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Tapis dans la forêt, nous attendions.

Aucun son ne traversait nos rangs. Ni les piaillements des oiseaux ni les craquements de brindilles ou les froissements de feuille morte de ce début de printemps. Seul un silence craintif maître, allant jusqu'à atteindre ceux postés à la cime des arbres, arcs dressés.

Une peur qui tendait chaque muscle nécessaire à une riposte.

Une tension qui appelait à une attention particulièrement pointue.

Nous y étions finalement arrivés.

Trois ans.

Trois ans de respect et de convivialité.

Trois ans déjà que nous nous consacrions corps et âme à l'armée des lions, celle pour qui nous avions tous juré fidélité il y si longtemps.

Trois de promesses et de soutien envers Hémon, notre roi.

Trois années entières qui prenaient fin aujourd'hui, face à cet avant-poste de l'armée des loups. Le dernier que nous nous étions mis en tête de liquider.

Deux cents soldats contre six cents des nôtres. La première centaine postée dans la cour carrée d'une trentaine de mètres de côté, la seconde enfuie dans la tour arrière d'une bonne dizaine de hauteurs.

Et quelques âmes errantes à l'intérieur de la muraille les reliant.

Si l'ennemi n'avait pas posté l'entièreté de ses troupes dans cette forteresse, c'est bien parce que nous porter trop d'attention mettait en danger le cœur de son pouvoir. Concentrer ses troupes sur une si innocente armée qu'était la nôtre rendait vulnérable sa royale demeure au centre du royaume.

Innocente n'était pourtant pas le bon terme. Le frère de notre roi l'avait compris quand nous avions liquidé les cinq autres bâtisses dispersées autour de ses terres.

Ma main était ouverte au-dessus de ma tête avec patience. Cachée derrière un grand pin, j'observais. Chaque mouvement, chaque prise de parole. L'ennemi ne nous avait pas encore remarqués, je m'en étais assurée.

Faisant partie des généraux de cette armée, j'avais pris la tête de cette bataille au côté d'Athéna, ma plus grande amie encore présente dans ce monde.

Tout comme moi, elle observait. Chaque respiration, chaque clignement des yeux.

Tout comme moi, rien ne lui échappait.

Je lui jetai un rapide coup d'œil à la recherche de son avis sur la situation. Nos yeux se croisèrent un court instant ; furtif, en accord.

Je baissai mon bras avec vivacité.

Un appel, un ordre.

Les flèches fusèrent.

Sifflements perçant le vent à une allure diabolique, faisant pointer l'éclat de leur pointe de métal sous le soleil de cet après-midi.

La large porte ouverte face à nous, le plan était simple. Immerger l'adversaire d'une peur nouvelle en réduisant leur nombre de moitié. Les faire fuir lâchement et abandonner ensuite. Si nous frappions assez vite pour liquider la première partie de l'armée des loups, l'autre ne pouvait nous résister.

Un effet de surprise dangereux, qui demandait une discrétion presque totale.

Nous l'avions obtenue.

L'ennemi périt sous les traits légers plantés dans leurs poitrines.

Ce fut alors un déferlement de rage. Retrouvant courage et réactivité, nos soldats sortirent de leur cachette pour se ruer sur la porte principale en train de se refermer.

Warck - SurvivreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant