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Le soleil était déjà à la fin de sa course lorsque je me dirigeais vers la petite maison en bois. Traverser le jardin fut d'une souffrance qui commençait à m'être familière, mais si celle-ci se trouvait être bien plus mentale que physique. Une odeur de cannelle s'introduisit dans mes narines lorsque j'arrivai au seuil de la porte et je soufflai de plaisir et d'apaisement face à cet arôme familier.

Je ne toquai pas et entrai sans prononcer le moindre mot. Je refermai la porte derrière moi et restai un instant sur le perron à observer les autres, qui parlaient péniblement autour du feu. À peine avais-je posé mes yeux sur mes compagnons que la tension électrique qui emplissait l'air m'emplit les narines. Je compris alors que cette situation n'était en fait facile pour personne. Je tournai rapidement les yeux du feu, de peur de croiser ceux d'une certaine personne, et les posai sur Ariana qui s'était levée d'un bond à ma vue pour me servir une tasse de sa précieuse boisson chaude.

— Je suis désolée que tu l'aies appris dans une situation aussi... délicate.

Évidemment, elle avait été mise au courant que très tard du fait que je m'étais prise d'amitié pour le meurtrier de maman.

— Mais également heureuse que tu sois enfin au courant pour notre histoire.

J'acceptai la tasse qu'elle me tendait et en bus une gorgée avant de la poser sur la table juste à côté de moi. Je me retournai ensuite vers ma sœur pour la cueillir dans mes bras et la serrer contre mon cœur. Ce geste me calma légèrement, et je pus faire disparaître les quelques émotions négatives que j'avais pu laisser passer en entrant. Elle me rendit mon étreinte, et je ne pus m'empêcher de sourire en sentant le bonheur de sa présence recouvrir lentement la haine envers Nese. Je m'obligeai pourtant à m'éloigner d'elle le moment après, et en profitai ensuite pour lui répondre :

— Je n'avais jamais imaginé avoir une sœur...

Elle me sourit chaleureusement alors que je reprenais ma tasse pour en boire une gorgée.

— C'est tout à fait normal. La façon dont je suis née est... comment dire... des plus spéciales ?

Je souris à mon tour. On était d'accord sur ce point. Elle avait eu une chance inouïe que les cieux aient eu pitié d'elle alors qu'elle n'avait pas encore respiré l'air de ce monde.

— Je ne peux certainement pas te dire le contraire. Mais, dis-moi, si c'est lui...

Le nommé et Line avaient arrêté de parler pour écouter notre conversation, mais je m'en foutais bien. Tout ce qui m'intéressait pour l'instant c'était d'avoir l'entièreté des réponses à mes questions.

— ... qui a eu le malheur de commettre le deuxième crime ? L'a-t-il fait également la première fois ?

Elle comprit le sens de ma question. Je voulais savoir qui avait commis l'impair de tuer ma mère avant qu'elle ne devienne une Kusinthas.

— Si tu veux tout savoir, les cieux ont passé plusieurs jours à me faire comprendre cet épisode dans tous ces détails. Cela m'a demandé une énergie que je ne croyais pas avoir.

J'acquiesçai. Son séjour aux cieux n'avait sûrement pas dû être des plus aisés. Lorsqu'elle se lança dans son récit, sa voix était toujours aussi calme et concentrée. Je me demandai alors si elle n'avait pas eu un entraînement spécial pour le contrôle de ses émotions.

— Je suis morte quatre ans avant ta naissance. Comme tu le sais, je suis morte à neuf mois dans le ventre de notre mère. Si la seconde fois, maman n'a pas eu le temps de regarder son meurtrier en face, la première a été extrêmement différente...

Cette fin de phrase me fit frissonner de la tête aux pieds.

— Cela s'est passé de la même manière que toi tu as eu la marque.

Warck - SurvivreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant