Chapitre VIII-38

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Un baiser de remerciement plus tard, nous partions tous vers la chambre. L'ordinateur s'était mis en veille. En appuyant sur une touche, l'écran propagea de nouveau sa faible lumière. La fenêtre du mot de passe demandait à nouveau d'être remplie. Je n'eus pas le temps d'essayer de me rappeler ce que Johan nous avait expliqué à propos du code et de sa logique, que Max se saisit du bout de papier posé à côté du clavier.

— Ça au moins il nous l'a laissé ! s'exclama-t-il.

En peu de temps, nous trouvions un logiciel de messagerie instantanée atypique, mais simple d'utilisation. Un message d'alerte signalant la réception d'un nouveau message une demi-heure plus tôt attira notre attention.

— Attends un peu, qui a bien pu envoyer un message il y a si peu de temps ? demanda Tom à Max qui était aux commandes.

— On va voir ça.

Une fois ouvert, ce que nous avons pu lire était court, mais interpellant : « Aux survivants qui se sont connectés à ce terminal, contactez-moi tout de suite ! Et surtout, évitez les rats autant que vous le pouvez, protégez-vous-en ! Ils sont le premier vecteur ! ».

Instantanément, je me retournai vers le mur auquel était collée la tête de lit. En haut à gauche se trouvait une bouche de ventilation. J'en avais vues beaucoup depuis que nous arpentions ce fameux « Centre Alpha », sans jamais y avoir réellement accordé d'attention. Elles faisaient partie du décor et il me semblait normal qu'elles aient leur place dans un tel environnement souterrain. Mais maintenant, mon intérêt à leur sujet changeait radicalement. Cela me semblait être la meilleure explication à ce qui avait dû se passer dans la chambre où étaient Johan et les filles, mais également la raison d'une telle propagation en ces lieux. Je m'étonnais tout de même que nous n'ayons pas eu l'occasion de voir ces bestioles depuis que nous explorions cet endroit. Nous avions certainement eu de la chance.

J'ai réfléchi rapidement à la façon dont je pourrais obstruer ce conduit. Le fait qu'il ne soit pas muni d'un système de fermeture ne me simplifiait pas la tâche. Une grille métallique aux barreaux espacés lui donnait l'esthétique habituelle de ce genre de dispositif. Malheureusement, je concluais à vue d'œil qu'elle n'empêcherait pas un petit rongeur de se faufiler par là. Il était de toute façon hors de question de prendre le risque. Je me suis donc dirigé vers le lit sans un mot et ai pris le drap qui recouvrait le matelas. Après être monté sur la commode que j'avais placée sous ce que je désirais atteindre, j'ai réussi à extraire sans trop d'effort la pièce en métal. Ma frontale au niveau de la bouche d'aération me permettait de voir à l'intérieur sur les cinquante centimètres précédant le coude qui partait vers la droite. Le bruit d'un grattement horripilant me fit comprendre que je m'exposais dangereusement. Je pressai mes gestes tout en imaginant déjà une vermine enragée me sauter sur la figure. J'eus cependant le temps d'enfoncer le drap en boule dans l'orifice et de le tasser convenablement.

— Des rats putain ! Ils ont dû les mordre pendant qu'ils dormaient ! J'en ai entendu un là-dedans. Il doit y en avoir plein les conduits.

Les autres me regardaient stupéfaits, sans doute plus à cause de cette nouvelle que de ma simple intervention. Je n'avais jamais été particulièrement effrayé par ces nuisibles, même si mon père m'avait raconté dans mon enfance que l'un de ses amis s'était réveillé un jour avec l'un d'entre eux qui lui dévorait la lèvre pendant son sommeil. J'avais gardé de cette histoire le souvenir que leurs moustaches provoquaient un effet anesthésiant, ce qui leur permettait de se nourrir de nos chairs sans que cela ne nous réveille. L'ami en question avait d'ailleurs repris conscience en raison du poids sur sa poitrine qui gênait sa respiration, et non pas à cause de la douleur. Y repenser dans ce contexte me fit frissonner. Je décidai de fouiller rapidement la pièce. Il n'y avait pas beaucoup d'endroits où ils auraient pu se cacher, ce ne fut donc pas long. Le constat fut rassurant : aucun animal ne se trouvait avec nous.

— J'ai toujours eu la phobie des rats ! sanglota Léa.

— Moi aussi ! avoua Max, livide.

Je retournai vers ma belle afin de la réconforter.

— Maintenant qu'on a cette info, on va pouvoir s'en protéger, ne vous inquiétez pas !

J'espérais ne pas être en train de mentir, sans trop de conviction.

— Il faut qu'on réponde à ce type, peut-être qu'il peut nous aider ! dit Lola.

Elle avait raison. Je voulais en savoir plus à son sujet. Max tenta de se concentrer à nouveau. Les doigts suspendus au-dessus du clavier, il attendait notre dictée. Je pris l'initiative des suggestions.

— Commence par mettre qu'on est connectés, même si ça semble assez évident. Ensuite, demande-lui qui il est, où est-ce qu'il est et s'il peut nous aider.

Il ne se passa pas deux minutes entre l'envoi du message et la réception de la réponse. Mes yeux furent directement happés par les derniers mots de la phrase : « Oui, je peux vous faire sortir d'ici ! » J'étais sonné. Reprenant la lecture des informations depuis le début, j'avais du mal à me focaliser sur l'ensemble de sa réponse tant l'énoncé final me perturbait. Je lus tout de même : « Très bien ! Je m'appelle Franck Deckert, je me trouve au niveau 53. Oui, je peux vous faire sortir d'ici ! »

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