[ 9 ] Route 9, triangle et orage

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[ Quelque part sur la route 9 entre Córdoba et Rosario, Conté de Santa Fe, Argentine,
19 Avril 20**
17H13, heure locale ]

[ Trixie ]

Le vent siffle à mes oreilles malgré mon casque, fait claquer derrière moi les cheveux qui en dépassent ainsi que les franges de mon perfecto. Après avoir chevauché ma moto jusqu'à Victoria, j'ai embarqué à bord d'un train partant le plus au sud possible de l'Amérique du Sud. Illégalement, bien entendu.

J'ai emprunté les routes désertes de la pampa argentine, direction la ville de Córdoba, via la nationale 9. Córdoba que j'ai contournée par l'est via de plus petites routes, la 19 et la 3. Je ne préférais pas m'engager dans une ville trop peuplée. Surtout Córdoba... Nous n'y avons pas que des amis et avec mes cheveux, ce n'est pas difficile de me reconnaître.

Puis, je suis retournée sur la route 9. Ça fait maintenant un bon moment que je roule sur celle-ci. J'ai traversé pas mal de paysages : les montagnes, les forêts verdoyantes, les plateaux arides et rougeoyants, les grands lacs, les plaines fertiles de la pampa... L'Argentine est un grand pays, riche en biodiversité. J'aurais adoré y faire une pause pique-nique si je n'avais pas eu mon passé à niquer avant.

Au loin, le rio Paraná scintille. La ville de Rosario apparaît sur sa berge ; c'est cette ville que je vise. Je m'engage sur le périphérique, contourne la ville par la droite, traversant la banlieue avant d'atteindre la couronne, composée de quartiers résidentiels, entre classes moyenne et aisée. De jolies maisons aux façades propres, de jolis jardins bien fleuris et taillés, de jolies routes grises bien goudronnées... Voilà ce à quoi se résumera l'image des lieux qui restera gravée dans ma mémoire.

Le bruit de mon gros moteur vient déranger la quiétude du quartier. Je me gare sur une place probablement privée, descends, tire la béquille d'un coup de pied, enlève mon casque que je suspends au guidon, arrange mes couettes et rajuste mon perfecto en cuir en le dézippant. Nous sommes à la fin de la période dite « chaude ». Il doit faire, quoi ? 19°C ? Il fait bon, ma veste est amplement suffisante ; quoique les 81 % d'humidité dans l'air qui collent à la peau fassent drôlement plaisir...

J'observe un peu mieux les alentours, avec leurs mignons petits arbres bien entretenus par la municipalité, ou plutôt par les voisins du quartier. On est pas en Belgique, putain.

Até s'étend à ma demande pour localiser les habitants du quartier. Nous ne sommes jamais trop prudentes. Quelques enfants cessent de jouer, quelques adultes lèvent la tête au-dessus de leur barrière blanche. Certains jettent même un coup d'œil par l'entrebâillement d'un rideau, dissimulés derrière leur fenêtre qui offre, en effet, une haute protection... Ils froncent les sourcils, inquiets et curieux à la fois. Je sais parfaitement ce à quoi je leur fais penser. Je souris, vérifie une dernière fois les notes écrites en rouge par Michelle, puis m'avance vers l'une des maisons. Lyssa, pourtant restée calme durant le voyage, commence à s'agiter.

Je passe le petit portail. Lyssa feule en l'entendant claquer derrière moi. Ma démarche se raidit une seconde quand je traverse le jardin, le temps que je l'apaise.

Je n'ai pas encore besoin de toi. Je ne suis pas en danger. Calme-toi.

Je n'ai pas encore besoin de toi. Je ne suis pas en danger. Calme-toi.

Je n'ai pas encore besoin de toi. Je ne suis pas en danger. Calme-toi.

Lyssa retourne sagement à sa tanière avec un grommellement ennuyé. Elle est restée à la lisière de mon esprit depuis plusieurs jours, elle veut s'exprimer. Je trouverai bien un moment pour la faire jongler avec quelques objets anodins.

TRINITY - Tome 3 : Rencontre du troisième typeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant