Mes yeux dévisagent le résultat sans appel. Des larmes de frustration m'envahissaient et l'incompréhension contrôlait mes sens et mes respirations. Des points noirs dansaient ironiquement devant mes pupilles et mon monde sembla s'effondrer. Ça ne pouvait pas être réel.
J'avais dû mal à inspirer, je ne pouvais pas croire que c'était réellement arrivé. Assise sur les toilettes d'un supermarché, je fixais le sol, comme s'il était capable de m'apporter les réponses à toutes mes questions.
Mais personne ne pouvait m'aider.
Je jetais l'objet du délit dans le fond de mon sac, attrapais la bandoulière et sortais précipitamment de cet enfer personnel. Je laissais dans cette cabine tous les tissus heureux de mon être, et claquais des talons jusqu'à la sortie illuminée de décorations estivales.
Si seulement je pouvais m'enterrer toute seule.
Le monde semblait s'être métamorphosé durant ce cours laps de temps, et une bouffée de chaleur enflait à l'intérieur de mon œsophage, et la boule de stress dans mon estomac faisait pleurer mes yeux si tristes.
Je ramenais mes cheveux devant mes yeux à mesure que je parcourais la galerie en courant. J'étais déjà affreusement en retard et j'avais toujours eu horreur de ça, mais il fallait que je défende le présentement qui germait à l'intérieur de ma poitrine. Mes cheveux semblaient s'être dressés sur ma tête d'horreur, et les picotements de ma nuque empiraient de concert au rythme frénétique de mes pas.
Mes sandales claquaient sur le sol, j'accélérais encore pour atteindre ma voiture. Je m'apprêtais à retourner travailler, à regarder tous ces visages que je haïssais du plus profond de mon cœur. Je me suis promis qu'un jour je me vengerai, que je serai plus forte, mais ce jour n'était pas aujourd'hui. Je ne m'étais encore jamais sentie aussi seule et fragile qu'au moment où je tournais la clef.
Il faisait chaud dehors, et ce mois d'Août ne finissait pas de me surprendre, ça allait de mal en pire. Plus les jours passaient, plus mon monde s'effondrait, et les ultimes bases de mon existence n'allaient pas tarder à céder elles aussi. Et bientôt il n'allait plus rien rester de moi. Bon débarras.
Alors que je conduisais sans porter attention à la circulation, mon esprit contractait un virus qui allait bientôt me faire perdre la tête. Si j'en étais là, c'était en partie de ma faute, mais c'était aussi de la sienne, et il n'allait pas assumer.
Il est déjà incapable de comprendre qui je suis.
Alors que j'entrais dans le magasin, le contraste changement de température augmenta mon mal de tête déjà immense et me poussa à monter à l'étage. J'arrivais précipitamment dans les vestiaires pour me changer. Et, en tournant la tête vers la droite, je remarquais Tom assis sur la chaise qui me servait de purgatoire parfois.
Il était parfaitement immobile et me fixait droit dans les yeux. Ses yeux étaient foncés comme les miens, et semblaient cacher des secrets inavouables. Tom était mon ancien amant, et c'était lui qui avait décidé d'abolir notre relation, parce que je m'étais attachée à lui. Et il n'a même pas eu le courage de m'affronter en face ce jour-là. Est-ce-que du haut de son mètre quatre-vingt il appréhendait dorénavant ma présence ?
Le voir me retournait le cœur, mais seulement les souvenirs créaient encore un lien invisible entre nous. Plus aucun sentiment ne véhiculait à l'intérieur de mes veines, une haine sourde et destructrice se trouvait à leur place.
« Denitsa ? »
Mon prénom semblait assombri lorsque c'était lui qui le prononçait. L'immense sourire qui avait toujours fendu son visage en deux n'était qu'une lointaine image. Je ne savais pas ce qu'il s'était passé dans sa vie pour qu'il perde toute sa joie de vivre, et ça m'importait peu. Il n'était plus rien pour moi.