Chapitre 26

94 24 9
                                    

Les Bannis arrivèrent au crépuscule. Stagbury avait été vidée de tous ses habitants et de la majeure partie de ses possessions. Aryeh se tint prêt, debout entre Quest Bellhouse et les jumeaux Luoma, l'épée à la main. Personne ne posait de questions sur l'absence de Lixian. Quest avait dû expliquer son cas aux Sereins qui l'avaient accepté sans sourciller. À défaut de pouvoir se battre, Lixian avait mis la main à la pâte en escortant les fugitifs.

Aryeh continuait de le surveiller du coin de l'œil, vérifiant que la tache blanche continuait de se mouvoir du haut de son cheval. Il n'était pas peu fier de la facilité avec laquelle Lixian maniait Shy, désormais. Il allait pouvoir passer à un meilleur cheval en rentrant à Rothena.

S'ils parvenaient à rentrer tous les deux à Rothena.

Lixian avait toutes les chances de s'en sortir mais Aryeh ne pariait pas sur ses propres chances. Il était prêt à sonner la retraite dès qu'il sentirait que le danger devenait trop grand mais le risque demeurait qu'ils se retrouvent encerclés et décimés.

Sa poitrine se crispa à l'idée de tout ce qu'il n'avait pas pu dire ni faire. Il était trop tard maintenant. Les Bannis arrivaient et il se tenait prêt à les accueillir avec les autres. Malgré tout, ses mains demeuraient crispées sur les rênes et il ne cessait de tourner la tête vers les murailles de bois de Stagbury.

Aryeh n'avait pas voté pour le plan de la confrontation directe. Il aurait préféré une stratégie plus fourbe. Il favorisait l'idée de prendre l'ennemi par surprise. Ils avaient peu d'options dans la présente situation mais, à ses yeux, ils auraient parfaitement pu les prendre à revers et avoir plus de chances de sauver Stagbury.

Sauf que ça signifiait de les laisser entrer dans la ville et que, frileux face à ça, les autres avaient refusé. Ils avaient oublié de prendre en compte le fait que Stagbury était déjà perdue et que cette technique aurait permis d'éliminer bien plus de leurs ennemis que ce qu'ils allaient faire en les affrontant en face à face.

Le capitaine lui rappela une tradition rothenienne qu'il avait oubliée, trop pris par ses réflexions et ses inquiétudes. Avant de partir en bataille, le chef était supposé entonner une chanson de guerre. Quand bien même Aryeh n'avait-il encore jamais eu l'occasion de la chanter, il la connaissait par cœur. Tout le monde à Rothena l'apprenait dès l'enfance. C'était un passage obligé. Même perché en haut de la montagne, ils vivaient dans l'attente de la guerre. Elle courait dans leurs veines.

Aryeh leva le poing, obtenant le silence complet de ses troupes. Il inspira profondément et se lança.

Brave Rothena !

Forte Rothena !

Galopons à travers champs

Chassons-les de nos vallées

Hardie Rothena !

Libre Rothena !

La guerre dans le sang

L'épée vers la canopée

Nous vaincrons !

Nous vaincrons !

Nous vaincrons !

Nous vaincrons !

La première flèche siffla au-dessus de leurs têtes et vint mettre le feu à un arc-de-cercle d'huile séparant les deux armées. Un rire résonna de l'autre côté du mur de feu.

- Vous savez que ce n'est pas ça qui va nous empêcher de prendre cette ville, n'est-ce pas ?

La voix fit frissonner Aryeh. Comment était-il possible d'insuffler autant de haine, de moquerie et de violence dans une phrase presque banale ?

When Settles the DustOù les histoires vivent. Découvrez maintenant