Chapitre 43

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Dès qu'il fut certain que la voie était libre, il se glissa hors de sa cachette et se faufila entre les maisons jusqu'à rejoindre le château. Éviter la bataille ne fut pas aussi compliqué qu'il l'aurait cru. Il n'eut que très peu de mal à esquiver les retardataires qui allaient se joindre au combat, leurs capes rouges comme une balafre sanglante derrière eux.

Aryeh parvint au pied de mur qu'il devait escalader. Il essuya ses mains moites sur son pantalon et se mit à grimper. Les prises lui étaient familières bien que humides et glissantes. Il prit son temps, se hissant mètre après mètre, voyant son trajet se réduire à chaque avancée. Savoir l'importance de son infiltration dans le château le rendait plus nerveux et moins assuré que d'habitude. Il se hâta en voyant la fenêtre à portée de bras.

Comme il l'avait prévu, la fenêtre était toujours ouverte. Les femmes de chambre l'avait repoussée et bloquée avec une petite cale pour qu'elle ne s'ouvre pas avec le vent. Agenouillé sur le rebord de la fenêtre, il eut juste à pousser assez fort pour que la cale saute et qu'il déboule à l'intérieur, tête première.

Sonné, il lui fallut quelques secondes pour recouvrer ses esprits. Il reconnut sa chambre, avec ses murs vert sombre qui rehaussaient la pierre brute de la structure, ses meubles en bois sombre, son lit couvert d'épaisses couvertures molletonnées et de peau de mouton. La pièce avait toujours ce parfum frais de sapin et de pluie. Il avait l'impression d'avoir passé des années loin de chez lui et se sentit revigoré. C'était sa maison. Sa place. Et celle de personne d'autre.

Les couloirs étaient vides, rendus lugubres par l'absence de lumière. Il n'y avait plus personne pour entretenir les torches et celles-ci s'étaient entièrement consumées. C'était un miracle que rien n'ait pris feu.

Aryeh se doutait que Nayan était caché quelque part où il pouvait assister à la bataille depuis une fenêtre. Probablement un endroit confortable. Un endroit rassurant pour lui qui se retrouvait seul maintenant que le corps de son père gisait sur les marches du château.

Comme il s'y était attendu, il le trouva dans l'aile ouest du château, assis sur le rebord d'une fenêtre, le nez collé à une vitre. Son épée pendait contre sa hanche.

Sans savoir pourquoi, Aryeh s'était attendu à le voir différemment. À ce qu'il ait changé. Pourtant, ce fut la même personne qu'il trouva face à lui. La longue queue de cheval noire stricte qui tranchait sur sa peau blafarde, ses yeux gris si rares, la largeur de ses épaules et l'épaisseur de ses membres... Nayan était toujours le même physiquement. Il avait l'apparence des Perbright là où Aryeh tenait plus des Reseigh, la famille de sa mère. Tout semblait identique et pourtant, rien n'aurait pu être plus différent.

- Comment... ? commença Nayan, surpris.

Il se rasséréna rapidement et se redressa, la main sur le pommeau de son épée.

- Peu importe. Tu as perdu la bataille, Aryeh. La confrérie est à moi, maintenant.

- Je crois que tu n'as pas bien compris qu'un bout de papier ne suffirait jamais à t'allouer la loyauté de la confrérie. Et jamais tu ne sauras manipuler l'esprit de toute la confrérie. Et aucune famille ne te suivra. Si c'était le cas, ils ne m'auraient pas fait appeler en catastrophe pour se débarrasser de toi.

Le visage fier et froid de Nayan se ferma et se tendit. La pique avait atteint sa cible. Aussi Aryeh fut-il étonné de voir un rictus narquois se former sur les lèvres de son cousin.

- Tu ne m'apprends rien. Pourquoi crois-tu que j'aie organisé tout cela ?

Aryeh demeura silencieux, incertain. Il ne laissa rien voir de son incompréhension. Que voulait dire Nayan ? Qu'il avait manigancé l'invasion des Loups de Sang ? Qu'il avait orchestré la mort de son propre père ?

When Settles the DustOù les histoires vivent. Découvrez maintenant