La bêtise de mon âme me semblait presque comique dans sa naïveté, presque enfantine, presque mignonne, attendrissante, je voulais lui baiser le front et rire de son étrangeté gamine, la rassurer d'un sourire étriqué et secouer le visage comme les vieux qui rient de ton âge.
Je pensais naïvement qu'Hector suffirait à réchauffer mon âme glacée, cave hivernale dépouillée de chauffage, igloo bipolaire, nuages gelés, violacés, grisâtres, âtre pleine de cendres, Atrides putride laissé pour mort sur une planète ensablée.
J'ai envie de rire à mon idiotie. Lui rire au nez, bruyamment, avec le charisme du type qui savait, qui savait depuis le début que l'autre perdrait, que l'autre n'était qu'un pauvre abruti. Jekyll et Hyde, je me foutais de ma propre gueule, je me riais au nez autant que je riais au nez de l'abruti que j'étais, l'abruti emmêlé dans des sentiments pervertis par l'anxiété, par la sobriété, par la dépression et l'hilarité— de qui? Des dieux? Des gens qui, spectateurs au théâtre de ma douleur me riait au nez, eux aussi? Poivre et sel, ils me regardaient crever comme des charognards affamés, ventres gargouillants au rythme de l'apparition de mes plaies?
Je crève, je meurs, je souffre, je saigne à flots sur une plateforme de bois cassé, bras cassé, je regarde les projecteurs, ahuris, hilare, ignare, j'aurais aimé ne rien sentir, ne plus mentir, ne plus dire les mots qui, indignes onomatopées, traversent mes lèvres sans s'arrêter.
Je suis un comédien. Autodérision en main, je me laisse mourir de honte sous les bombes—tomates qui me tombent dessus. Je ne fais rire personne, j'entends même les larmes d'un gamin déprimé qui voulait pourtant pleurer d'hilarité. Pourquoi me regardes-tu, gamin? Ne sais-tu pas que je suis l'acteur et le réacteur, que je suis la cause et la victime de mes soucis, que je suis bourreau et mort, que je suis juge et avocat, client à la fois, que je suis assassin, assassiné, que je suis prince et paysan, noblesse et tiers état, citoyen et esclave.
Dieux, pardonnez-moi!
J'ai osé aimer le soleil sans réfléchir aux UVs, j'ai brûlé comme un idiot, cramé sur la plage de mes soucis. C'est marrant comme les verres rosés des lunettes de soleil rendent les scènes les plus obscènes, romantiques. C'est drôle comme ses red flags étaient blancs quand mes lunettes siégeaient sur mon nez distordu. C'est hilarant comme je suis implacablement naïf. Idiot. Abruti.
Je mérite mes problèmes.
Je ne suis pas assez intelligent pour y échapper, de toute manière.
J'ai envie de lui rire au nez. A ce jeune homme qui pensait éviter la douleur. A ce type qui croyait dépasser la souffrance. A ce gars qui pensait que le chaud annulait le froid, que les flammes annulaient le givre, que la brûlure du froid ne mordait pas autant que celle des flammes rêches des Enfers.
Mes pensées n'ont aucun sens. Pourquoi est-ce que je laisse fonctionner mon cerveau?
Je suis inutile. Poésie éventrée sur une page calcinée.
Tais-toi, Achille.
Au moins j'ai réussi mes partiels. Peut être est-ce grâce à lui, mon soleil?
Tais-toi.
Tu ne dois pas penser à lui autant. Tu vas cramer et tu ne survivras pas cette fois.
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Achille
RomanceIcare brûle, Icare s'enflamme, mais le soleil l'acclame. Icare aime le soleil d'un amour éternel