Chapitre IX-42

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Je marche dans l'herbe. Tous mes amis m'attendent près du lac. Sylvain et Léa se tournent vers moi et me font signe de les rejoindre. Les rayons du soleil chauffent délicieusement mon corps. J'ai hâte d'être près d'eux, mais ne me presse pas. J'ai le temps. L'air est si doux au contact de ma peau. Si agréable que j'en éprouve un plaisir sensuel. Les fourmillements commencent. Pourrais-je avoir un orgasme grâce à la beauté de ce moment ? Ils deviennent plus forts, surtout au niveau du visage. Après tout, jouir de la magnificence du monde ne me semble pas être une mauvaise idée. Le picotement sur mes joues se fait plus intense et résonne dans ma tête. Peut-être que le soleil brille un peu trop aujourd'hui, dommage. Ce n'est pas grave, je vais rejoindre mes amis. Mon visage me brûle. Je ne suis plus qu'à quelques pas d'eux. Mes oreilles sifflent, tellement fort. Je te tends la main mon ami. Des étincelles viennent obscurcir ma vision, elles sont si rouges qu'elles en deviennent noires. Sylvain, je ne veux pas partir...

— David, réveille-toi, pitié, réveille-toi.

La voix implorante de Léa me parvint en même temps que ma vue retrouvait son visage. Les claques sur mes joues étaient douloureuses.

— Qu'est-ce que... On est toujours là ? demandai-je, perdu.

— Mon dieu, j'ai eu si peur ! Oui, on est encore là. Mais plus pour très longtemps.

J'ai laissé tomber ma tête alourdie par l'évanouissement sur le côté. Tom levait sa barre et la laissait s'abattre sur le crâne d'un corps étendu. Max se tenait derrière lui, le fusil à l'épaule, braquant le cadavre sur lequel s'acharnait mon ami. Deux décharnés immobiles gisaient sur le sol entre eux et Lola, toujours dans la cabine désormais ouverte de l'ascenseur.

— J'ai l'impression de me réveiller dans un cauchemar.

— Tiens prends ça, me dit-elle en me tendant un des sachets de biscuits restants de la réserve.

Je l'ai saisi faiblement. Après en avoir extirpé un premier et l'avoir cassé à l'aide de mes incisives, je mâchai. En sentant la texture croquante se transformer progressivement en une pâte plus digeste, j'eus l'impression soudaine que le sucre contenu dans cet aliment se faisait instantanément aspirer par les muqueuses de ma langue pour se diluer dans mon sang.

— Tu n'es pas contaminé, tu as juste fait une crise d'hypoglycémie, reprit-elle.

— Hein ? Comment tu peux en être sûre ?

— Quand tu as perdu conscience, Tom a cru que tu allais te transformer. Il était à deux doigts de... t'achever. Mais heureusement, le docteur a réussi à nous contacter sur l'interphone de l'ascenseur. Il nous voyait grâce à la caméra et nous a demandé ce qu'il se passait. Une fois qu'on lui a décrit la situation, il nous a expliqué que tes symptômes ne correspondaient pas à la contamination. Si tu ne convulsais pas et que ta chaleur corporelle ne chutait pas drastiquement, c'est que c'était autre chose. Il a deviné que tu étais devenu très pâle et a conclu à une hypoglycémie. Pas étonnant en fin de compte vu le peu que tu as mangé et tous les efforts que tu as faits.

Le sucre commençait déjà à faire son effet. Je me sentais mieux et me rasseyais.

— Le docteur ?

— Ouais, le type qu'on va voir, il est docteur. On y est presque. Max a tué deux zombies avec le fusil et Tom s'est fait le dernier à la main pour économiser une balle.

Je ne pus m'empêcher de penser que si j'avais été là, on aurait économisé deux balles de plus. Mais bon, vu mon état, je n'allais pas me plaindre.

Nos deux combattants revenaient vers nous.

— Ça va mieux ? me demanda Tom.

— Ouais, mais je me ferais bien une entrecôte.

— Je te le fais pas dire ! Je vais tellement kiffer la prochaine fois que je vais en avoir une dans l'assiette. Sinon... Léa t'a dit ce que j'ai failli faire ?

— T'inquiète, y'a pas de souci. Je préfère ça plutôt que d'imaginer de tous vous bouffer.

— N'empêche que je m'en veux à mort. Penser que j'aurais pu te tuer. Tout ça pour une crise de blanche en plus !

— Il faut regarder l'aspect positif des choses, on s'en sort bien finalement. Je suis vivant et je ne t'en veux pas. Au contraire, vu la situation, t'as montré que tu étais prêt à faire ce qu'il fallait.

— Je te remercie...

— Passons à autre chose. On va le voir ce docteur... J'ai vraiment hâte de me casser d'ici !

— Grave ! répliqua Max.

Les autres montrèrent également leur assentiment. Léa m'aida à me relever doucement. Je la récompensai d'un petit baiser qu'elle transforma en une puissante étreinte. Je comprenais à quel point je lui avais fait peur. Moi, de mon côté, ça allait. Frôler la mort est parfois plus facile pour soi-même que pour ses proches. J'éprouvais quand même un léger regret pour le lac, parce que finalement, elle était aussi là-bas.

Un peu fébrile, mais debout, je me permis une piqûre de rappel :

— Bon, on reste sur nos gardes jusqu'au bout. Même quand on sera avec le docteur. Il est hors de question qu'on se fasse baiser.

Léa me fixa d'un drôle d'air.

— T'es conscient qu'il nous écoute ?

— Et bien comme ça il sait à qui il a affaire !

Merde, en réalité, je n'y avais pas pensé. Tant pis. De toute façon l'interphone restait muet, il ne m'avait peut-être pas entendu.

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