soixante-sept

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ken ;

Il est six heures du matin.

J'ai faim, froid, et peur.

La lumière que je peux percevoir de la fenêtre située à côté de la porte d'entrée me rassure, car elle m'indique que je ne vais pas réveiller toute la maison en arrivant.

Et quand la porte s'ouvre sur la mère de Jade et que je la vois me sourire, je reprends le cours de ma respiration en lui offrant le mien en retour.

- Ken... enfin tu es là

J'avance et on se salue avant qu'elle m'incite à entrer dans la maison d'enfance de ma femme, puis je souris face à la vision des photos de familles accrochées sur pratiquement chaque mur, de chaque pièce.

Après une brève discussion avec ma belle-mère, qui m'annonce être relativement inquiète pour sa fille, je me redresse et lui fausse compagnie pour rejoindre la chambre de Jade qui est encore plongée dans le noir, et qui est celle qu'elle occupait quand elle était encore une enfant, une adolescente, une jeune femme.

Alors qu'aujourd'hui elle dort à l'intérieur, plus femme que jamais et desormais mère.

Une fois à l'intérieur de la pièce, je referme la porte et retire mon pull puis me mets à l'aise avant de m'assoir à ses côtés.
Mes yeux s'habituent doucement à l'obscurité alors que mes doigts glissent sur ses bras nus coincés sous l'oreiller.

Pendant un certain temps, je me contente de l'observer en touchant sa peau, mais je m'arrête quand je l'entends gémir, signe qu'elle est en train de se réveiller.

Elle se redresse quelques secondes plus tard et plisse les yeux pour mieux m'apercevoir.

- Ken...?

Je souris face à sa mine enfantine pendant qu'elle, s'aide de ses bras pour se relever un peu plus et être presque face à moi, mais en restant toujours allongée sur le ventre.

- Qu'est-ce que tu fais là...?

- J'suis venu te retrouver

Elle me regarde et ne me réponds pas.

- Tu me manques... vous me manquez

Je n'ai que le silence en retour.

- S'il te plaît dis moi que tu ne me quitteras pas

Jade cligne des yeux plusieurs fois et je retrouve un brin d'espoir quand je vois ses yeux se poser sur mes lèvres avant de retrouver mes pupilles, puis je poursuis :

- Moi j'ai l'impression de mourir un peu plus chaque jours depuis que t'es plus là...

Le silence alimente mon anxiété alors que le visage de Jade se tord légèrement avant qu'elle murmure :

- Tu peux me prendre dans tes bras...?

Je n'attend pas une seconde de plus et m'approche pour la serrer contre moi, ses mains retrouvent mes cheveux et j'ai encore envie de pleurer quand je sens que ses doigts tirent dessus tout en sentant son souffle contre ma peau.

- Putain mais si tu savais comme je t'aime...

Sa tête bouge légèrement et mes yeux se ferment quand ses lèvres déposent un baiser au creux de mon cou.

- Je suis désolé pour tout. Pour tout ce qu'il nous arrive, pour ce malentendu, mais crois moi, il n'y a jamais eu personne d'autre que toi

Je dessere mon emprise pour prendre son visage en coupe et la détailler.

- J'ai envie de t'embrasser

Le silence s'installe à nouveau jusqu'à ce que Jade se mette à sourire et à fermer les yeux.

- J'suis conscient qu'il faut qu'on parle, et je te fais la promesse qu'on le fera quand tu veux. Mais Jade moi aussi j'ai besoin de toi, moi aussi j'ai mal, et je veux être là pour toi, ne gère pas ça toute seule. Même si tu es forte crois moi, ça laissera plus de traces qu'autres choses... et on risque de mettre en péril tout ce qu'on a construit...

Elle a toujours les yeux fermés, mais elle mord sa lèvre avant de prendre ma main et de la poser sur son ventre.

- Ken, tu sais que la première fois qu'on s'est parlé, des millions de papillons ont envahi mon estomac ?

Je souris pendant qu'elle se confie à nouveau :

- Ils sont jamais parti...

Ma main, posée sur son ventre, glisse jusqu'à son dos pour la rapprocher de moi un peu plus, et lorsque son nez frôle le mien, je souffle :

- T'es trop mignonne

Elle ouvre les yeux.

- T'es la plus belle des femmes au monde. Même triste, t'es belle, mais alors quand tu souris... c'est vraiment quelque chose...

Un voil sombre teinte les iris de Jade qui penche sa tête sur le côté avant de me faire basculer sur le matelas.
Mon cœur rate un battement quand elle s'allonge à mes côtés en se disposant légèrement sur moi.

Sa jambe trouve refuge sur ma cuisse, tandis que sa main glisse sur la peau de mon ventre qui se contracte tellement j'suis heureux.

- Embrasse-moi

Je souris et lentement, je pose ma main sur sa joue pour enfin l'embrasser.
Par ce baiser, je lui transmets toute la tendresse et l'admiration que j'ai pour elle.
Je ramène ses cheveux en arrière, carresse ses bras, ses joues, son cou, son dos.
Jusqu'à en perdre le souffle.

Jade se détache par la suite et pose son front contre le mien avant de fermer une nouvelle fois les yeux.

Puis elle se retourne pour être dos à moi, mais prends ma main pour la poser sur son ventre.
Alors je m'allonge sur le côté et souris niaisement quand je sens la fatigue prendre possession de mon corps jusqu'à l'endormissement.

Et quand quelques heures plus tard je sens de l'agitation dans le lit et que je vois qu'il s'agit que de ma fille qui retrouve les bras de Jade qui est désormais face à moi, encore endormie, je ne peux m'empêcher de sourire.

Car c'est la meilleure vision du monde.

Danaë me regarde longuement quand elle remarque que je suis réveillé avant de me tendre sa main.

- Coucou mon amour

Elle sourit et on ferme les yeux en même temps, profitant de ce moment pour récupérer notre sommeil, qu'on a pendant trop de temps négligé.

𝖻𝗋𝗎𝗆𝖾 𝖽'𝖾𝗌𝗉𝗈𝗂𝗋 ; 𝐭𝐨𝐦𝐞 𝐮𝐧 Où les histoires vivent. Découvrez maintenant