II.IX « Le maître des potions »

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Tom a pardonné à Aéla de l'avoir traité de lâche et plus encore d'avoir secouru un né-moldu. Si les deux enfants semblaient entretenir une entente cordiale, il fut un point sur lequel le garçon ne parvînt pas à faire l'impasse : l'excellence d'Aéla en cours de Potion. Ce petit détail, auquel tous les autres Serpentard n'accordaient que peu d'importance, avait le don de mettre Tom dans tous ses états. Plus d'une fois il avait espionné la jeune fille pendant le cours du professeur Slughorn afin de comprendre d'où lui venait cette aisance. Il ne l'avait pas lâché du regard et pourtant, aujourd'hui encore, il fut incapable d'expliquer pourquoi Aéla réussissait ses potions bien mieux qu'aucun autre de ses camarades, même Tom Jedusor. Le garçon aurait dû se résoudre à la voir réussir, à recueillir les lauriers de cette discipline qu'ils semblaient être les deux seuls à apprécier, à la voir faire jubiler le professeur Slughorn qui n'arrêtait plus de s'émerveiller devant les prouesses de la jeune fille, quand bien même il lui donnait une potion des plus compliquées à concocter. Pourtant dans le coin de la salle de cours où il avait prit place, il grinçait des dents, furieux de ne pas pouvoir faire mieux qu'Aéla alors qu'il s'escrimait pour être le meilleur dans toutes les disciplines. C'était un point d'honneur qu'il s'était fixé lorsque Dumbledore les avait sortis de l'orphelinat. Il s'était juré d'être le meilleur dans tout et de prouver qu'il était un grand sorcier malgré son engeance. Il s'était juré de devenir le plus pur des sorciers, non pas par le sang mais par un travail acharné. Pourquoi donc Aéla lui mettait des bâtons dans les roues ? Ne pouvait-elle pas faire comme dans les autres matières et n'être simplement qu'une élève moyenne ? Tom savait que la jeune fille ne savait rien de ses espérances et des buts qu'il s'était fixé, du moins elle n'en savait pas les détails. Elle ne faisait pas exprès de l'exaspérer et pourtant il ne pouvait s'empêcher de lui en vouloir. Il devait être le meilleur ! L'échec n'était pas une option.
Pourtant, la tête penchée au-dessus de son chaudron où bullait une mixture verdâtre, le garçon commença a douter de sa préparation. A quelques centimètres de lui, celle d'Aéla semblait en tout point similaire. Alors pourquoi ne réussissait-il jamais à surpasser la jeune fille ? Peut être parce qu'il suivait les instructions du professeur Slughorn et du manuel à la lettre, alors qu'Aéla se contentait d'ajouter les ingrédients d'un air distrait, sans même poser les yeux sur son livre de potion, comme si cela était d'une logique implacable. Comme si les potions n'avaient aucuns secrets pour elle. En voyant le professeur Slughorn arriver à leur table, Tom se renfrogna sachant déjà que les jubilations du directeur de Serpentard ne seraient pas grâce à lui. Slughorn inspecta méticuleusement chaque potion préparée par Darrick, Sibbie, Björn, Tom et Aéla. Si les trois premières s'avéraient être moyennes voir de piètre qualité, au point que Slughorn préféra vider les préparations dans les toilettes de la classe, les deux dernières lui collèrent un brillant sourire sur les lèvres.

Par Merlin ! souffla Slughorn en prenant une petite fiole des préparations de Tom et Aéla. Je crois que je n'ai jamais vu d'élèves aussi doués dans la préparation des potions, les enfants. Celles-ci sont parfaites ! Enfin presque. Une seule l'est comme j'en ai rarement vu !

Tom octroya un regard de biais à Aéla. Avait-il réussi à devenir le premier de la classe en Potion ? La jeune fille se contenta de regarder le professeur avec ce même sourire chaleureux qu'elle arborait en permanence depuis qu'ils s'étaient réconciliés. Tom se renfrogna de plus belle, un brin excédé qu'elle ne prenne pas ce cours au sérieux ni qu'elle s'inquiète de qui pourrait la surpasser. Aéla n'en avait rien à faire de la compétition à l'excellence qui régissait la maison Serpentard, et Tom ne parvenait pas à comprendre un tel détachement.

Miss Wayne, une fois de plus vos talents en Potion flirtent avec le génie ! s'extasia Slughorn. La dernière fois que j'ai vu une potion de Têtebouillon aussi irréprochable, c'était auprès du grand Maître des Potions d'Edimbourg, Doughal MacKelly !

Doughal MacKelly ! Voilà un compliment qui aurait pu faire hurler Tom de rage s'il n'était pas adressé à Aéla. Il connaissait ce grand Maître des Potions. Il avait lu des tas de choses sur MacKelly, comme le fait qu'il sauva toute l'Ecosse de la Peste noire ou bien du Choléra grâce à ses potions. Doughal pouvait même se vanter d'avoir créé pas moins d'une centaine de potions, qui sont couramment utilisées par les sorciers, et qui ont révolutionnées la médecine magique. Cet homme était un génie comme il n'en existait qu'un dans toute une génération.

Je pense que Serpentard mérite bien vingt points supplémentaire !
Wouah ! souffla Björn. Même Dumbledore n'en donne pas autant.

Slughorn ne releva pas et après avoir enfouit les fioles dans la poche de sa robe, il partit inspecter d'autres potions qui, sans étonnement, s'avérèrent bien piètre comparées à celle d'Aéla. Celle-ci n'avait pas perdu son sourire qui n'était ni plus radieux ni plus fier. N'était-elle pas contente d'un tel compliment ? Savait-elle au moins qui était MacKelly ?

Tu sais qui est Doughal MacKelly, au moins ? demanda Tom pour en être certains.
Pas vraiment. Pourquoi ?

Son esprit oscilla entre indignation et colère. Pourtant, il demeura impassible, incapable de dire ou faire quoi que ce soit. Aéla ne se fichait pas de lui, elle ne savait vraiment rien de Doughal MacKelly, hormis ce que Slughorn venait de lui dire. Alors Tom se mit à faire une chose qui d'ordinaire l'exécrait, il leva les yeux au ciel en soupirant. Comprendrait-il un jour la complexité de l'esprit d'Aéla ? Il n'était pas certains d'y parvenir, ni même de le vouloir.
Le reste du cours se passa sous les babillages du professeur Slughorn, qui ne semblait pas préoccupé par l'attention de ses élèves. A vrai dire, ce fut à peine s'il leva les yeux du sablier qui s'égrainait doucement devant lui. Ce ne fut que lorsque le dernier grain tomba qu'il décréta la fin du cours, au grand soulagement de la plupart des Serpentard.

Miss Wayne, pouvez-vous venir une minute je vous prie ?

Aéla resta interdite un instant, ne sachant plus si elle devait finir de ranger ses affaires ou tout laisser en plan sur la table. Face au regard insistant de Slughorn, elle choisit la deuxième option et s'approcha du bureau du professeur sous le regard pénétrant de Tom, dont la curiosité culminait à un point qui lui était jusqu'alors inconnu.
Alors que le reste de leurs camarades sortaient de la salle au plus vite, craignant que dans le cas contraire Slughorn ne les retînt plus longtemps, le garçon prit tout son temps pour ranger les trois livres de potions dans son sac. Il n'était pas du genre à espionner les autres, sauf si cela pouvait être dans son intérêt, mais il y avait quelque chose qui le dérangeait dans le fait qu'Aéla puisse se retrouver seule avec le professeur. Il ne parvînt à savoir pourquoi cela le dérangeait mais n'eut pas envie de chercher la réponse plus longtemps. Tom se fit aussi discret que possible, tellement qu'il en devînt invisible aux yeux de Slughorn qui ne se préoccupait plus que d'Aéla.

Je dois dire que vos prouesses en matière de Potion ne cessent de m'étonner, Miss Wayne, commença Slughorn d'une voix guillerette. Je pense que c'est sans surprise que je vous annonce être la meilleure de la classe, aussi, j'ai pris pour habitude de réunir un petit groupe d'élèves brillants de temps à autre. Histoire de discuter, de partager quelques dîners ou goûters. Accepteriez-vous d'en faire partie, Miss Wayne ?

Tom fut incapable de dire qui de lui ou d'Aéla fut le plus surprit. Tandis que la jeune fille observait le professeur sans réellement comprendre ce qu'il lui demandait, Tom fulminait. Depuis le jour où Horace Bullstrode lui avait parlé du club de Slughorn, il s'était mit en tête d'y accéder. Après tout, n'était-il pas l'élève le plus brillant de Poudlard malgré son jeune âge ? Il n'y avait aucune raison que Slughorn ne lui propose pas d'intégrer ce cercle d'élites et pourtant, jamais le professeur n'en fit mention devant lui. Tom retînt sa respiration, prêt à défendre son droit de faire partie du club de Slughorn si jamais Aéla prenait sa place. De son côté, la jeune fille n'avait toujours pas répondue. Si Slughorn avait oublié la présence de Tom, Aéla, elle, en fut bien consciente. Elle aurait juré ressentir sa colère vibrer dans l'air et lui asphyxier les poumons. Tom n'était pas content et elle n'avait pas besoin de lui accorder un regard pour le savoir. Le professeur attendait une réponse et Aéla s'obligea à faire un choix. Après tout, qu'était le club de Slughorn ? Rien d'autre qu'un regroupement d'élèves brillants. Elle prit son carnet et son stylo dans sa poche de robe et se mit griffonner.

« Merci pour cette proposition professeur mais je n'ai pas ma place parmi votre club. Je n'excelle qu'en Potion, alors que d'autres excellent dans toutes les matières. »
Oh, certes ! fit Slughorn, un brin déçu. Cependant, les seules matières qui m'intéressent sont les Potions.
« Je suis désolée. Pourquoi ne pas le proposer à Tom Jedusor ? Lui aussi excelle dans cette matière, en plus d'être brillant dans toutes les autres. »
Certes, certes...certes, souffla le professeur. Je... Je vais y réfléchir.

Un instant, le regard de Slughorn croisa Tom et il sursauta, se rendant compte que pendant tout ce temps le garçon était resté dans la salle à les écouter. Le professeur était mal à l'aise et il fut évident que cela était à cause de Tom. Il y avait quelque chose chez le garçon qui obligeait Slughorn à se méfier.
Alors qu'Aéla retournait à sa table pour ranger ses affaires, elle octroya au garçon un sourire resplendissant alors qu'il restait planté devant elle comme un piquet. Tom hallucinait-il où avait-elle refusé de peur de s'attirer ses foudres ?

Pourquoi avoir dit « non » ? signa t-il, ne voulant pas que Slughorn ne l'entende.
Parce que ça ne représente rien pour moi, fit t-elle en haussant les épaules. Je n'ai pas envie de faire partie du club parce que je n'y ai pas ma place contrairement à toi. Je sais que tu veux en faire partie.
C'est pas vrai ! se défendit Tom.

Elle posa sur lui un regard si insistant qu'il n'eut pas d'autre choix que de fuir par la porte pour ne pas avouer la vérité. Oui, il rêvait d'en faire partie car à Poudlard c'était la consécration. Quiconque faisait partie du club de Slughorn jouissait d'une renommée et d'un pouvoir qui durait des années et dépassait même les limites de l'école. Aéla n'était pas stupide au point de ne pas s'être rendue compte de ce désir chez le garçon, mais cela parût soudain si puéril à Tom qu'il préféra échapper au regard bleuté de la jeune fille. Pourquoi fallait-il toujours qu'elle sache tout de lui ? Du moins qu'elle sache des choses que personne n'était censé savoir ? Cela l'ennuyait, cela l'énervait, cela le terrifiait. Si Aéla connaissait certaines de ses faiblesses, d'autres pourraient-ils les connaître ? Rien que cette pensée lui fit froid dans le dos. Il avait essayé, tant et tant de fois de s'endurcir et de demeurer impassible face à la jeune fille, d'être aussi intouchable et impénétrable qu'avec les autres élèves. Parfois il arrivait à être le Tom Jedusor froid, égocentrique, brillant et dédaigneux que tout le monde connaissait avec elle ; mais ce Tom là finissait immanquablement par s'émousser au profit d'un autre Tom qui ne se montrait qu'aux yeux d'Aéla. Il n'aimait pas ce Tom là ! Ce Tom là ne devait pas exister ! Pas même pour faire plaisir à Aéla ! Alors qu'il rejoignait la salle de son prochain cours, le garçon se jura de tuer sa partie de lui qui était faible, sensible, sincère et apeurée. Il se jura, en somme, de tuer son vrai visage pour ne laisser place qu'à celui qu'il s'était construit lorsqu'il avait compris que sa vie à l'orphelinat serait un enfer sans fin. Seul ce Tom là devait vivre ! Seul l'arrogance et l'égoïsme, la froideur et la méchanceté, l'excellence et la pureté pouvaient lui assurer un avenir brillant. Il n'avait pas envie de retourner un jour à l'orphelinat ni même de vivre une vie misérable. Rien ne l'empêchera d'atteindre son but. Et alors qu'il passait la porte de la salle de classe, une pensée frappa son esprit si violemment qu'il faillit en perdre l'équilibre pendant l'ombre d'une seconde : « Aéla me laissera t-elle devenir le Tom que j'ai choisis d'être ? »


Une semaine était passée depuis leur dernier cours de Potion, et le moins que l'on pu dire fut que Tom n'avait pas cessé de cogiter. Même lorsqu'il était confortablement installé dans son lit, ses pensées tournaient dans une valse infernale à l'intérieur de son crâne, manquant de peu de le faire devenir fou. Qu'est-ce qui le tourmentait ainsi ? Tant de choses. Ses échecs en cours de Potion, l'esprit insondable d'Aéla, ses recherches infructueuses sur Grindelwald, l'excitation qui naissait en lui rien qu'à imaginer une salle secrète construite par Serpentard. Tout cela se mélangeait et le tourmentait. Pourtant, si son esprit était en ébullition, il n'en laissa rien paraître. Pas même lorsqu'un nouvel exploit macabre de Grindelwald vînt défrayer la chronique de la Gazette. Tom demeura impassible, forçant son cerveau à ce concentrer sur autre chose. Il avait fait cela toute la semaine. Lorsqu'une pensée prenait un peu trop de place dans sa cervelle, il fixait l'eau qui s'agitait dans son verre, se prenait d'intérêt pour les conversations de Darrick Selwyn ou se passionnait pour les reflets auburn dans les cheveux bruns d'Aéla. La jeune fille voyait bien l'éclat vide des yeux de Tom. Il suffisait qu'une molécule du corps du garçon change pour qu'elle le remarque aussitôt, et Tom le savait. Il ne pouvait rien lui cacher et ça le mettait autant dans une rage folle, que dans un désarroi complet. Pourquoi en était-il ainsi ? Pourquoi Aéla percevait son vrai visage alors que lui était incapable de percer les plus profonds secrets de la jeune fille ? C'était injuste et Tom détestait être victime d'une injustice ; aussi, il prit un malin plaisir à ignorer Aéla pendant plusieurs jours. Il ne la repoussa pas mais fit comme si elle n'existait pas, ce qui à son sens s'avérait bien plus cruel. Et ça le fut ! Très vite, il remarqua la lueur de tristesse, presque de détresse, dans les yeux d'Aéla. Il voulut changer d'avis, lui dire que tout ça était une blague de mauvais goût mais, non seulement il ne faisait jamais de blague, mais en plus cela l'aurait fait passer pour un idiot. Alors il continua malgré lui à l'ignorer, à être un Serpentard plus que parfait.
Il fallut attendre quelques jours pour que les événements prennent une nouvelle tournure. Plus exactement, il fallut attendre le prochain cours de Potion. Slughorn sembla avoir retrouvé sa joie naturelle et les élèves semblèrent avoir retrouvés leur ennui pour cette matière. A les voir ainsi avachis sur leur chaise, le regard vide, il serait presque impossible de croire que Serpentard était la meilleure maison de Poudlard dans cette matière, pour le plus grand bonheur de Horace Slughorn.

Aujourd'hui, vous allez apprendre à faire une potion d'Enflure, qui fait grossir quelqu'un ou une partie du corps lorsqu'on la boit. Pour cela, vous devrez suivre très attentivement chaque consigne de la page trente-quatre de votre manuel !

Un souffle de désespoir traversa la salle alors que certains élèves laissaient lourdement retomber leur tête sur leur table. L'excitation du professeur pour cette simple potion parut presque déplacée face à la morosité de ses élèves. Toutefois, chacun se mit au travail avec plus ou moins d'entrain.
Queue de rat, oeil de crapaud, venin de serpent du Cap, poils de tarentule, corne de bicorne, bave de mandragore et crocs de furie ; tous ces ingrédients paraissaient peu ragoûtants au premier abords. Certains étaient si visqueux ou si improbables qu'on osait à peine les toucher. Pourtant, ce fut sans l'ombre d'une hésitation qu'Aéla prépara sa potion, levant à peine les yeux de son chaudron, pas même pour regarder son manuel qui demeura fermé. Comment faisait-elle pour réussir ses préparations sans jeter un coup d'oeil aux recettes ? La jeune fille elle-même ne pouvait se l'expliquer. Il suffisait que Slughorn lui dise le nom d'une potion pour qu'aussitôt la recette, les ingrédients et le mode de préparation fusent dans sa tête. Alors, elle n'avait plus qu'à cesser de réfléchir et laisser son génie faire le travail. Un génie qui jusqu'ici lui avait rapporté les compliments du professeur mais aussi la jalousie de Tom.

Votre temps de préparation est terminé ! scanda Slughorn après deux heures. Éteignez le feu sous votre chaudron.

Les Serpentard s'exécutèrent non sans soupirer de soulagement. Certains étaient couvert de sueur, d'autres semblaient satisfaits d'eux-mêmes et d'autre encore ne rêvaient que de s'enfuir en courant. Comme à son habitude, Slughorn passa vérifier chaque potion, de chaque chaudron, de chaque élève, de chaque table. Il n'en oublia aucun, pas même ceux qui se terrèrent dans un coin de la salle dans l'espoir d'être oubliés du professeur. Enfin, il arriva à la table d'Aéla, Tom, Darrick, Sibbie et Björn.

Qu'est-ce donc que cela, mon garçon ? demanda Slughorn en touillant la mixture de Björn.
La potion que vous avez demandé, professeur.
Ah ! ...Et bien... C'est intéressant.

Il ne fallut pas un interprète à Björn pour qu'il comprenne son lamentable échec. Cependant, il fut reconnaissant au professeur Slughorn d'avoir assez de délicatesse pour ne pas le traiter d'idiot devant tous ses camarades. Et puis, d'ailleurs, il n'était pas le seul à avoir échoué. La potion de Sibbie ne s'avéra guerre plus réussie, tout comme celle de Darrick qui dégageait une odeur pestilentielle, bien loin du subtil parfum floral qui se dégageait des chaudrons de Tom et Aéla. Encore une fois, le garçon se retrouvait face à la jeune fille et il commençait à détester ces instants où le professeur Slughorn prenait tout son temps pour examiner leur chaudron.

Voilà qui est surprenant !

Slughorn tenait dans ses mains deux fioles contenant chacune la potion des enfants. Il les fit tournoyer dans tous les sens, les secoua comme on le fait d'un prunier, les ouvrit et les referma, les vida pour les remplir de nouveau mais rien n'y fit. Le résultat s'avéra être toujours le même et son front se barra d'une ride aussi perplexe que surprise.

Eh bien, Monsieur Jedusor, vous voilà à la tête de cette classe, souffla Slughorn comme s'il n'en revenait pas de ce qui sortait de sa bouche. Votre potion est parfaite !

Un instant, Tom demeura silencieux, attendant que le professeur explose de rire pour lui avoir fait une bonne blague. Mais non. Slughorn fut très sérieux et le garçon sentit son ego se décupler si vite qu'il faillit en faire un malaise. Il était le meilleur ! Après des semaines de bataille acharnée et de doute, voilà qu'il était le premier de la classe dans toutes les matières. S'il se l'était permis, il aurait explosé de joie en hurlant toute sa fierté aux oreilles de ses camarades, mais il préféra rester de marbre, fidèle à lui-même. Slughorn rangea les fioles dans sa robe et rejoignit son bureau en décrétant la fin du cours.

Pourquoi ? demanda brusquement Björn alors qu'ils rangeaient leurs affaires. Pourquoi c'est toi le meilleur alors que d'habitude c'est Aéla ?
Parce que j'ai toujours été le meilleur ! siffla Tom. L'excellence n'est pas une histoire de chance mais une question de travail. Mais je crois que ce terme t'est inconnu, Dunharrow !
Tu me prends pour un crétin, Jedusor ?
Mais tu es un crétin ! renchérit le garçon avec un sourire venimeux.

Björn voulut répliquer mais Sibbie ne lui en laissa pas le temps. Elle entraîna son cousin dans le couloir tout en prenant soin d'accorder un regard noir à Tom. Peu importait au garçon ! Sibbie avait autant d'importance pour lui qu'un cafard au fond des caves de l'orphelinat où il avait grandi. Il était le meilleur et elle ne pouvait le nier ! Il continua à ranger ses affaires jusqu'à ce qu'il ne reste plus que lui et Aéla dans la salle, Slughorn étant lui-même sortit.

Tu as fait exprès, n'est-ce pas ? demanda t-il d'une voix extraordinairement neutre.

Aéla fit comme si elle ne savait pas de quoi il voulait parler mais Tom n'était pas du genre à laisser tomber aussi facilement. Il avait rembarré Björn avec des arguments irréfutables mais il n'était pas dupe. Lui aussi avait trouvé l'échec d'Aéla étrange et pour cause ! Il avait vu la jeune fille volontairement oublier d'ajouter le venin de serpent du Cap dans sa préparation, alors qu'il s'agissait d'un ingrédient essentiel. Ce n'était pas un oublie, ni même une erreur ! Tom en était convaincu, Aéla lui avait cédé sa place de première de la classe de son propre gré. Pourtant, elle demeura silencieuse, se contentant d'hausser les épaules avant de rejoindre Björn et Sibbie qui l'attendaient dans le couloir.

Tale of Jedusor : les jeux du sortOù les histoires vivent. Découvrez maintenant