Partir pour vivre

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Alma

Je remonte les escaliers difficilement, comme si j'avais utilisé toute ma force.
Je suis épuisée et même obligée de me tenir à la rambarde pour ne pas tomber. Le couteau toujours fermement maintenu entre mes doigts.
Mes mains dégoulinent de sang et j'ai sûrement le visage tacheté de sang.

Tremblante et pleine de tristesse.
J'ouvre la porte et tombe presque directement sur les deux visages que je ne connais que trop bien. Abel et Roméo.
Je pourrais jurer qu'ils m'attendaient.
Je lâche la poignée et les regarde un peu trop sérieusement à mon goût.

Ils ne me lâchent pas. Personnes ne bougent personnes ne parlent.
Le seul geste que j'arrive à faire c'est leur montrer le couteau fermement devant eux et le lâcher. Je le laisse retomber sur le sol, en même temps que les larmes sur mon visage.

Les yeux d'Abel sont grand ouvert, comme s'il ne croyait pas ce qu'il venait de voir.
Comme si j'avais commis l'impossible.
Je l'ai fais. J'ai commis un geste qui m'était impossible.

L'énergie me quitte et je retombe sur mes genoux. Je n'ai plus de force.
Je laisse mes mains salir mon pantalon du sang de Lisea. Je les regarde tremblante, incapable de prononcer le moindre mot.

J'ai tué pour le plaisir, pour la paix.
Je voulais me débarrasser de toute cette souffrance. Je le voulais. Mais je crois qu'en réalité, je ne me pardonnerai jamais de l'avoir fait.
J'ai commis l'irréparable en voulant m'en sortir, pouvoir enfin me différencier des autres et au lieu de ça, désormais je suis comme eux. Je suis comme elle.
Je tue seulement pour le plaisir.

J'ai le souffle court et chaque inspiration que je prends résonne comme un hoquet.
Je me sens bien tout autant que mal.

Il faut que je parte. Il faut vraiment que je parte.
Alors je vais puiser dans le peu d'énergie qu'il me reste pour partir.

Je me redresse difficilement sous leurs regards. Toujours sans un mot.

— Tu... Commence Abel.

Je le fusille du regard. Je ne veux pas qu'il me parle. Je ne veux pas entendre sa voix. Je ne veux pas.
Je ne vais pas le supporter.
J'attrape le couteau et leur passe devant et monte les escaliers pour retrouver la salle de bain.
Il faut que je me lave. Que je retire tout ce sang.

Je m'enferme à double tour et la porte à peine refermé, je retombe sur les fesses dos à elle en hurlant.
De toute mes forces. J'ai besoin d'extérioriser sans un mot. Je veux juste hurler pour me sentir vide. Pour ne plus rien ressentir.

Je ne sais pas mettre les mots sur ce que je ressent.
Sur ce que je viens de commettre. Je n'ai pas vraiment mal, je dirai même que je me sens presque bien.
Peut-être qu'avoir mis un mot de fin m'a vraiment libéré de tout ce poison.
En réalité je ne sais pas. J'ai juste besoin de pleurer et de crier parce que je ne sais pas comment je vais.

Je ne sais pas si un jour, je me pardonnerai d'avoir tué Lisea. Tout ce que je peux dire maintenant, c'est que j'aurai la paix de ne plus prendre pour ses erreurs.

Je me frotte le visage pour essuyer mes larmes et essaie de me redresser tant bien que mal.

Devant le miroir la vision d'horreur que je vois me glace le sang et presque instinctivement, j'allume le robinet et l'eau coule. Je forme une coupe avec mes mains et frotte frénétiquement mon visage pour retirer le sang. Je frotte à en devenir rouge. Même quand les taches partent je continue. Je veux que tout le mal me quitte.
Je lave mes mains et même mes bras. Je me débarrasse définitivement de Lisea.
Jusqu'à la moindre trace qu'elle a laissée sur moi.

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