Chapitre IV-23

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Mon ami avait été minutieux dans l'observation des détails, jouant correctement le rôle de tacticien. Le plan de celui que nous savions à présent se nommer Johan se voulait être simple. Enfin, simple dans les objectifs plus que dans la réalisation. Le but en lui-même consistait à rejoindre un local technique, où une série de manœuvres devait nous permettre de refaire circuler une partie du courant dans la base. Johan avait pris le temps de nous expliquer que lui et d'autres survivants avaient découvert une ancienne faille de sécurité dans les archives du bâtiment. Ils n'avaient jamais pu être certains de l'efficacité de celle-ci, mais n'ayant pas d'autres options, ils furent amenés à concentrer leur énergie d'hommes pris au piège dans son exploitation. Finalement, notre présence en ces lieux validait à postériori, et d'une bien triste façon, la faisabilité de leur projet. Il nous avait également prévenus, l'électricité ne serait qu'une étape. Il ne suffirait pas de la remettre et de l'éteindre à nouveau pour nous libérer. Cela aurait été trop facile ! Non, une fois l'énergie à nouveau en circulation, il faudrait encore accomplir plusieurs tâches. La complexité de certaines d'entre elles pouvant être avancée, il serait nécessaire de le rejoindre dès que l'ascenseur le permettrait. De façon à ce que, comme il disait, nous puissions devenir « opérationnels ». C'était finalement un des rares mots qu'il avait employés trahissant un vocabulaire militaire. Je sentais bien son effort, il cherchait à ce que ses directives soient les plus claires possible pour nous. Cela lui conférait parfois une attitude que je trouvais presque condescendante. Mais bon, ça n'était pas le plus grave en cet instant.

Car ce qui se révélait plus problématique pour nous, c'était évidemment la difficulté à rejoindre la salle ciblée. Nous lui avions décrit la petite remise où nous nous trouvions, le chemin parcouru pour y arriver, ainsi que la réserve de nourriture attenante. Cela lui avait facilement permis de nous localiser. Heureusement, au-delà de sa propre connaissance des lieux (le premier étage étant le moins secret), il avait sous les yeux une carte de notre niveau. Ainsi, grâce à ses explications, nous avons pu comprendre que la pièce où nous avions observé la dernière créature se trouvait être une cuisine. Elle était en fait mitoyenne du réfectoire visité plus tôt, celui-ci étant sur sa gauche. Derrière, il y avait un couloir perpendiculaire dont le côté droit donnait accès à l'ascenseur, pour le moment hors service. Il faudrait donc partir dans l'autre sens et parcourir une cinquantaine de mètres pour atteindre notre objectif. Là, nous étions censés trouver une porte, la fameuse entrée du local d'énergie. Sa couleur orange devait nous permettre de ne pas la rater. Johan nous avait décrit les opérations que nous devrions mettre en œuvre une fois à l'intérieur. Rien de bien compliqué, bien qu'il faudrait respecter scrupuleusement l'ordre des manipulations qu'il nous avait dicté. Le souci majeur serait à ce moment-là de pouvoir y consacrer le temps nécessaire : cinq bonnes minutes. Or je sentais déjà que cela risquait d'être particulièrement long au vu des conditions. D'ailleurs, le moment était venu d'aborder ces fameuses « conditions ».

— Bon. Et vous pensez que l'on sera capables de faire tout ça avec ces putains de zombies qui rôdent dans le coin ? lui demanda Sylvain.

— J'aimerais vous dire que ce sera facile, mais ce serait vous mentir. La vérité c'est que l'on n'a pas le choix. Soit on prend des risques pour essayer de s'en sortir, soit on attend de mourir passivement. Après, même s'ils sont sacrément coriaces, on peut les tuer. J'ai vu des collègues en dégommer sur mes caméras. Et Leny s'en est fait plusieurs tout seul. Bizarrement, comme on l'entend depuis longtemps, il faut leur détruire le cerveau. Ne me demandez pas pourquoi, j'en ai aucune foutue idée. Je trouve dingue que les légendes disent vrai et qu'un corps puisse continuer de bouger après avoir reçu un chargeur.

— Mais comment ça se fait que tout un tas de militaires comme vous n'ait pas réussi à tous les tuer avec vos flingues ?

— On n'était clairement pas préparés à ça. Personne ne pouvait anticiper une attaque quasi simultanée sur tous les niveaux dans un bâtiment pareil, et surtout pas une attaque de cette nature. En fait, on n'imaginait pas qu'une menace pouvait venir de l'intérieur. Peut-être que ceux qui sont à l'origine de ça s'y étaient préparés, mais ça n'a manifestement pas suffi. En plus, nous sommes en temps de paix. Quand l'alarme a retenti, tout le monde a dû penser à un exercice. En tout cas, c'est ce que j'ai pensé avant de voir les images. Et il faut dire que vu ce à quoi on s'occupait ici, le personnel ne se baladait pas avec des armes lourdes. Certains avaient leurs armes de service, des petits calibres, mais pas la majorité. Il y avait plus de grosses têtes dans cette base que de vrais soldats. Tout ça ajouté au fait que les gens ont vu leurs collègues de travail se retourner contre eux soudainement et je pense que nous avons tous les ingrédients pour assister à un tel bordel.

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