XXXXII. La Lettre

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T. S.

Dans le silence épais de son bureau, il fumait. Thomas était de retour chez lui. Il était tard. Dehors, la nuit était noire. Aucune étoile ne brillait. Seul un quartier de lune se détachait de l'obscurité inquiétante.

Les affaires allaient de mal en pis. Plus Thomas devenait puissant, plus ses ennemis se multipliaient, y compris au sein de son organisation. Il était encore plus méfiant avec chacun d'entre eux, depuis que Lizzie les avait trahis. Il ne cessait d'être sur ses gardes, paranoïaque et tendu.

Après le démantèlement du gang de Charles Nichols, le calme avait été de très courte durée. Les Peaky Blinders devaient être sur tous les fronts – tous, sans exception. Qu'ils fussent nationaux ou internationaux, les accords étaient nombreux et Thomas n'avait pas le droit à l'erreur.

Quant à sa carrière politique, Thomas en était à un tournant décisif, parce qu'au Parlement, il avait fait une nouvelle rencontre. Celle d'un autre Diable. Pire encore que Nichols.

Oswald Mosley.

Cet homme brun aux yeux aussi noirs que l'Enfer était un danger hors du commun. Mosley était le politicien le plus perfide de tous, parce qu'il était prêt à tout pour exterminer ceux qu'il considérait comme une menace. Les juifs.

Thomas se méfiait de lui comme de la peste. Avec cet impitoyable personnage, il n'était plus du tout question de gangs ou de vendetta. L'affrontement ne se jouait plus dans la boue de Birmingham, ni dans un bar de Londres. Non. La confrontation se déroulait dans les plus hautes sphères de la capitale.

Où le Pouvoir était maître. Où les hommes étaient souverains. Où les femmes baissaient la tête et fermaient la bouche.

Thomas se remémorait leur rencontre avec Mosley, dans son cabinet au Parlement. À l'image du fin stratège qu'il était, Thomas s'était assis, derrière son bureau, puis avait fait asseoir Michael de l'autre côté de la table, à sa gauche et, à sa droite, Arthur était resté debout, près de la fenêtre.

Un triangle d'attaque.

Sans la moindre gêne, leur ennemi juré avait humilié d'une voix terriblement calme Michael et Arthur, rappelant leurs erreurs et leurs failles. Thomas avait gardé son sang froid, mais avait dû apaiser son frère aîné, semblable à une bombe à retardement sur le point d'exploser. Malheureusement, Arthur n'avait pas tenu le choc. D'une seule main, il avait brisé le dossier d'une chaise en bois. Il avait été vaincu.

Mosley avait triomphé. Il avait réussi à les menacer, uniquement par les mots. Nul besoin d'une arme ou de tout autre moyen de pression. Mosley était une menace à lui tout seul. Et c'était la première fois que les Peaky Blinders avait à affronter un adversaire de cette envergure.

Thomas écrasa son mégot dans le cendrier posé sur le bureau. Les rouages de son esprit tournaient à une vitesse alarmante. Toutes ses pensées étaient concentrées sur cet effroyable fasciste – ou presque. Il avait autre chose en tête.    

Une lueur d'espoir.

Rose.

Deux mois que son père reposait chez lui, sous terre, et qu'elle n'était pas revenue une seule fois le voir.

Deux mois qu'il n'avait pas croisé son intense regard, contemplé son beau visage, caressé sa peau tendre.

Deux mois qu'elle lui avait avoué ses sentiments.

Deux mois qu'il regrettait de ne pas lui avoir dit, lui aussi.

Qu'il était amoureux d'elle.

Ashes | PEAKY BLINDERSOù les histoires vivent. Découvrez maintenant