Chapitre 48 : Les regrets du passé

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Une fois rentrés, Steel et Mackenzie s'étaient partagés la récompense. Il avait laissé à la jeune fille les balles de revolver, qu'elle comptait garder jusqu'à obtenir l'arme tant convoitée. Le reste des vivres avaient été distribués équitablement.

Ils s'étaient donnés rendez-vous au salon pour parler, comme au bon vieux temps. Mackenzie était parti ranger ses affaires, quand elle avait croisé Joy dans un détour de couloir.

« Mackenzie ! » appela la petite.

La jeune femme se dirigea vers l'enfant, et une fois à sa hauteur, celle-ci commença :

« J'ai enfin pu terminer de lire mon tout premier livre !

‒ Super, je suis fière de toi, s'enthousiasma son interlocutrice.

‒ J'ai eu un peu de mal, mais Léana m'a aidé sur certains mots. Je vais continuer à m'exercer. Comme ça, je pourrais lire plus vite.

‒ Tu as raison, persévère et tu y arriveras sans aucun problèmes. »

La jeune femme lui donna un léger coup sur l'épaule, ce qui amusa Joy.

« Je te laisse, abrégea Mackenzie, on pourra en parler plus tard si tu veux.

‒ Pas de soucis ! »

Et l'enfant partit, toute guillerette.

Mackenzie déposa ses affaires dans sa chambre, qu'elle ferma à clé une fois sortit. Elle longea les grands couloirs et se rendit jusqu'au salon de détente où se trouvait déjà Steel.

« Beau travail soldat ! » s'amusa la demoiselle avant de s'asseoir à ses côtés, sur le grand canapé.

Le jeune homme lui sourit en retour, déposant ses pieds sur la table basse. Elle l'observa, assise en tailleur, tout en lui faisant face. Bien qu'il regardait devant lui, il n'avait pas manqué le regard insistant de sa camarade.

« Comment peux-tu contenir ton sang-froid aussi facilement ? s'interrogea la jeune femme. Aujourd'hui encore, tu as été impassible à tout ce qui s'est passé dans la grotte.

‒ C'est quelque chose qui s'apprend... Je suppose. »

Il tourna son regard vers cette dernière.

« Je ne serais jamais capable d'être comme toi, renchérit-elle. Il m'arrive de surmonter mes peurs parfois, mais elles finissent toujours par revenir.

‒ Avoir peur n'est pas un défaut.

‒ Peut-être, mais cela empêche souvent d'agir. »

Il laissa échapper un sourire.

« Regarde-toi, dit-il amusé. Malgré toutes tes craintes, tu as réussi à t'enfuir des souterrains, et en plus tu as sauvé deux jeunes filles. Sincèrement, tu n'as rien à envier à celui qui outre passe ses peurs, puisque toi, tu les affrontes. »

Elle détourna les yeux, à la fois gênée et flattée, ce qui le fit rire.

« Cela ne m'a pas toujours réussi, pourtant », susurra-t-elle.

Sa voix se fit plus inaudible, forçant Steel à se concentrer davantage et à reprendre son expression neutre.

« Juste avant d'intégrer l'escouade, marmonna-t-elle, j'ai vécu avec une famille de marginaux. Ils s'étaient terrés dans un abri de fortune. Le père, partait plusieurs jours à la recherche de nourriture, pendant que la mère, Marla, s'occupait de leur petite fille. Au départ, notre rencontre avait été houleuse. J'étais venue pour les piller. Je me souviens que Lilas pleurait dans les bras de sa mère alors que Robin, le père, tentait de négocier avec moi. J'étais complètement affolée. Je ne m'attendais pas à ce qu'il y ait du monde dans cette petite cache. Robin, avait finalement réussi à calmer tout le monde. Ils avaient fini par me proposer de rester manger avec eux. J'étais affamée, donc j'ai accepté sans tiquer. Ils auraient pu m'empoisonner ou me tuer dans mon sommeil, mais rien de tout ça. Au contraire, ils m'ont accueilli, partageant leurs vivres déjà bien maigres. Je passais mes journées à jouer avec Lilas, quand je ne partais pas avec Robin pour piller de vieilles ruines aux alentours. J'avais d'ailleurs trouvé une jolie poupée, que j'avais ramené pour la petite. »

Elle soupira s'allongeant sur la partie restante du canapé. Les yeux tournés vers le plafond, elle continua :

« Un jour, on a été attaqué. Robin se défendait comme il le pouvait et m'avait ordonné de fuir avec Lilas et sa mère. J'étais tétanisée, incapable de bouger. Marla a rapidement été tuée d'une balle dans la tête, puis ça a été au tour de Lilas. Robin me criait dessus, complètement hors de lui et impuissant. Ce jour là, je n'ai défendu personne, ni moi-même. Tout ce que je faisais c'était le regarder et pleurer comme une incapable. Je me suis évanouie peu de temps après qu'il se soit écroulé, sans manquer de m'asperger de son sang. C'est ce qui m'a sauvé, je présume... Ils ont pillé tout ce qu'ils avaient pu, laissant la poupée fissurée à mes côtés. »

Steel soupira, comme pour compatir à sa douleur.

« Nous devrions avoir l'habitude maintenant, dit-il. Ce sont des événements courants dans les terres sauvages. Pourtant, même en le sachant, les choses n'en sont pas plus tolérables. Tu n'as pas à te sentir coupable d'être en vie. Le destin t'a épargné, à toi de te servir au mieux du temps qui t'a été accordé.

‒ J'y pense encore tous les soirs. Quoi qu'il arrive, je me sentirais toujours coupable d'être entrée dans leur vie et d'en être ressortie de la sorte. »

Il lui prit les jambes et les posa sur ses cuisses, tentant de la consoler au mieux.

« Malgré les expériences, continua-t-il, nous ferons toujours des erreurs. »

Ils laissèrent le silence apaiser les soubresauts de la jeune femme. Elle se redressa, non sans soupirer une énième fois. Séchant ses larmes, elle vint se placer correctement sur le canapé, reposant ses pieds sur le sol.

« J'ai revu mon frère », annonça Steel.

Mackenzie écarquilla des yeux. Elle savait ce qu'avait traversé Steel par le passé. Notamment lorsque lui et son frère s'étaient retrouvés contre le monde entier. Tout deux clandestins, ils avaient quitté leur ville natale alors que Steel avait à peine dix ans et Owen douze. Une fois ses vingt ans, Steel tomba très malade, ce pourquoi son frère était parti à la recherche de médicaments dans un vieil hôpital désaffecté. Il ne revint jamais, et Steel dut trouver un moyen de s'en sortir seul, dans la tristesse et l'incompréhension la plus totale. Quoi de plus horrible que de ne pas savoir.

« Je faisais le tour du quartier abandonné, à quelques heures d'ici, reprit-il, et je l'ai vu. »

Il laissa échapper un rire étouffé.

« Il était avec un petit groupe de sales bandits. Ils avaient établi leur campement dans les ruines et avaient posé des pièges un peu partout. J'étais resté planter devant leur abri en métal, et c'est là qu'il m'a vu. Il m'a d'abord braqué, puis m'a emmené un peu plus loin. J'ai ensuite appris qu'il avait été kidnappé par ce groupe, avant de s'y être intégré. Il m'en voulait de ne pas l'avoir chercher plus que ça... Je lui ai proposé de venir avec moi et l'escouade, mais il a refusé. »

Il leva les yeux au ciel, puis continua :

« Il a une femme, et un petit garçon. Un petit neveux, que je ne connaîtrais sans doute jamais. Il m'a dit qu'il aimait cette vie, de torture et d'abomination. Ce n'était plus mon frère. Plus une seule once d'Owen ne se trouvait dans cet homme. Nous nous sommes quittés, sans que jamais il ne se soit retourné. »


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L'Or rouge [Terminé - En réécriture]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant