Chapitre 35 : Rencontres

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Habib

Vers les environs de dix-sept heures je quittais chez Ousmane et rentrais dans ma voiture accompagné de mon fils.
Après avoir trouvé le lieu où on achèterait quelque chose à grignoter, je garais ma voiture et descendais avec Khalil dans mes bras.

Je ne pouvais m'empêcher de le couver, de lui porter un maximum d'attention quand j'étais hors service.

Il y avait une petite file d'attente mais ça valait le coup d'attendre si c'était pour faire plaisir à mon fils.
La femme en face de moi fit tomber sa pochette en fouillant son sac à main. Je le pris et tapotais son épaule.

- Vous avez fait tomber ça dis-je en lui tendant sa pochette.

- Merci beaucoup vous me sauvez la mise, vous êtes quelqu'un de bien me dit-elle dans un sourire.

En l'observant de plus près, je la reconnus. Et en fin de compte, je ne pouvais pas en dire autant pour elle.
J'avais malgré moi, toujours gardé cette rancune. Je lui en voulais oui, et pas qu'un peu. J'ai plusieurs fois essayé d'oublier mais ce ne sont pas des actes qu'on décide d'effacer de notre mémoire. Et voilà, qu'aujourd'hui on se retrouvait l'un face à l'autre. Face à la dame qui m'avait reçu à l'accueil le jour où ma femme était sur le point d'accoucher. j'avais eu besoin d'elle, elle n'a même pas daigné me lancer un regard, se contentant juste de me parler froidement et de continuer à taper machinalement sur le clavier de sa machine.
Je m'efforçais toujours d'éviter les jugements mais là j'avais juste unr question: N'avait-elle pas de coeur? De sentiments? Qu'est ce qui pouvait l'atteindre?

J'avais ma femme entre mes mains, dans mes bras, le sang dégoulinant,... mais rien.

Rien.

Elle n'avait pas réagit non, elle gardait ce visage impassible, toujours insensible à la situation.

J'ai vu ma femme souffrir, crier à l'aide, être sur le point de rendre l'âme, fatiguée par ses efforts de vouloir tenir, de vouloir rester attachée à notre monde, mais rien. Non ça n'avait pas suffit pour toucher son coeur.

J'ai vu tout ce qui me restait, partir. S'envoler, loin de moi. M'abandonner, je me suis vu être livré à moi même.

Je la regardais toujours dans le blanc des yeux, et prenais sur moi pour lui sourire. Je préférais ne pas m'énerver sinon cela déboucherait sur un scandale. Après tout ce qui est fait est fait. Je prenais la commande de mon fils et sortais de la pâtisserie. Je l'installais dans la voiture et montais à mon tour. Je laissais tomber ma tête sur le volant et fermais les yeux fortement dans l'espoir d'oublier un moment ces souvenirs destructeurs. J'avais peut-être fait mon deuil mais ça restait des moments horribles qui ne me quittaient jamais.

Se sentir impuissant.
Y-a t-il plus destructeur?
Peut-être.
Mais, dans tous les cas, c'était destructeur de se sentir incapable  d'agir  face à une situation. Parfois, l'impression d'avoir échoué dans notre mission nous submerge, nous ronge, nous plonge même dans les remords.
Comme on le dit si souvent, avec des "si" on refait le monde.

Je me redressais et la vis devant la portière de ma voiture.
Il ne manquait plus que ça. De plus, elle n'avait pas l'air de vouloir bouger. Je finis par descendre de la voiture et la rejoignis.

- Oui?

- Je... je voulais vraiment m'excuser je... je ne me suis pas rendue compte de ce que je faisais, et ça a fini par me peser sur la conscience. Je ne veux pas que vous pensez que je suis là pour soulager ma conscience mais je reconnais mes erreurs et je m'en excuse... vraiment.

Djamilatou: Blessure sucrée Où les histoires vivent. Découvrez maintenant