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Je me décidai à ouvrir les yeux et le vit, lui, Nese. Toujours la même personnalité, j'imagine, mais plus la même apparence.

Autrefois, il fut homme ou tigre. Mais maintenant, il était homme et tigre. Je le regardai de haut en bas, absorbant les moindres détails de son nouveau corps.

Imaginez les formes d'un homme, l'apparence d'un homme. Rajoutez-y une fine couche de fourrure qui est plus épaisse à certains endroits. Cette fourrure est d'un blanc neige barrée irrégulièrement par les rayures habituelles que possèdent les tigres. Imaginez ce même nez, ces mêmes oreilles humaines, mais rajoutez-y également un fin pelage couleur neige. Pas de moustaches, mais bien une courte crinière de la même ampleur que ses cheveux précédents, simplement plus épaisse que les cheveux humains. Une longue queue animale à l'arrière tout aussi blanche que son pelage. Représentez-vous aussi des crocs blancs, très, très blancs et très, très pointus... Et pour finir des yeux. D'un bleu ciel, très clair, profond... dans lequel vous pourriez vous perdre d'une façon si intense que vous pourriez commencer à un peu trop l'apprécier.

Sa nouvelle musculature me frappa aussi, on pouvait voir ses abdos parfaitement dessinés sous son pelage d'une couleur parfaite. Je remarquai également qu'il n'était pas nu comme un vers face à moi et qu'il portait un pantalon très ajusté à sa taille, ainsi que deux fourreaux avec de magnifiques poignards placés dedans. Le premier se trouvait à sa ceinture et le second contre sa poitrine.

Voilà ce qui se tenait debout, devant moi, me laissant le regarder dans tous ses détails.

Alors je me levai à mon tour pour le regarder vraiment en face, avec difficulté, bien évidemment, mais planter mes yeux bruns dans ses yeux bleus me fit frissonner de satisfaction.

— De quoi ai-je l'air ?

— Tu es... splendide... je veux dire, me rattrapais-je, que ça te change... et que ce changement-là, en tous cas, te va à merveille.

Il eut un petit sourire de plaisir.

Il marcha encore un peu jusqu'à moi et se plaça à mes côtés, contemplant son reflet dans le miroir dans mon dos.

Si je ne me retournai pas pour regarder nos reflets comme il le faisait, c'était profiter pleinement de sa présence si proche de moi.

— Alors je ne fais plus qu'un ? Ces deux mondes si différents en un seul morceau ? me demanda-t-il sans vraiment me le dire directement.

Je ne répondis pas, le laissant dans ses pensées que j'espérais joyeuses.

— Je pense que c'est mieux ainsi, lui dis-je en appuyant mon regard toujours un peu plus.

— Tu crois ? sourit-il.

— De toute façon, je ne pense pas qu'on t'ait laissé le choix... c'est le grand conseil qui a parlé...

Tout à coup, je me demandai de quoi j'étais en train de parler.

— Qu'est-ce que le grand conseil ?

— Seuls ceux qui sont morts le savent, dit-il dans un murmure en se tournant vers moi à son tour. Mais pour répondre à ta question, ce sont les morts qui ont de grandes compétences et qui choisissent, au lieu de revenir sur terre, de vivre mortellement parmi ceux qui font de toi un animal, un dieu ou te laisser dormir dans un profond sommeil sans fin...

— Aux cieux..., murmurais-je pour affirmer ses dires.

— Aux cieux, affirma-t-il comme je l'avais espéré.

— Je peux te poser une question dont je ne suis pas sûr que tu connaisses la réponse ?

Il avait l'air de mieux s'y connaître que moi en cette matière-là, ce qui était évident à première vue.

Warck - SurvivreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant