Ce matin-là, Aéla était surexcitée. Aujourd'hui était son premier jour à Poudlard mais aussi celui où elle et ses camarades allaient suivre leurs premiers cours. Elle avait passé une nuit affreuse et avait tué le temps en faisant, défaisant et refaisant son sac toute la nuit. Ses livres étaient placés dans son sac par ordre de grandeur et sa plume était soigneusement posée dans son boîtier. La jeune fille avant si hâte de débuter son apprentissage de la sorcellerie qu'elle avait à peine avalé quelque chose au petit-déjeuner et avait filé vers la salle de Sortilège, qui était son premier cours de la journée. Elle fut la première à arriver dans la salle et elle prit place à une table du troisième rang avant de déposer ses affaires devant elle. Aéla avait pris la peine de lire la moitié du livre de sortilège avant le levé du soleil. Elle n'en avait pas retenue grand chose mais, déjà, cette matière la fascinait au plus haut point.
Alors qu'elle rêvassait aux merveilleux sorts qu'elle jetterait avec sa baguette, quelques élèves prirent place dans la salle alors que le professeur se postait derrière son bureau. Celui-ci offrit un sourire jovial à Aéla.
— Alors, jeune fille, on est pressée de découvrir le maniement délicat des sortilèges ?
Pour toute réponse Aéla hocha la tête pour affirmer quand Dumbledore passa la porte, suivit par quelques autres élèves.
— Professeur Hammond, puis-je vous parler un instant ?
— Bien sûr, Albus !
Dumbledore offrit un hochement de tête à Aéla avant de s'éclipser dans le couloir avec le professeur Hammond. La jeune fille n'avait aucun doute sur le sujet de leur conversation : il s'agissait d'elle. Quelques minutes plus tard, alors que tous les élèves de première année de Serpentard et Gryffondor étaient à leur place, Hammond réapparut avec une mine préoccupée. Cependant, il reprit vite contenance et s'installa sur son estrade pour surplomber la classe.
— Bonjour à tous, les enfants !
— Bonjour Professeur Hammond ! scandèrent-ils en chœur.
— Aujourd'hui nous allons apprendre les rudiments du maniement de la baguette, ainsi qu'un ou deux sortilèges de lévitation. Tout d'abord, vous allez prendre votre baguette, la faire tourner dans un mouvement circulaire en visant la statuette en bois qui est devant vous et prononcez distinctement « Levicorpus » !
Aéla saisit fermement sa baguette qui lui parut, pendant un bref instant, d'une taille anormalement grande comparée aux autres. Toutefois elle ne s'attarda pas sur ce détail esthétique et suivit les instructions du professeur Hammond à la lettre, sans succès.
A l'autre bout de la classe, des cris d'excitation retentirent. Une statuette lévitait dans les airs, ensorcelée par la baguette de Tom. Celui-ci affichait un sourire suffisant. Le jeune garçon ne comprenait pas pourquoi cela étonnait tant les autres qu'il puisse élever dans les airs une simple statuette en bois grâce à une baguette, alors qu'il avait réussi à faire léviter un lapin par sa seule volonté. Cependant, Tom accepta les félicitations de ses camarades, sentant son cœur se gonfler de fierté à chaque compliment. De son côté, Aéla ne comprenant pas pourquoi elle n'avait même pas réussie à faire frémir la statuette au contraire des autres, s'acharna sur sa baguette.
— Cela ne sert à rien, mon enfant, lui souffla le professeur Hammond qui l'avait discrètement rejointe. Il est improbable pour un élève de première année de lancer un sort sans le prononcer ! Aux vues de votre...« problème »...Il vous faudra des cours spéciaux.
Aéla regarda le professeur Hammond pendant un instant sans comprendre de quoi il voulait parler puis, soudain, la réalité la gifla brutalement au visage. Elle ne pouvait pas parler ! L'excitation de ce premier cours lui avait fait oublier sa différence. Elle baissa les yeux et posa sa baguette au coin de la table alors que le professeur Hammond posait une main compatissante sur son épaule.
— Le professeur Dumbledore m'a parlé d'une solution. Vous viendrez me voir à la fin de l'heure !
Puis il partit vers la table de Tom pour le féliciter et lui glisser un mot. Le jeune garçon tourna son regard vers Aéla quelques secondes avant de sèchement hocher la tête. A la droite de la petite fille qui se tassait une fois de plus sur sa chaise, deux de ses camarades chuchotaient entre elles. Il ne faisait aucun doute que le professeur Hammond n'avait pas parlé suffisamment bas pour que sa conversation avec Aéla ne parvienne pas aux oreilles de ces deux pipelettes.
— Je vois qu'il y a du potentiel dans cette salle mais ce serait bien de réussir à faire décoller ces statues de vos tables ! conseilla Hammond sur le ton de la plaisanterie. Réessayez et pour les plus maladroits d'entre vous, évitez de crever l'œil de votre voisin !
Alors que quelques rires s'élevaient dans la salle, les élèves firent de nouveau tournoyer leur baguette et quelques statuettes s'élevèrent dans les airs avant de retomber sur le crâne des enfants.
Aéla, de son côté, se contenta de regarder ses camarades apprendre leur premier tour de magie avec une fierté qu'elle ne ressentait pas. Son regard croisa brièvement celui de Tom qui préféra détourner les yeux vers son livre de sortilège comme s'il était embarrassé. Le cours dura toute la matinée et le professeur Hammond ne comptait plus le nombre de statuettes qu'il aurait à réparer tant ses nouveaux élèves étaient maladroits, à quelques rares exceptions. A l'heure du déjeuner, la salle de classe se vida en un instant, tous les élèves étant pressés de remplir leurs ventres affamés tandis que Tom et Aéla rejoignaient leur professeur à son bureau. Celui-ci affichait un air grave qui tranchait brutalement avec sa jovialité et sa bienveillance de tout à l'heure. Il invita les deux élèves à s'asseoir face à son bureau avant de s'éclaircir la gorge.
— Mh, comment dire ce que j'ai à vous dire ? demanda Hammond, visiblement mal à l'aise.
— On sait déjà pourquoi on est là ! trancha Tom.
— Bien. Le professeur Dumbledore m'a fait part de ton « problème », Aéla, et il m'a dit que tu t'étais proposé de l'aider, fit-il à l'intention de Tom.
— Je ne me suis pas proposé. J'ai dis que je l'aiderais si je devais le faire, nuance !
— Et bien, tu dois l'aider, Tom ! Il n'y a qu'un seul moyen pour un sorcier qui ne parle pas d'exercer la magie ! C'est de faire usage de sortilèges informulés. Cela prend énormément de temps pour arriver à les utiliser et plus encore pour les contrôler ! Il faudra que tu travailles énormément, Aéla.
Hammond posa un regard lourd sur la jeune fille qui hocha la tête, trop heureuse qu'on ne l'abandonne pas à son sort et qu'on lui donne une chance de devenir ce qu'elle a toujours été au plus profond de son âme : une sorcière. Hammond tira une enveloppe cachetée de son tiroir et la tendit à Aéla alors que Tom, piqué par la curiosité, y jeta un bref regard. Le cachet de la lettre induisait que celle-ci provenait du « Ministère de la Magie ». Aéla n'osait pas ouvrir l'enveloppe alors Hammond prit les devants.
— Le professeur Dumbledore a réussit à t'obtenir une dérogation spéciale du Ministère pour que tu puisses faire usage de la magie en-dehors de l'école. Bien sûr, ce privilège servira uniquement à perfectionner ton apprentissage des sorts informulés, n'est-ce pas ?
Aéla sourit à Hammond et hocha la tête. Dumbledore avait tout prévu ! Décidément, cet homme était plein de ressources.
— Et moi, que suis-je censé faire, concrètement ? demanda brusquement Tom. Comment l'aider à apprendre les sorts informulés ?
— Tu seras son partenaire d'entraînement car, à vrai dire, il n'y a qu'un seul véritable moyen d'apprendre à jeter un sort sans le prononcer ! C'est lorsqu'on fait face à un adversaire dans un duel. L'instinct prend le dessus et la magie qui coule en nous se matérialise par la force de l'esprit.
— Donc je devrais lui jeter des sorts et elle devra les éviter ?
— Oui... Du moins c'est la méthode la plus efficace mais si tu veux plus de précisions, voici un livre qui pourra peut être t'aider !
Hammond farfouilla dans ses tiroirs, renversant la moitié de leur contenu par terre et sortit un fin livre qu'il tendit à Tom. L'ouvrage, qui avait trop vécu pour être en bon état, s'intitulait « L'Art et la manière de jeter un sort par Mafalda Vane ». Tom feuilleta l'ouvrage et haussa un sourcil lorsque l'une des pages s'arrêta sur un sort de métamorphose.
— Vous voulez que je la transforme en chauve-souris ? demanda t-il, un brin perplexe.
— On va surtout se contenter d'en avoir l'intention ! Ton but, Aéla, c'est de contrer les sorts que Tom te lanceras et de répliquer mais si vous avez le moindre problème, vous pourrez toujours venir me voir !
— Encore heureux ! marmonna le petit garçon en refermant sèchement le bouquin. On peut y aller, maintenant ?
— Si vous n'avez plus de question, oui !
Tom toisa Aéla du regard. La jeune fille ne sut dire s'il essayait de savoir si elle avait une question à poser ou s'il l'exhortait à sortir de la salle de classe sans rien dire. Pour éviter de contrarier Tom, Aéla se leva de sa chaise et sortit de la salle de classe en compagnie du garçon qui marcha aussi vite qu'il le put, laissant presque Aéla derrière lui.
Ils rejoignirent la grande salle où leurs camarades avaient presque finis de déjeuner. Tom rejoint quelques garçons avec qui il avait discuté la veille tandis qu'Aéla, ne sachant pas si elle devait se mêler à ses camarades ou pas, s'asseya en bout de table comme la veille. Elle n'arrivait pas à savoir si elle était heureuse que Tom l'aide pour le cours de Sortilège ou si ça la peinait de voir que ça semblait déranger le garçon, qui devait estimer avoir mieux à faire. Ne préférant pas avoir de réponse, la jeune fille se concentra sur le pudding qui bullait dans son assiette. De son côté, Tom savourait avec délectation la salve de compliments que ses camarades de classe, ainsi que ceux d'années supérieures, lui servait pour sa brillante réussite au cours de Hammond. Rare était ceux qui parvenaient à faire décoller une statuette, une plume ou même un bout de papier lors du premier cours de Sortilège et lorsque c'était le cas, toute l'école en était émerveillée. Ce fut ainsi que dès le premier jour de la rentrée, le nom de Tom Jedusor était sur toutes les lèvres, des élèves de première année jusqu'à ceux qui quitteraient l'école lorsque celle-ci prendrait fin.
Aéla se trouva être la dernière à quitter la grande salle. Tous ses camarades, voulant profiter au maximum de leur après-midi de libre, avaient courus jusqu'au grand parc pour voir les plus grands participer aux sélections de Quidditch. Le Quidditch ! Elle avait tendue l'oreille pour entendre les explications de Jeddan Krane sur ce sport purement sorcier mais elle n'en avait rien compris, hormis que ça se passait sur un balais. Autant dire que ce qui faisait vibrer tous les élèves de l'école ne l'intéressait nullement. Aéla préféra de loin s'aventurer dans l'école pour trouver refuge dans la bibliothèque. Aussi loin qu'elle se souvenait, elle avait toujours aimé lire. Elle salua Miss Druaux, la bibliothécaire aux airs lunaires et s'installa près d'une fenêtre qui donnait sur le parc de l'école. Ne s'attardant pas sur le Saule qui tentait d'attraper le concierge de l'école par les pieds parce que ce dernier essayait de tailler ses branches, Aéla sortit de son sac le livre sur lequel elle était bloquée depuis des mois, la dernière relique de son passé, le seul lien qu'elle avait encore avec sa mère. Elle l'ouvrit à une page qu'elle tentait de déchiffrer depuis des jours mais tout ce qu'elle en avait compris pour l'instant, c'était qu'il s'agissait des propriétés du sang de chèvre.
— Par une si belle journée, il est rare de trouver un élève à l'intérieur de l'école !
Aéla referma brusquement son livre et releva la tête. Face à elle se dressait Dumbledore avec son éternel sourire chaleureux sur les lèvres. Le professeur de métamorphose vînt s'asseoir à côté d'Aéla en échappant un soupir de contentement.
— En acceptant un poste de professeur à Poudlard, je ne m'imaginais pas qu'il serait aussi dur de rester debout toute la journée ! C'est que je ne suis pas aussi jeune que j'en ai l'air ! échappa t-il dans un rire. As-tu eue ta dérogation du Ministère ?
La jeune fille hocha la tête à l'affirmative.
— N'aimerais-tu pas t'exprimer autrement que par des hochements de tête ?
Le regard d'Aéla s'assombrit mais, une fois de plus, sa tête se balança de haut en bas pour affirmer. Depuis que la parole lui faisait défaut, elle essayait de trouver un moyen de s'exprimer autrement mais sans succès. Dumbledore tira de sa cape un ouvrage et le plaça entre les mains d'Aéla. Sur la couverture en cuir, deux mains en reliefs dorés y étaient imprimées. Celles-ci semblaient faire un signe que la jeune fille ne sut déchiffrer.
— J'ai trouvé cela dans une boutique moldue après que je vous ai laissé à King's Cross, expliqua Dumbledore en feuilletant le livre que tenait Aéla. Il s'agit d'un système moldu qui permet aux gens comme toi, qui ne peuvent pas parler, de s'exprimer grâce à une langue traduite par les mains. Ils appellent ça la « langue des signes ».
Pour concrétiser son explication, Dumbledore forma des signes avec ses mains et sembla fier du résultat.
— Là, tu vois, je viens de te dire « bonjour, Aéla ! ». Alors, qu'en penses-tu ? Cela te plairais d'apprendre cette langue ?
Aéla feuilleta elle-même l'ouvrage et fut fascinée par les dessins et les traductions qui s'y trouvaient. Chaque symbole fait avec les mains ou les doigts avait une signification particulière et permettait d'exprimer tout un tas de sentiments et de pensées que la jeune fille avait renoncée, depuis trop longtemps, à transmettre. Elle referma le livre et le serra contre son cœur alors que des larmes de soulagement et de joie s'échappèrent de ses yeux. Elle aurait tant aimé remercier Dumbledore !
— Oh, ma chère enfant ! Pas besoin de mot avec moi. Un simple regard emplit de larmes sincères parvient à me convaincre de ta gratitude ! souffla Dumbledore dans un sourire. J'ai hâte que nous puissions avoir une véritable discussion ! Apprends bien cette nouvelle langue, Aéla, car cela pourrait être une porte ouverte vers un monde où tout serait possible pour toi.
La jeune fille ouvrit le livre, le feuilleta, étudia quelques signes pendant un bref instant et signa son premier mot en versant autant de larmes qu'elle le pouvait.
— J'apprendrais !
Dumbledore esquissa un sourire de fierté. Lui qui avait douté des capacités de la jeune fille à exercer la magie, se rendait à présent compte de la force d'esprit qu'Aéla possédait. Bien qu'il était conscient des obstacles incommensurables qui restaient à franchir pour Aéla, Dumbledore était certains que la jeune fille pouvait envisager un avenir plus radieux au sein de la communauté magique.
Le professeur de métamorphose se leva avec un air satisfait et, alors qu'Aéla lisait déjà l'ouvrage avec enthousiasme et concentration, le vieil homme se tourna vers elle avec un regard espiègle.
— Je ne suis pas réellement sûrs que les livres moldus soient admis à Poudlard, ni même dans le monde des sorciers, alors il serait préférable de ne le montrer à personne ! dit-il sur le ton de la confidence. Ce sera notre petit secret !
Aéla regarda le livre puis son professeur.
— D'accord.
— Je savais que je pouvais te faire confiance !Après lui avoir accordé un clin d'œil qui scella leur secret, Dumbledore s'éclipsa de la bibliothèque en passant devant une Miss Druaux en pleine sieste réparatrice.
De son côté, Aéla resta dans la bibliothèque de l'école jusqu'au moment du dîner. Elle lut et relut le livre en langue des signes pendant toute la journée, jusqu'à inscrire au plus profond de sa mémoire quelques mots qu'elle jugeait importants. Elle avait même apprit à signer « Sale limace ! ». Cependant, une fois l'euphorie de pouvoir communiquer redescendue, Aéla s'était rendue compte d'un détail qui avait peut être échappé à Dumbledore : avec qui pourrait-elle utiliser la langue des signes ? D'après ce qu'elle avait vu, seul Dumbledore savait l'utiliser et elle doutait qu'un de ses camarades connaisse cette langue. Toutefois, elle fit le choix de ne pas se laisser démoraliser par un tel détail, sachant que tôt ou tard quelqu'un d'autre qu'elle et Dumbledore parlerait cette langue moldue, et ce fut avec un sourire éblouissant qu'elle rejoignit la grande salle, surprenant sur son passage quelques autres élèves qui ne comprenaient pas pourquoi la jeune fille était si resplendissante de bonheur.
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Tale of Jedusor : les jeux du sort
Fanfiction« - Vous êtes faible ! Vous ne connaîtrez jamais l'amour. Je vous plains sincèrement ! Voldemort abaissa quelques instants sa baguette, un sourire grimaçant sur les lèvres. Qu'est-ce que ce sang-mêlé de Potter venait de lui dire ? Il eut terriblemen...