Chacun vit dans sa propre prison. Leur travail, leur famille, leur peur. Ils utilisent des prétextes pour échapper à la liberté. Car la liberté est terrifiante, son immensité, son absence de règles... La liberté n'est pas humaine. Les hommes se trouvent toujours des prisons dans lesquels s'enfermer. Ma prison, je ne peux pas en sortir. On peut quitter son travail, sa famille, combattre ses peurs. Mes jambes ne se répareront jamais. Il faudrait de l'argent pour ça, beaucoup d'argent. Trop d'argent. Mais ma prison roulante ne se contente pas de me priver de mes mouvements, elle me rappelle à chaque instant la perte de ma petite sœur..
Le matin est arrivé, une lumière douce traverse les fenêtres de ma chambre. Ma mère rentre dans ma chambre, un beau sourire sur les lèvres. Elle vient pour m'aider à me préparer. Je déteste ça. Je hais ne rien pouvoir faire seul. Je rentre au lycée et je dois avoir l'aide de ma mère pour m'habiller. Je me dégoûte. Ma mère me pose des questions, si j'ai bien dormi, si je suis prêt pour le lycée, si je suis pressé de revoir mes amis. Je lui répond par l'affirmative. Mais non, j'ai à peine dormi, je ne suis pas prêt à affronter la jungle, et, de toute façon je n'ai pas d'ami.Je pars tôt, le lycée n'est pas proche, mais je refuse de prendre les transports. Ironique, je ne peux me déplacer sans mes roues. Je me déplace sur les trottoirs, je profite du calme du début de la matinée. J'arrive à l'heure dans le bâtiment. Évidemment, une foule d'adolescents bruyants sont déjà là. Je sens leurs yeux se poser sur moi, je ne leur rend pas leur regard. Je ne regarde personne. Si un mouton veut survivre dans la jungle il ne doit provoquer personne. Je m'arrête dans un coin, les yeux rivés sur le sol, attendant la sonnerie divine qui me libèrerait de cet enfer. Mais elle ne sonne pas, et j'entends leurs éclats de rire, comme autant d'éclats de verre qui se plantent dans ma peau. Les moqueries. Cela faisait trop longtemps que je les supportais, mais chaque nouveau rire que j'entendais, chaque sourire que je devinais, était plus dur à supporter. On me pointe du doigt, comme une bête de foire. Certains rigolent, mais d'autres font pire encore. Ils me regardent avec pitié. Je ne veux pas qu'ils aient pitié de moi, je refuse leur compassion, je veux juste... qu'ils ne me regardent pas. Je voudrais être à leur place, et pouvoir avoir de la pitié. Pouvoir regarder les gens de hauts et ne pas avoir à lever la tête pour répondre. Je voudrais que personne ne me voit. Parce que j'ai honte.
Enfin la sonnerie retentit, je sais ce que je dois faire, prendre l'ascenseur jusqu'à l'étage de ma classe, aller au fond de la classe, demander à quelqu'un d'enlever une chaise, pour que je puisse m'installer . À côté de moi, un garçon avec des cheveux en bataille, souriant, ses yeux verts reflète mon visage, me faisant immédiatement baisser les yeux. Une petite cicatrice orne son poignet droit. Petit joueur. Il me sourit, il a pitié de moi. Il me salut, mais je détourne le regard. Je ne suis pas ici pour me faire des amis. Il n'a pas l'air de le prendre mal. Le professeur est debout devant le grand tableau vert, il a la cinquantaine, des cheveux grisonnants, des lunettes devant ces yeux noirs portant un regard inquisiteur sur la classe. Il sors de sa serviette une pile de feuilles et prend la parole « Bonjours à tous, je suis monsieur Guipon, votre professeur principal et d'histoire. Avant de vous parler de cette année, je vais faire l'appel »
Les noms défilent, mais je n'y porte aucune attention, j'écoute uniquement pour pouvoir répondre présent aux bon moment.
« Robin ?
- Présent.
- Héloïse ?
- Présente, monsieur.
- Ambre ? », je ne crois pas avoir autant sursauté depuis l'accident...Enfin, autant que j'en suis physiquement capable. Je regarde partout dans la classe pour savoir qui porte ce nom. Une fille au premier rang lève la main « présente. » mon cœur manque de s'arrêter quand je la vois. Cheveux blond clair, yeux bleus profonds, sourire, peau pâle, air déterminé, et cette assurance dans la voix...
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Ambre
Teen FictionLes histoires des lycéens sont souvent joyeuses et naïves. Mais pas celle de Mathieu. Après avoir traverser une expérience traumatisante, la vie lui semble hypocrite et cruel. Alors qu'il a arrêté d'essayer d'être heureux, il va rencontrer Ambre, un...