Chapitre III-17

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Un nouveau rugissement. Sensiblement le même, mais plus intense cette fois. Cela se rapprochait. L'angoisse s'était transformée en une peur panique. Nous craignions pour nos vies. Une montée d'adrénaline m'envahit. Agir, vite, il fallait agir ! La porte. La porte est ouverte ! La porte !

— Sylvain, la porte ! criai-je sans plus me soucier d'une discrétion devenue obsolète.

Il se jeta dessus et la ferma violemment. Dans un même temps, je pris une puissante impulsion, plaçai ma main sur le bureau et me projetai au-dessus de celui-ci. En un temps record, je me trouvai là, en renfort pour faire barrage avec mon ami. Les autres, statiques, semblaient paralysés, victimes d'une stupéfaction incapacitante.

J'attendais. L'étrange distorsion du temps, caractéristique de tels instants d'urgence absolue, s'imposait à moi. J'attendais. Dans une position que j'espérais solide, sans savoir la force que je devrais mobiliser pour nous protéger, j'attendais. Puis je ressentis la vibration terrible qui impacta la porte. Elle traversa tout mon corps, de mes mains jusqu'à mes pieds. Les muscles de mon dos étaient tendus comme jamais. Une nouvelle vocalise infernale retentit. Mon cerveau l'interpréta comme une seconde présence hostile, juste derrière l'obstacle qui nous séparait de cette menace monstrueuse. Nouvel impact. Plus fort encore. Un bruit m'informa que quelque chose venait de se briser au niveau de la poignée. Un choc de plus. Cette fois, la porte bougea réellement, s'entrebâillant de quelques centimètres. Je sentis un nouveau jet d'adrénaline me parcourir.

— Tom, Max ! L'armoire, prenez l'armoire, hurlai-je.

Je savais d'expérience que dans ces moments où le stress nous privait de notre potentiel d'action, les ordres pouvaient agir comme antidote. Ce fut le cas. J'entendis l'armoire tomber brutalement, puis la friction stridente du métal sur le sol. J'espérais que cela allait marcher. Il fallait que ça marche. Alors que mon regard était entièrement focalisé sur la porte, je perçus enfin cet énorme bloc de métal qui rentrait dans mon champ de vision. De l'autre côté, une rage terrible se déchaînait. Dans la pièce, les cris de panique des filles retentissaient. Mais le meuble finit par venir se placer contre la porte. Il ne nous offrit malheureusement pas la délivrance que j'espérais tant. Certes, il nous permettait à présent de pousser à quatre, afin de maintenir un barrage efficace. Pour autant, je compris tout de suite que sans nous, cela ne suffirait pas à empêcher la menace de rentrer. Ce ne serait donc qu'une question de temps. Bien sûr, il restait la seconde armoire, mais sans point d'appui l'idée me semblait vaine. Puis l'image de la deuxième porte s'imposa soudainement dans mon esprit. Elle fut tout de suite associée à une opportunité que je voulais saisir. La fuite. Encore fallait-il que l'on puisse l'ouvrir et qu'elle ne cache pas un nouveau danger. Si l'on se faisait prendre à revers, c'en était fini de nous.

— Max, on tient ! Va checker l'autre porte !

Il s'exécuta dans la seconde. Je priai pour ne pas recevoir une mauvaise nouvelle supplémentaire.

— Il y'a un autre couloir ! C'est dégagé !

— OK, il faut qu'on se casse tous d'ici.

Je regardai Sylvain et Tom, arc-boutés comme moi contre l'armoire. Ils acquiescèrent.

— Les filles vous êtes prêtes ? Il va falloir courir ! Surtout on reste groupés !

Je n'attendis pas une réponse qui de toute façon s'avérait inutile. Il fallait être prêt, question de survie.

— Maintenant !

On lâcha simultanément, opérant un demi-tour rapide. Sans réfléchir, j'attrapai la main de Léa et me mis à courir. Passée la porte, nous arrivions dans ce nouveau corridor, semblable au précédent. Une ambiance labyrinthique se dégageait de l'évidente similitude du décor, l'effet s'en trouvait renforcé par le faible éclairage d'urgence. Le côté gauche nous offrait plus de longueur, nous le choisîmes instinctivement. Nous détalions maintenant en ligne droite, fuyant à toute vitesse un agresseur dont nous ignorions tout, sauf l'infernale sauvagerie. Les faisceaux de nos lampes électriques balayaient par saccades les surfaces autour de nous. Je distinguais une double porte battante quelques mètres devant moi. Étant donné que nous ne savions pas où aller, cela semblait être un objectif comme un autre. Il faut bien dire que l'instinct nous poussait de toute façon à foncer tout droit, afin de distancer au plus vite le danger.

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