seule serait capable de me combler de toute façon.
Me haïr, détester ce que le miroir a à me renvoyer, me dire que c'est de ma faute et un peu de la sienne depuis toutes ces années à me hanter. Me dépêcher, sortir et finalement décider que plus aucune ne m'aura à ce jeu là.

Un dernier soupir, le sèche cheveux s'arrête, plus aucun bruit. Et puis ses pas pour se rapprocher de cette porte devant moi. L'ombre de ses pas, sur le plancher, mais elle non plus ne tourne pas la poignée. Le silence qui se met à résonner, et nos souffles qui se suspendent comme si chacune de nous deux avait peur d'exister.
Serrer la mâchoire, pour empêcher la gorge de faire la même chose et finalement juste murmurer :
_ Le petit déjeuner est prêt.
Regarder une dernière fois le téléphone, et les premiers mots s'afficher. Éteindre l'écran parce que la peur est bien trop présente de céder. Le poser sur la table en bois, sortir pour respirer.

Alors je tente de me convaincre que j'ai pris la meilleure solution, même si je sais déjà que j'aurais beau essayer, je ne vais pas y arriver.

"Trop près de Toi" Où les histoires vivent. Découvrez maintenant