33. Papa, maman

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Maxime inspira un grand coup avant de frapper à la porte de la maison où il avait grandi. Il était extrêmement proche de ses parents, d'autant plus depuis que Judith s'était exilée de l'autre côté du globe. L'arrivée de Clémence dans leurs vies avait achevé de resserrer des liens familiaux qu'il pensait indéfectibles. Bien sûr il était conscient de leur en avoir fait voir de toutes les couleurs après le lycée. Sa mère n'avait jamais tout à fait digéré qu'il n'ait pas poursuivi ses études, et ils avaient souffert qu'il les tienne à l'écart alors qu'il était évident qu'il était au fond du gouffre. Ils avaient craint qu'il reste en Nouvelle-Zélande lui aussi, et c'est peut-être un peu pour eux qu'il était rentré. Sa sœur n'avait jamais accordé autant d'importance que lui à la famille et à sa ville natale. Alors il espérait ne pas les décevoir une nouvelle fois avec ce qu'il allait leur annoncer.
— Comment ça va, fils ? demanda Alex en l'accueillant.
Que Maxime soit seul pour leur rende visite était pour le moins inhabituel. Certes Ophélie brillait souvent par son absence – le boulot, toujours le boulot –, mais d'ordinaire Clémence n'était jamais loin de son père.
Alex avait allumé le barbecue dans le jardin et offrit une bière à son fils pendant que la viande cuisait. Chloé revint de la cuisine avec une salade de sa composition qu'elle déposa sur la table dressée au milieu de la pelouse. L'été, ils mangeaient tout le temps dehors. Maxime adorait particulièrement les longues soirées chaudes, quand le soleil se couchait petit à petit sur l'étang, et que la lune se reflétait sur l'eau. Des choses simples qui lui manquaient cruellement quand il était à Montpellier.
— Il faut que je vous parle de quelque chose, dit-il gravement alors qu'ils étaient réunis.
— On s'en doutait, commenta Chloé sans tenter de masquer son inquiétude.
Maxime soutint le regard de sa mère et se lança avant que le courage lui manque.
— C'est fini avec Ophélie.
— Oh, Max !
Chloé voulut étreindre son fils mais il la repoussa rapidement.
— Ne t'en fais pas, maman ! Ça fait longtemps que ça n'allait plus, c'est pour le mieux, vraiment.
Ils s'assirent à table et Alex leur apporta saucisses et merguez. Il semblait moins affecté que sa femme par l'annonce de leur fils, il savait que ça finirait par arriver.
— Mais... Clémence ? s'inquiéta Chloé.
Maxime la rassura d'un sourire, et lui expliqua l'arrangement trouvé. Chloé se détendit instantanément. Pour autant, il se dégonfla et ne leur dévoila pas la vraie raison de leur rupture. S'il leur parlait de Clémentine maintenant, Chloé tournerait de l'œil, c'est sûr. En revanche, il avait quelque chose à leur demander. Il tenta de maîtriser les tressautements de son genou sous la table qui trahissaient sa nervosité.
— Papa, commença-t-il, j'aimerais m'installer au mas quelques temps, si tu n'y vois pas d'inconvénient. Et aussi reprendre les livraisons. Je sais que tu as besoin d'aide, ça te permettrait de souffler un peu !
Alex et Chloé échangèrent un long regard que Maxime eut du mal à déchiffrer.
— J'ai beaucoup réfléchi, et j'envisage d'accepter la proposition de Brunet, dit Alex très sérieusement.
— Quoi ? Mais non ! Tu ne peux pas faire ça ! s'offusqua Maxime.
— Je ne peux pas continuer comme ça, Max. Je ne comprends pas son revirement, mais j'ai fait examiner l'offre par un avocat et tout est en règle.
— Mais si je t'aide ?
— Je ne pourrais pas te payer, et il faut que tu penses à Clémence.
Maxime secouait la tête. Il n'était pas prêt à renoncer, maintenant qu'il touchait du doigt son avenir. Pour la première fois depuis des mois il se projetait vers un lendemain qui l'enchantait.
— On trouvera une solution, j'en suis sûr. Je vais demander à Brunet de nous laisser un peu de temps, d'accord ? Si à la fin de l'année ça ne marche pas, alors tu accepteras sa proposition.
— Parce que tu crois qu'il t'écoutera ? renâcla Alex.
— Oui, fais-moi confiance.
Alex hésitait. Il jeta de nouveau un œil à sa femme qui secoua la tête imperceptiblement.
— Non... Je ne veux pas que tu subisses les mêmes galères que moi.
— Mais tu ne peux pas laisser tomber ! Et l'idée de faire de la vente directe au mas ? Ça marcherait, c'est sûr !
— Ça coûte de l'argent, Max, et les banques ne me suivent plus, l'affaire n'est vraiment pas en bonne santé, financièrement parlant !
— Et si on proposait à Brunet de nous prêter de l'argent, plutôt que de racheter le mas ?
La proposition stupéfia Alex.
— Tu es tombé sur la tête ou quoi ? Devenir son associé ? Quand bien même il accepterait, ce dont je doute fortement, il nous assommerait avec des intérêts astronomiques ou des conditions intenables pour qu'au final on lui cède tout de même l'exploitation, mais à un prix dérisoire.
— Ça on n'en sait rien, peut-être que c'est une alternative qui lui plairait !
Chloé, qui suivait l'échange avec intérêt, intervint. La proposition avancée par Maxime la surprenait tout autant qu'Alex.
— On dirait que Brunet est devenu ton meilleur ami tout à coup, alors que jusqu'à présent tu aurais refusé le moindre centime de sa part ! s'étonna-t-elle.
— C'est vrai, concéda Maxime. Ma relation avec lui a un peu évolué ces derniers temps... Enfin... En quelque sorte...
— Comment ça ? demanda Alex, curieux.
Maxime regarda son père, puis sa mère, les deux le fixaient avec attention. Il reposa sa fourchette, l'appétit le fuyant subitement. Un grand verre d'eau vint hydrater sa gorge devenue sèche.
— Il y a quelque chose d'autre dont j'aimerais vous parler, dit-il. Et ça risque de ne pas vous plaire.

Effet boomerang  (Demain nous appartient - Clemax - ROMAN)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant