XXXVIII. Le Passé

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T. S.

Thomas avait reposé l'alcool et les compresses sur l'une des deux tables de chevet. De ses yeux bleus, il observa Rose. À la lueur des lampes, elle était si belle. L'ombre de ses cils formaient sous ses prunelles sombres d'élégants petits soleils. Il s'attarda sur ses traits, si fins et si doux.

Les mains jointes, Rose avait la tête baissée. Elle venait tout juste de nommer l'Enfer. Adam. Cet homme l'avait détruite. Il voulait savoir, tout, mais il ne la pressa pas.

Le silence était de retour. Pourtant, cela ne le dérangeait pas, au contraire. Il était habitué. Cette fois, ce n'était pas lui qui l'avait provoqué, c'était elle. Thomas était suspendu à ses lèvres, ce délicieux fruit défendu qui s'offrait à lui.

Rose se redressa alors, ancrant ses yeux aux reflets orangés dans les siens. Elle paraissait soudainement sûre d'elle.

- Je l'ai rencontré quand j'avais vingt-cinq ans.

Thomas attendit. Une désagréable sensation naissait en lui, il sentait que la suite n'allait pas lui plaire. Pas du tout.

- Il travaillait dans le même magasin que moi. Au départ, ce n'était qu'un simple collègue de travail. Tout le monde l'adorait. Il était... charmant, drôle et il... il était toujours au centre de l'attention.

Rose évita son regard, mal à l'aise. Ses joues rougirent et elle s'était légèrement recroquevillée sur elle-même. Comme pour se protéger.

Thomas ne cilla pas, mais il ne put s'empêcher de sortir une cigarette de sa poche. Cela le détendrait. Il en avait besoin. Ses doutes se confirmaient : cet homme était semblable à ce qu'avait été Nichols, d'une certaine manière. Le chef des Peaky Blinders l'avait vu maintes fois en société. Avenant et beau parleur, il faisait tourner toutes les têtes. À son opposé, Thomas avait une aura qui imposait le respect. Et répandait la peur. Il était maître dans l'art de la manipulation. Il savait parfaitement quoi faire dans n'importe quelle situation. Il anticipait, observait, attaquait. Un vrai stratège, un redoutable orateur.

Thomas alluma sa cigarette. Rose ne fit pas le moindre commentaire, même s'il voyait que cela la démangeait.

- Toutes les femmes l'aimaient, et il les charmaient toutes, mais moi...

Un mince sourire se dessina sur les lèvres pleines de Thomas. Il n'était même pas étonné de cette différence qu'elle marquait entre les autres et elle, vu la façon dont elle s'était comportée avec lui. Rose ne cédait jamais.

Sauf avec lui.

- ... je ne lui courais pas après. J'avais d'autres choses en tête.

Elle passa une main dans sa chevelure ondulée, quelques mèches rebelles lui tombaient devant les yeux. Thomas ne put s'empêcher d'en glisser une derrière son oreille. Nouvelle montée de rougeur sur ses pommettes.

- Et puis, finalement, j'ai... Il... Nous avons commencé à nous voir. Il était merveilleux, avec moi. Toutes mes collègues m'enviaient. J'étais la femme la plus heureuse du monde, poursuivit-elle à voix basse.

Ces derniers mots semblaient lourds de regrets. Elle se tourna vers la fenêtre aux rideaux ouverts, révélant la pleine lune. Elle n'était pas bien et, sous le regard surpris de Thomas, elle commença à se balancer, très légèrement. D'avant en arrière. Tel un bercement d'enfant. Elle ramena ses genoux contre sa poitrine, se courbant pour se faire la plus petite possible. Comme si elle voulait disparaître du monde.

Il l'observa, sans bouger. Il n'osa pas la toucher. Elle était fébrile et si fragile. Il craignait que le moindre de ses gestes la fît se refermer sur elle-même – ou pire, fuir.

Ashes | PEAKY BLINDERSOù les histoires vivent. Découvrez maintenant