Ashes | PEAKY BLINDERS

XII. L'Anniversaire

R.L.

Pauline la dévisageait, une jolie tasse en porcelaine dans les mains. Elles étaient attablées dans l'un des coins intimistes et douillets d'un salon de thé que Rose avait découvert la semaine précédente. Le mobilier était raffiné, les tissus et les voiles habillaient la pièce avec sobriété. Tout était couleur pastel, contrastant harmonieusement avec les bois sombres et clairs des meubles. Une collection infinie de tasses et de théières s'offraient à la vue de la clientèle ; toutes les formes et toutes les couleurs imaginables se trouvaient là. Une nombre incalculable de bibelots décoraient avec soin chaque recoin de la pièce, qui accueillait un petit nombre de tables rondes et de fauteuils moelleux à souhait. Ce salon de thé était extrêmement prisé, et il était toujours recommandé de réserver une table pour s'assurer de profiter des succulents thés et pâtisseries que servait la maison, sans compter les autres délicieuses boissons et friandises. Cet espace était parfait pour Rose, elle qui aimait tant le calme, la douce odeur des plantes et le délectable fumet des cafés et des chocolats chauds, savoureux à souhait.

Rose avait fini par tout avouer à Pauline. Tout, absolument tout. Parce qu'elle n'en pouvait plus de garder tout cela pour elle. De tout enfouir au plus profond de son for intérieur, allant même jusqu'à en avoir des insomnies insupportables et récurrentes.

Rose aurait juré que les joues de son amie avaient perdu la vive couleur qui les habitait à l'ordinaire. Mais elle se retint de faire le moindre commentaire. Elle venait de vider son sac, durant une bonne demie-heure. Il était donc hors de question qu'elle reprît la parole pour le moment. Il fallait qu'elle laissât un peu de temps à Pauline, qui semblait plus que surprise. Elle était sous le choc. Son visage n'exprimait rien d'autre. À part le désappointement total. Elle but une gorgée de thé Ceylan, reposa sa tasse dans sa coupelle au liseré doré et brillant. Rose avait la gorge sèche. Elle redoutait la réaction de son amie.

Pauline cherchait ses mots, Rose s'en rendait compte mais elle refusait de lui apporter la moindre aide étant donné qu'elle-même ne savait comment gérer et affronter sa situation. Pauline se racla la gorge. Elle était prête, de toute évidence. Rose l'observa en silence, rongée par l'appréhension de ce qu'elle allait lui déclarer. Malgré le contrôle qu'elle tentait d'exercer sur elle-même, son cœur n'en faisait qu'à sa tête. Il battait à tout rompre, cognant vigoureusement contre sa cage thoracique.

- Rose, je te remercie... Merci de m'avoir confié tout ça.

La française esquissa un sourire, les mains moites posées sur ses genoux. Bien qu'elle fût confortablement installée dans son siège tendu de velours pourpre, elle n'était pas à l'aise du tout.

- Tu vas le revoir ?

Sa question tomba telle une pierre au fond d'un puits. Lourdement.

- Il est en affaires avec mon père, alors... Je suppose que, oui, nous allons nous recroiser.

Pauline soupira, sans pour autant la juger de ses petits yeux bruns.

- Tu as envie de le revoir ?

Rose se pinça les lèvres. Elle ne savait pas quoi dire.

- Qu'est-ce que tu ressens pour lui, Rose ?

Son cœur cessa de battre durant une poignée de secondes. L'interrogation de Pauline l'avait prise de cours, la chamboula à tel point qu'elle sentit ses joues rougir à une vitesse alarmante.

- Rose ? l'intima doucement son amie.

Mais Rose, une fois de plus, ignorait ce qu'elle pouvait lui déclarer – ou lui avouer. Depuis... depuis le Drame, elle avait peur des hommes. De tous. Sauf de son père. Pauline le savait et pourtant, elle lui demandait désormais si elle éprouvait des... sentiments pour lui ? Qu'avait-elle donc en tête ? Que Rose pût changer, évoluer ? Que sa crainte viscérale du sexe masculin pût disparaître au contact d'un homme ? Et pas des moindres : l'homme le plus redouté de toute l'Angleterre.