TRINITY - Tome 3 : Rencontre du troisième type

[ Inter Chapitre N°8 ]

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Quinn Prud'homme lit le contrat avec une lenteur hallucinante, exaspérante. L'un de mes conseillers m'a avisé d'aller traiter directement avec la reine du Commonwealth. Je l'ai ignoré, préférant rencontrer le premier ministre canadien, conscient que la domination qu'exerce le Royaume-Uni sur le Canada ne tient plus qu'à un fil effilé. L'honorable Quinn Prud'homme se redresse dans son fauteuil.

— Je refuse.

Ce gamin n'a pas intérêt à croire qu'il va être capable de me refuser ce que je désire...

— Rappelez-vous les derniers événements inquiétants qui ont eu lieu dans votre propre pays. Des incidents de cet acabit vont se reproduire, s'amplifier. Vous ne pouvez ignorer cette menace.

Mon interlocuteur soupire, referme la chemise qu'il me tend pour me la rendre. Mes mains restent bien là où elles se trouvent, croisées face à moi.

— Justement, en parlant des marqués, j'ai fait déclassifier quelques dossiers remplis par mon prédécesseur. Ce n'est pas quelque chose de si neuf que ça. Seulement, ils étaient plus discrets, à l'époque. J'ai appris des choses très croustillantes datant des années soixante... divague-t-il. Bref. Je ne vais pas vous aider, car je ne suis pas en accord avec vous, ni avec vos propos, ni avec vos méthodes. Je ne voudrais pas que mon fils grandisse dans un monde comme vous le décrivez dans ces lignes, un monde manichéen où les grands méchants sont des citoyens nés avec une différence.

Quinn Prud'homme pose le contrat devant moi. Je n'y touche pas.

— À ce moment-là, autant rétablir immédiatement la ségrégation –- avec des personnes possédant une grappe d'écailles autour de l'œil.

Mon rire remplit la pièce. Ce gamin fait comme s'il savait de quoi il parle.

— Ce ne sont pas juste des personnes avec quelques écailles sur le visage. Ce sont des monstres capables de détruire des vies...
— Écoutez-vous ! me coupe le Premier Ministre. Tout le monde est en théorie capable de faire souffrir autrui, et même de tuer. Vous et moi y compris. Ce n'est pas parce que l'on possède un grand couteau de cuisine que l'on va s'en servir pour égorger quelqu'un au lieu de cuisiner pour sa famille. Je ne signerai pas votre contrat, jure-t-il d'une voix forte en me rendant le dossier. Maintenant, partez. Je vous serais même gré de quitter le territoire au plus vite.

Mes mâchoires se contractent. Mon sang bout dans mes veines. Il ne fait qu'un tour. Je me lève d'un coup en faisant tomber ma chaise à la renverse. J'affronte du regard Quinn Prud'homme, qui ne détourne pas les yeux.

— Vous le regretterez. Un jour, vous avouerez à Finn, éructé-je en utilisant intentionnellement le prénom de son fils, que s'il grandit dans un monde aussi misérable, c'est à cause d'un choix tout aussi misérable de votre part.
— Sortez.

J'envoie valser le contrat face à moi. Dans une suite de bruissements, ses feuilles noircies d'encre volettent avant de s'écraser au sol. Quinn Prud'homme ne bouge pas d'un cil, ce qui me fait enrager encore plus. Je tourne les talons, passe la porte, claque violemment cette dernière derrière moi.

— Comment ça s'est... ose débuter Liamine.
— Cette homme est un abruti, le coupé-je en sortant à grandes enjambées de la bâtisse de brique rouge.