ving-huit

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jade ;

C'est officiel, mon divorce est prononcé, j'ai récupéré mon nom de jeune fille, et j'ai fêté ça avec Naïs, car mon nom marital était la seule chose qui me liait encore à mon passé.

En ce moment mon quotidien est léger, et je passe pratiquement tout mon temps libre avec Ken, jusqu'à parfois aller au boulot sous nuit blanche.

Notre relation est spéciale, pas trop définissable, mais pour l'instant, je refuse de me poser trop de questions.

Néanmoins quand j'arrive au travail, j'ai la surprise de trouver un petit colis sur mon bureau, tandis que ma collègue arrive quelques secondes après moi, et s'arrête ;

- Un colis ? Vingt ans de boîte et j'ai jamais vu ça...

Je ris en me demandant de quoi il peut s'agir, car mon métier ne nécessite pas de contact direct avec les clients et encore moins avec nos partenaires, je ne peux donc rien recevoir de leur part.

Mais en le détaillant je prends connaissance du nom de l'expéditeur, et je comprends donc que ça n'a rien de professionnel, alors j'annonce à ma collègue que c'est un colis que ma famille m'a envoyé ici pour être sûr que je le réceptionne, et ne voulant pas qu'elle regarde le contenu avec moi, je prends l'objet en question puis m'enferme dans une salle de réunion inoccupée.

Installée sur une chaise, je soupire et ouvre le carton où je trouve en premier lieu une lettre.

« Jade,

Tu trouveras dans ce colis mon livre, ainsi qu'un ticket de cinéma pour une séance unique pour sa sortie qui aura lieu le 16 mai. »

Je souris face à son écriture et ses mots, puis je saisis le livre, mais en le prenant je remarque qu'il y a encore un petit mot.

« Quoi ? Tu croyais que j'allais pas te faire payer ton coup de pression ? rejoins moi ce soir, où tu sais, à l'heure habituelle »

Je reste figée, ne m'attendant pas du tout à ça, et sincèrement, en ayant eu aucune nouvelle de sa part depuis le mois dernier après ma visite express à son domicile, je pensais qu'il avait mal pris ma démarche, et j'avais même en tête l'idée d'aller le voir en fin de semaine pour m'excuser.

Mais le bouquin désormais en main, je me dis que finalement, j'ai peut-être bien fait.

Je prends le temps de le feuilleter superficiellement, j'ai hâte de le lire, et savoir qu'il faut attendre encore quelques heures pour ça me fait souffler. Alors je le range, me mets au travail, pour enfin courir jusqu'à chez moi lorsque ma journée se termine.

Naïs n'est pas encore rentrée, je me permets donc de mettre un fond de musique, puis j'ouvre délicatement son œuvre, à la première page.

« À ma plus grande source d'inspiration, à mon soleil, qui avait oublié comment briller »

Je me racle doucement la gorge, l'heure tourne pendant que je me plonge dans l'histoire.
Mon amie apparaît, je m'arrête donc lui fais part de la nouvelle du jour, et je crois qu'elle est aussi choquée que moi, mais je n'ai pas le temps de trop m'étaler sur le sujet car il faut que je me prépare pour rejoindre Ken.

Je marche tellement vite qu'à peine arrivé sur le lieu du rendez-vous, je suis essoufflée. Et en avançant un peu plus, je l'aperçois, seul, toujours accoudé au garde corps, face à la Seine.

J'essaie de rester silencieuse, et quand je me retrouve assez proche de lui je murmure à son oreille :

- J'écrivais des tonnes de mots qui fusaient dans ma tête depuis que j'avais croisé ses yeux tristes mais qui en disaient longs. D'où sortait-elle ? Elle était douce, mais qu'est-ce qu'elle était cruelle

Il se tourne vers moi, avec un sourire dessiné sur lèvres, puis il prend le relais :

- Elle voulait qu'on reste amis, mais je préfère encore être son ennemi. En étant simplement ami, où j'allais donc placer ma rage ? La rage de ne jamais l'avoir pour moi

J'ai du mal à garder mon sérieux face à lui, qui semble fier que j'ai pu deja lire quelques passages.

Je m'avance et le prends dans mes bras, heureuse de le retrouver.

- T'es trop fort...

Il me serre fort contre lui, puis on se lâche, à contre cœur.

- C'est quoi alors ta vengeance ?

- C'était pour t'faire venir, j'savais que t'allais être curieuse

- Et tu pensais que sans ça, je serais pas venue ?

Il baisse la tête et semble chercher une réponse, et c'est lorsque je vois sa réaction que je comprends que c'est à cause des miennes.

J'ai voulu mettre des barrières, une certaine sécurité entre lui et moi, tout ça car j'ai trop peur de faire les mêmes erreurs qu'avant, peur de lui faire du mal, pour m'en faire aussi par la suite, peur de le perdre à nouveau. Alors je glisse ma main sur sa joue, qui continue finalement sa route jusqu'à se perdre dans ses cheveux.

- J'serais venue, ici où ailleurs, à n'importe quelle heure, pour n'importe quelles raisons...

Il relève la tête pour soutenir mon regard.

- Même si t'avais pas eu de date pour ton livre

- T'aurais été reloue si j't'avais pas donné de date

Je souris.

- Ouais, mais t'aimes bien aussi quand j'fais ma reloue

Ma main est toujours dans ses cheveux, et naturellement la suivante part à sa rencontre.
On a jamais été aussi proche depuis que je suis revenue, j'ai jamais été aussi entreprenante. Ken parait ne pas comprendre ce qu'il se passe, mais pose finalement ses mains sur mes hanches, timidement.

- J'te remercie Ken, tu sais pas à quel point j'suis touchée, j'm'attendais pas à c'que j'sois privilégiée

Il m'adresse un sourire qui me fait fondre, puisqu'il reflète sa sincérité et sa modestie, puis après quelques minutes de silence durant lesquelles il me scrute, il souffle :

- J'ai envie d'faire un truc Jade... mais si j'me mange un vent, j'fais quoi...?

Ses mains sont toujours sur mes hanches, mais elles vont tout doucement jusqu'en haut de mon dos, d'une lenteur et d'un douceur dont je n'ai jamais eu connaissance.
L'ambiance est toute autre, j'en oublie même que nous sommes sur un lieu public, tandis que je sens ses mains fraîches, qui continuent leur chemin, pour atterrir sur chacune de mes joues.

- Fais le, embrasse moi

Ken me regarde pendant quelques secondes, il semble encore être sur la réserve, alors c'est moi qui cède la première, en comblant le vide qui nous sépare.
En écrasant mes lèvres sur les siennes, tout en soupirant.

𝖻𝗋𝗎𝗆𝖾 𝖽'𝖾𝗌𝗉𝗈𝗂𝗋 ; 𝐭𝐨𝐦𝐞 𝐮𝐧 Où les histoires vivent. Découvrez maintenant