Dédié à sirani17
Habib
- Papa est parti dis-je en ouvrant la porte.
J'entendais des pas se rapprocher de moi. Je me retournais et m'accroupis pour le réceptionner.
- Ah qu'est ce que t'es fort toi dis-je en souriant.
Avant de partir, je le couvrais de baisers et refermais la porte derrière moi; le laissant avec ma soeur.
Je montais dans ma voiture et prenais le chemin de l'hôpital. J'avais un rendez-vous de prévu avec elle ce matin.
Arrivé, je troquais ma tenue de ville contre celle de mon service. J'ouvrais l'un de mes tiroirs et sortais une enveloppe. L'enveloppe que j'aurai dû lui donner hier. L'enveloppe qui scellerait définitivement tout.Tout était fini à présent.
Djamilatou
Au fil du temps, l'hôpital était devenu l'endroit où je passais la quasi-totalité de mon temps. J'y passais bien plus de temps là bas qu'à la maison. Et rien que de savoir que je devais m'y rendre encore une fois, m'attristait plus qu'autre chose. Il n'y avait rien de plus déplaisant à mon avis, que de savoir que nous n'avions d'autre choix que devoir se forcer à faire certaines choses, loin d'être en accord ni avec le coeur ni avec la conscience.
Tout ceci avait fini par me pertuber.
Parfois il valait mieux mettre une croix sur certaines personnes sous peine de continuellement souffrir.Quel serait l'intérêt de songer à entretenir une relation si au fond vous connaissiez déjà la finalité?
Si je m'y rendais, c'était beaucoup plus pour ma mère. Pour lui faire en quelque sorte plaisir, Tout en essayant de ne pas la bercer d'illusions s'il arrivait que tout bascule. Si je continuais à me battre, c'était pour elle. Pour lui montrer, pour lui prouver que j'étais forte. Mais c'était en même temps pour prouver à celui qui était au contrôle de tout dans ce bas monde, que je ne lâcherai pas prise, que je savais qu'il m'aimait. Qu'importe mes problèmes, qu'importe les aléas de la vie, je devais comprendre qu'il était présent, qu'il était toujours là.
Qui peut mieux comprendre ta souffrance à part celui qui lit en toi?
Il n'y a que lui qui soit capable de déchiffrer, l'indéchiffrable aux yeux de l'humain.Je regardais le paysage défiler, n'ayant rien d'autre à faire; attendant patiemment d'arriver à destination. Avant que je ne sois dérangée par des cris entre une passagère et le receveur.Je n'avais jamais compris les gens qui étaient prêts à se tordre le cou, juste pour pouvoir être au courant de ce qui ne les concernait pas. Je comprenais encore moins ces personnes qui faisaient tout pour en faire débat là dessus et ce, tout au long du trajet. Même quand on passe à autre chose, y en a qui trouveront toujours un moyen de continuer à en parler de manière indiscrète et indirecte, et par conséquent remuer le couteau dans la plaie. À croire qu'ils y prenaient énormément plaisir.
Je soupirais de soulagement en voyant que j'étais arrivée. Je me frayais un chemin parmi les passagers avant de descendre du bus. L'hôpital n'était plus qu'à quelques pas. Bien entendu, je prenais tout mon temps possible. Je n'avais aucune envie de visualiser une énième fois la scène d'hier, qui soit dit en passant me blesse plus que je ne le laisse paraître. Et je n'avais aucune envie de le revoir.
Même si tout ça me faisait mal, j'avais du mal à lui en vouloir, j'avais du mal à être en colère, du mal à éprouver de la haine, de la rancoeur.Peut être parce que j'ai vécu pire comme situation?
Et honnêtement c'était le cas. J'ai vécu bien pire comme situation.
Arrivée, je saluais la dame à l'accueil et montais le plus lentement possible. Je toquais à la porte et rentrais après son approbation. Je murmurais un bonjour et prenais place.
Un silence pesant planait dans la salle. Chacun attendant peut-être que l'autre prenne la parole? Je soupirais et observais la table, voulant éviter tout contact visuel.
- Je -raclement de gorge- suis désolé pour la scène qui s'est produite hier.
Il voulait que je lui saute dessus peut être?
Finalement tout ça m'était resté en travers de la gorge. Je relevais ma tête et observais le mur en face de moi. Je revenais à la réalité quand je le vis prendre une enveloppe.Habib
Le moment était venu.
Il était temps que tout ça se finisse.
- Tenez dis-je en lui tendant l'enveloppe.
Pendant ce temps, je m'étais permis de l'observer pour le plaisir des jeux surtout.
- Et donc? Dit-elle en me regardant enfin.
- Vous n'avez plus besoin de moi Dis-je en souriant.
- Pardon? L'ancien cancérologue est revenu?
- Loin de là. Vous êtes en phase de guérir. Je dirai même que vous êtes guérie, il ne vous reste que quelques traitements à passer pour nous assurer de ce fait. Cependant, vous êtes dans l'obligation de revenir une fois par mois pour être sûr que vous ne fassiez pas de rechute dis-je en croisant mes doigts.
Djamilatou
Je n'arrivais toujours pas à réaliser que j'étais potentiellement guérie, voire guérie. Ça faisait tellement longtemps que j'attendais ça, que j'attendais enfin d'être libérée de ce cancer. Ce n'est que maintenant que je me rendais compte de la chance que j'avais.
Combien de femmes auraient voulu saisir cette chance? Combien auraient voulu être à ma place?
Sous le poids de l'émotion, je m'étais mise à pleurer. Mon corps était secoué de spasmes. Bien trop occupée à verser des larmes, je ne l'avais pas vu approcher. Il s'était agenouillé en face de moi, me tenant les mains.
- J'ai quand même passé plus d'un an à vos côtés, à vous soigner, à essayer de vous aider. Ça n'a pas toujours été facile autant pour vous que pour moi je le reconnais. Quand on a des patients, on ne souhaite qu'une chose c'est de les voir retrouver le sourire. Une fois fait, on a pas de meilleure récompense à notre boulot que ça. Grâce à ces mois passés ensemble, j'ai appris à vous connaître, à
peut-être m'attacher à vous. Et pour revenir à ce que vous avez vu hier, j'en suis désolé. Cette action n'a aucune signification. Je ne vais pas éterniser ce discours
-sourire- prochain rendez-vous dans un mois et prompt rétablissement à vous.Habib
Dans une dernière action, je laissais un baiser sur son front.
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I will not give you up this time
Je ne te laisserai pas partir cette fois ci
But darling, just kiss me slow, your heart is all I own
Mais chérie, embrasse moi doucement, ton coeur est tout ce que je possède
And in your eyes, you're holding mine
Et dans tes yeux tu tiens le mienPerfect, Ed sheeran my love 😎😍😂
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Djamilatou: Blessure sucrée
Random"J'avais la vive impression de vivre au ralenti. De ne plus être maître de moi même. Comme si mon esprit ne répondait plus. J'étais comme déconnectée de ce monde. Je subissais une routine. J'errais sur terre sans grande conviction. Je...