𝖻𝗋𝗎𝗆𝖾 𝖽'𝖾𝗌𝗉𝗈𝗂𝗋 ; 𝐭𝐨𝐦𝐞 𝐮𝐧

soixante-deux

jade ;

Il y a deux semaines jour pour jour, j'apprenais la mort de Maé, et depuis, je suis l'ombre de moi même.

Je tourne la tête et me force à sourire face à la vision de ma fille qui met sa veste devant la porte d'entrée. Ken est devant elle et l'aide dans sa démarche, pendant que moi je bois mon café au milieu du salon, assise sur le canapé.

- Tu vas dire au revoir à maman ?

Danaë sourit et s'approche de moi, je la prends alors dans mes bras et lui dépose un baiser sur sa joue.

- À ce soir mon cœur, sois sage

Elle sourit et s'éloigne, avant qu'ils quittent définitivement les lieux, tandis que je soupire et ferme les yeux en m'affalant sur le sofa.

La distance nous a rendu visite depuis mon retour ici. Le deuil est compliqué. Pour lui. Pour moi. Pour nous.

Et même si on est liés, la mort de notre enfant nous a affaibli.

Je n'ai plus d'appétit, chaque jour j'ai encore un peu moins d'entrain à me réveiller. Voulant à chaque fois dormir un peu plus pour retrouver Maé dans mes rêves.

Je glisse ma main sur le canapé pour chercher la télécommande et fronce les sourcils quand je reconnais le téléphone de Ken.

Je le prend en main et le dépose sur la table basse avant d'enfin retrouver la télécommande.

J'allume la télé et la regarde sans être pour autant concentrée sur ce qui est retranscrit sur cette dernière. Je fais juste passer le temps. Comme chaque matin. En zappant indéfiniment.

Quelques minutes plus tard, mes yeux sont attirés par le téléphone de Ken qui s'allume, et je fronce les sourcils en lisant le prénom qui s'affiche.

Je me redresse et pose mes coudes sur mes genoux en regardant l'écran, puis j'écarquille les yeux en voyant une réitération d'appel, de la même personne.

Ma gorge se noue et mes mains se mettent à trembler.

Je ferme les yeux et pour la première fois de ma vie je suis tenté de fouiller.

Finalement je cède à la tentation en mettant son téléphone en mode avion quand je vois qu'elle rappelle une troisième fois. Mon sang ne fait qu'un tour et je peine à rentrer son code pour pouvoir déverrouiller son téléphone.

Lorsque j'accède à la totalité des fonctionnalités, je plisse les yeux pour mieux apercevoir les applications avant de cliquer sur les conversations téléphoniques, et je constate qu'elle remplit son journal d'appel.

Je ris nerveusement et clique cette fois-ci sur les messages pour en avoir le cœur net.

Alice :
Bonjour, Danaë ne vient pas aujourd'hui ?

Alice :
Je viens d'apprendre la nouvelle Ken, je suis désolée pour toi. Je te présente mes sincères condoléances.

Je mords l'intérieur ma joue tandis que j'ai l'impression de manquer d'air.

Putain mais depuis quand elle l'appelle par son prénom... ?

Alice :
Ravie de t'avoir revu.

Alice :
Ça m'a fait plaisir de t'avoir vu sourire aujourd'hui. Ça va aller avec le temps. C'est de toutes façons le meilleur remède.

Alice :
N'oublies pas ma proposition si jamais tu as envie de te changer les idées... 🙂

Je lâche le téléphone qui tombe par terre dans un bruit sec et place mes mains sur le haut de mon crâne pour ramener mes cheveux en arrière. Mes yeux naviguent à travers la pièce en analysant tous les éléments qui sont à nous, j'ai l'impression d'avoir été salie, trompée.