XXVI. L'Invitée

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R. L.

Rose était paniquée. Tout s'était passé très vite. Elle n'avait rien vu venir. Rien. Lorsque ses hommes étaient venus la chercher, elle avait succombé à une angoisse profonde, exécutant chaque ordre qu'elle avait reçu. Se taire, faire vite, prendre ses affaires, se hâter, encore, monter dans la voiture – et enfin, souffler. Elle n'avait nullement protesté car elle savait qu'il était à l'origine de toute cette agitation. Si les choses se déroulaient ainsi, c'était parce qu'il y avait une raison. Une raison précise.

La promesse de Thomas Shelby résonna dans sa tête : « Je te protègerai ». Ses mots étaient semblables à un pacte. Elle lui avait accordé sa confiance, bien que ce fût absurde à ses yeux, surtout pour une femme aussi peureuse qu'elle. Rose avait envie de croire. Qu'il prendrait soin d'elle. Qu'il l'éloignerait de Nichols. Qu'elle resterait en vie.

Derrière la vitre du véhicule noir, la française reconnut les terres qui se trouvaient non loin de son manoir. Depuis leur entrée dans son hôtel particulier, elle savait qu'elle finirait par revoir cette immense bâtisse. Ou plutôt, qu'il la ferait venir à elle.

Rose était terriblement soucieuse. Où était son père ? Comment allait-il ? Pourquoi n'était-il pas assis à côté d'elle ? Pourquoi ? Une vague d'angoisse commença à la repousser mais, avec acharnement, elle parvint à l'écarter. Elle voulait être prête à lui faire face.

Quelques secondes plus tard, la demeure de Thomas Shelby apparut dans son champ de vision. Sombre et haute, elle était toujours aussi impressionnante – un peu effrayante, même. Des voitures et des fourgons étaient garés dans la cour, comme si les conducteurs avaient été pressés par une seule et même raison. À sa droite, Rose reconnut la voiture qui les avait ramenées à Londres, Pauline et elle.

L'automobile freina brusquement. À peine eut-elle le temps de se préparer à sortir qu'une paire de mains s'empara d'elle et la fit descendre. Déséquilibrée, Rose se redressa sur ses chaussures à talons hauts puis un des hommes la poussa dans le dos pour la faire avancer. Devant elle, un autre gangster portait ses affaires. Elle était à la merci de deux êtres silencieux, brusques et peu commodes.

Ils marchèrent tous trois jusqu'au porche d'entrée lorsqu'elle le vit, les mains dans les poches, une cigarette à la bouche. Sans sa casquette noire, il paraissait encore plus menaçant. Il fit un signe de tête à ses acolytes, qui s'engouffrèrent à l'intérieur du manoir. Ils savaient ce qui leur restait à faire.

Rose s'était arrêtée à quelques mètres de lui. Remuée par les évènements, elle tenta de reprendre ses esprits. D'un coup, se surprenant elle-même, elle le rejoignit à grandes enjambées. La peur avait repris le dessus. La colère, aussi.

- Où est mon père ? Pourquoi suis-je ici ? Que se passe-t-il ?

Il demeurait calme, fumant et la scrutant de ses yeux clairs. Il était froid et distant. Comme si leur rapprochement au Walter's n'avait jamais eu lieu.

- Thomas ! Répondez-moi ! l'intima-t-elle d'une voix forte.   

Sa vue se brouilla. Paniquée, des larmes emplirent ses yeux sombres. Il écrasa sa cigarette au sol, en prenant tout son temps. À présent, Rose bouillonnait de rage et était rongée par l'inquiétude. Tant de questions sans réponse. Se moquait-il d'elle ?

Rose perdit patience et se mit à tourner en rond, se rongeant les ongles. Elle ne fit plus attention à lui et à sa nonchalance si horripilante. Il ne voulait rien lui dire. Mais pourquoi ? Quel était son but d'agir de la sorte ? La rendre folle ? Il était sur le point d'y arriver.

Ashes | PEAKY BLINDERSOù les histoires vivent. Découvrez maintenant