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Après un long moment où je ne fis que tourner sur moi-même en observant chaque double loup à la recherche d'une quelconque trace de sang, je reposai mes pupilles et toute l'intensité de leur regard sur l'homme que j'aime. Je fus surprise de voir le regard qu'il posa également sur moi : c'était exactement le même horrifié lorsqu'il avait observé les morts autour de lui.

Mais le plus dur à comprendre était qu'il n'était pas le seul à avoir ce regard chargé de peur. Le public entier me regardait avec attention. Phares s'était également levé de son siège et me regardait lui aussi, les yeux grands ouverts et les sourcils rudement froncés.

Si ce n'était pas la mort, la réalité n'était pas non plus similaire à il y a quelques instants. Les bruits supplémentaires que je pouvais entendre, les certaines émotions que je pouvais ressentir, même les gestes de certains me paraissaient clairs avant même que ceux-ci ne pensent à les faire. Nese s'approcha doucement vers moi, avec dans les yeux une lueur incertaine.

Je reculai d'un pas en me rendant compte que je n'étais pas la bienvenue ici. Le silence qu'affichait la salle était des plus pesants et je commençai à étouffer.

Nese plaça immédiatement une main devant lui face à mon recul pour me montrer qu'il n'avait aucune mauvaise intention, juste de faire ce que tout le monde avait envie de faire en ce moment. Comprendre. Ce geste ne m'aida pas à me radoucir et je ne pus m'empêcher de penser que c'était exactement ce même geste que nous faisions lorsque nous voulions dresser un cheval ou une bête un peu trop tenace.

— Diane ?

Une légère crainte s'afficha sur son visage lorsqu'il qu'il prononça calmement mon nom comme en s'adressant à une bête endormie en moi. Une nouvelle bête. Je ne l'avais encore jamais sentie auparavant. Cet instinct sauvage et animal.

Il s'avança de quelques pas supplémentaires. Je ne reculai pas cette fois et cela le convainquit qu'à présent, il n'avait plus rien à craindre de moi, car je n'avais plus non plus rien à craindre de lui. Il ne s'arrêta pas jusqu'à se trouver juste devant moi, yeux dans les yeux. Il hésita un instant, mais finit par effacer complètement la distance entre nos corps et il prit mon visage entre ses mains. Il me regarda sous tous les angles avant de répéter sa question que j'avais laissée à l'abandon.

— Diane, c'est bien toi ?

Je tentai de lui répondre, mais un léger grognement sortit à la place du langage des humains. Nous fûmes tous les deux surpris par cette nouveauté et je compris que tant que je ne lui aurais pas confirmé que j'étais... moi, il ne comprendrait pas tout seul. Après une deuxième tentative, seulement les voyelles sortirent.

— ... è... e... iè... aé ?

Je mis une main devant ma bouche, honteuse de ce qui était en train de se passer.

Je pensai à Nese qui me regardait, dépité.

Il fallait qu'il m'entende !

Il le fallait. Je devais savoir ce qui s'était passé ainsi que ce qu'il m'était arrivé. Je baissai les yeux en tentant de trouver un moyen à notre nouveau problème. Il me faudrait plusieurs essais avant de pouvoir parler à nouveau correctement, mais je ne voulais pas faire de nouvelles tentatives qui, j'en étais certaine, ne serait pas convaincante.

J'ouvris de grands yeux face à ce qui s'offrit à moi en retirant ma main de mes lèvres.

Ma main n'avait plus rien d'humain, excepté sa forme.

Je m'abaissai en obligeant Nese à enlever ses douces mains de mon visage et relevai lentement mon bas jusqu'au genou pour observer les soyeux poils noirs qui cachaient ma cheville.

Warck - SurvivreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant