Chapitre I-3

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Naturellement, des petits groupes s'étaient formés. Et il faut bien se dire que l'exercice social avait instantanément commencé. Car même si nous étions entre amis (ou presque), chacun devait assurer une certaine performance relationnelle, aussi simple soit-elle. Ainsi les banalités fusaient avec un rythme soutenu, offrant à tous la possibilité d'exister dans ces petites interactions.

Pour ma part, j'avais choisi la sécurité en restant avec mon vieux pote Tom, préférant garder pour plus tard l'aventure qui consisterait à créer de nouveaux liens, et gagner l'estime de ceux que je connaissais moins bien.

C'était par ailleurs un réel plaisir de mettre en œuvre la mise à jour de ce que nous étions à cet instant, rattrapant les derniers mois en quelques minutes, comblant les vides de ce que nous ignorions l'un de l'autre, nous permettant ainsi de retrouver spontanément l'aisance qui caractérisait notre relation.

— Et vous êtes content de votre appart ?

— Ouais, franchement on y est bien. On n'est pas loin du métro, du coup Lola est à vingt minutes de la fac et moi à une demi-heure de l'école. Après, c'est pas super grand, mais bon, on est à deux, c'est le plus important.

— T'as raison, et comme ça, ça vous ruine pas non plus.

Mais déjà Sylvain nous interrompait tous :

— Bon la jeunesse, si on veut avoir le temps d'installer le campement comme il faut, il va falloir se bouger. D'autant plus que j'ai bien hâte de pouvoir me caler avec un énorme joint et une bonne bière !

— Putain moi aussi ! Allez c'est parti ! ne pût s'empêcher de gueuler Max.

— Attrapez tous vos affaires. On va mettre ça dans la remorque, nous demanda alors Tom.

Ainsi, tout le monde s'activa subitement, transférant les sacs et les tentes dans la remorque qui était accrochée à l'arrière du gros Land Cruiser. Un de ces vieux modèles de 4x4 à l'apparence brutale.

En moins de cinq minutes, nous étions prêts à partir.

— Hey Tom ? On va tous rentrer là-dedans ? On est quand même huit, demandais-je en regardant la bête.

— T'inquiète, mon père l'a modifiée pour ses sorties avec les touristes, y'a deux grosses banquettes installées sur la longueur à l'arrière, ça va le faire sans problème ! On pourrait même prendre deux personnes de plus ! Ça te dit de venir devant, voir comment on manie l'engin ?

— Avec grand plaisir ! Mais Lola, ça te dérange pas ?

— Non vas-y David. C'est un truc de mec de toute façon, me répondit-elle avec son charmant sourire.

Je suivis donc Tom vers l'avant du véhicule, savourant l'honneur qui m'était fait. Il est toujours agréable d'avoir l'occasion de se sentir privilégié au sein d'un groupe. Et franchement, même si le pilotage d'une telle machine m'intéressait, c'était surtout le fait d'avoir été choisi qui me remplissait de joie. Je m'installai donc sur le fauteuil passager, camouflant la satisfaction puérile que je ressentais, mais adressant tout de même un sourire complice à mon ami, afin de lui exprimer ma reconnaissance. Il répondit en souriant à son tour, puis se tourna vers l'arrière en demandant :

— Tout le monde est installé ?

— Ouiii ! s'exclamèrent-ils en cœur.

À les entendre, je me disais que tout cela faisait quand même un peu colonie de vacances. Mais finalement, ça ne m'était pas si désagréable. Car bien que je sois plutôt du genre sérieux en apparence, j'appréciais réellement l'énergie infantile qui nous animait alors.

Tom mit le contact et le gros V8 Diesel se mit aussitôt à vrombir. C'est à ce moment qui me semblait bien choisi, que je me sentis de dire sur un ton à la fois maîtrisé et plein d'enthousiasme :

— En route pour l'aventure !

La réalité, c'est que jamais je n'aurais pu imaginer l'aventure qui nous attendait !

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